Il y a un mois tout juste, Facebook officialisait Libra.
Le groupe américain entend développer, dans ce cadre, « une devise et une structure financière mondiales […] au service de milliards de personnes ».
Cet écosystème sera porté par une cryptomonnaie « stable, basée sur une blockchain open source […], garantie par une réserve d’actifs réels et régie par une association indépendante ».
David Marcus, anciennement responsable des services de messagerie chez Facebook, chapeaute cette association basée à Genève (Suisse).
Auditionné mardi 16 juillet par le Sénat américain, il était à nouveau appelé à témoigner ce mercredi devant la commission des finances de la Chambre des représentants.
« Nous prendrons le temps de faire les choses bien », a-t-il assuré. Tout en précisant que Facebook a choisi d’officialiser le projet très en amont afin d’amorcer dialogue avec les parties intéressées.
Interrogé la semaine dernière par cette même commission des finances, Jerome Powell avait résumé les enjeux que soulève Libra. Le président du Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale avait évoqué la vie privée, le blanchiment, la protection des consommateurs et la stabilité du système financier.
Questionné par les représentants sur ces problématiques, David Marcus n’a pas rassuré. Au sortir de l’audition, nombre d’élus estiment que Facebook n’apporte pas, en l’état, suffisamment de garanties.
Carolyn Maloney (Parti démocrate, État de New York), se montre défavorable au projet. Mais s’il devait se concrétiser, il serait préférable, affirme-t-elle, de commencer par un pilote limité à un million d’utilisateurs et supervisé par les régulateurs des marchés financiers aux États-Unis.
David Marcus ne s’est pas engagé sur ce principe. Tout au plus a-t-il affirmé que Libra ne serait pas lancé tant que les questions qu’il soulève n’auront pas été résolues.
Au-delà de la protection des consommateurs et de leurs données, il y a celle des investisseurs.
Pour donner à Libra sa valeur intrinsèque et garantir sa stabilité, Facebook compte s’appuyer sur une réserve d’actifs réels « de faible volatilité ». Essentiellement des devises provenant de banques centrales.
Cette réserve proviendra d’une part des utilisateurs qui achèteront des Libras. Et de l’autre, d’investisseurs qui acquerront des « Investment Tokens ».
Ces jetons permettront de recevoir, à terme, des dividendes sur les intérêts engendrés par les « actifs à faible risque » dans lesquels sera réinvestie la réserve.
Aussi pourraient-ils être assimilés à des titres financiers. Ce qui mettrait Calibra (filiale de Facebook chargée du projet) sous le coup de nombreuses obligations en matière de communication aux investisseurs.
La commission des finances de la Chambre des représentants évoque aussi un « risque systémique ». Il n’est pas certain, à en constater la présentation actuelle du projet, que Facebook doive être régulé comme une banque. Mais s’il y échappe, une déstabilisation du système financier mondial n’est pas à exclure.
Les ministres des Finances du G7 sont globalement sur la même ligne. Réunis ce mercredi à Chantilly (Oise) en présence de gouverneurs de banques centrales, ils se sont accordés sur la nécessité d’agir rapidement.
« Les conditions ne sont pas réunies pour un lancement », estime Bruno Le Maire. Et d’ajouter : « La souveraineté des nations ne saurait être mise en danger ».
Le G7 a chargé la Banque centrale européenne de mettre en place un groupe de travail sur les cryptomonnaies. Celui-ci verra sa composition évoluer avec le temps, notamment « en fonction de l’influence de Libra sur l’économie mondiale », d’après Haruhiko Kuroda, gouverneur de la Banque centrale du Japon.
L’épée de Damoclès qui plane sur Libra a eu un effet négatif sur les principales cryptomonnaies. Le bitcoin cote actuellement sous les 9 000 €, loin de son pic à plus de 12 000 € atteint le 26 juin. L’ether est passé sous les 200 €, alors qu’il dépassait les 300 ce même 26 juin. Ripple, dans le même laps de temps, a perdu un tiers de sa valeur (d’environ 0,42 € à 0,28 €).
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