Logiciel libre et compétitivité : une décision complexe pour un vrai projet industriel
A l’occasion de Paris Capitale du Libre, cinq intervenants, dont le DSI de
Free, témoignaient de leur expérience de l’open source dans leur entreprise.
Les compétences du libre
Prendre en main le développement ou l’amélioration d’un logiciel nécessite des compétences dans lesquelles les PME n’ont pas toujours les moyens d’investir. Pour David Taillandier, il est nécessaire de disposer d’un architecte en interne qui pilotera les développements auprès des prestataires extérieurs. Mais selon lui, « la problématique est la même avec le propriétaire. Sauf qu’avec ce dernier, on paye la licence et le service alors qu’on ne paye que le service avec l’open source. » Pour le DSI de EMJ, « le coût d’adaptation humaine est à peu près identique [dans les deux environnements] ».
De son côté, Luc Viatour fait remarquer que l’installation de logiciels libres sur le poste de travail ne requiert aucune compétence particulière. « L’installation d’OpenOffice est même plus simple et plus rapide qu’avec Office, on n’a pas de numéro de licence à entrer. » Mais au-delà de cette facilité, « l’économie réalisée sur le coût des licences permet d’investir dans des consultants pour régler les problèmes ».
En revanche, l’aspect communautaire qui réunit des dizaines, centaines ou milliers de contributeurs extérieurs est indispensable. « Nous n’aurions jamais été aussi loin sans ça », avoue le DSI de Dupesi. Patrick Vignaud confirme : « C’est la première question à se poser. Quelle communauté est derrière telle solution? » Et d’enfoncer le clou en estimant que « dès que la communauté s’intéresse à une solution, ça fonctionne ». Un développement gracieux auquel les différents intervenants tentent de contribuer à leur tour sous forme de développement ou correction de code, d’offre d’hébergement serveur, etc.
La pérennité du libre
Il est également souvent reproché aux solutions libres d’être constituées d’applications non finies. Un faux problème, selon Luc Viatour, qui rappelle que les besoins de l’entreprise ne sont jamais figés et qu’il convient aux logiciels de s’adapter à l’existant. « A la différence du monde propriétaire, le logiciel libre est en constante évolution », estime-t-il, « et je préfère des petites évolutions transparentes pour l’utilisateur qu’une rupture technologique comme avec le passage de Windows XP à Vista », qui serait plus difficile à appréhender pour les utilisateurs.
Antoine Levavasseur fait de son côté remarquer que la problématique de la compatibilité des applications est toujours prise en compte. « Les développeurs se basent sur une structure de fichier qui permet d’installer une nouvelle version sans trop de souci avec l’existant », souligne-t-il.
Louis Naugès, président de Microcost France [bien lire Microcost, ndlr], une agence de développement et conseils créée en 2004, fait remarquer que lorsqu’un éditeur propriétaire disparaît, le code des applications aussi. « Ce n’est pas le cas avec l’open source. » Enfin, en matière de fiabilité, David Taillandier déclare exploiter des serveurs « qui n’ont pas eu besoin d’évoluer depuis six ans et qui fonctionnent parfaitement ». Il faudra le croire sur parole.
On le voit, les intervenants étaient tous de solides partisans du logiciel libre. S’ils ont abordé les questions essentielles que tout dirigeant d’entreprise, et particulièrement de PME, est en droit de se poser avant d’adopter le modèle open source, aucune grande ligne directrice n’a été dégagée. Leurs témoignages ont néanmoins permis de d’illustrer les usages de l’open source à travers des cas concrets et de confirmer les points positifs du libre. Il manquait cependant un véritable partisan des solutions propriétaires pour re-équilibrer le débat.