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Lutte anti-terrorisme: Manuel Valls veut canaliser Internet et les réseaux sociaux

Unité nationale à l’Assemblée nationale, c’est rare.

Dans son discours adressé mardi après-midi devant les députés, le Premier ministre Manuel Valls a annoncé des « mesures exceptionnelles » pour renforcer la lutte contre le terrorisme. Mais elles risquent de heurter les libertés numériques.

En termes de bases de données, on peut se réjouir d’un nouveau fichier qui « obligera les personnes condamnées pour des faits de terrorisme ou ayant intégré des groupes de combat terroristes à déclarer leur domicile et à se soumettre à des obligations de contrôle ».

Mais une autre base de données dédiée aux transports de passagers risque de froisser la protection de la vie privée, comme l’a souligné la CNIL dans un avis rendu au gouvernement.

Le système API-PNR France concernera les passagers de compagnies aériennes (mais aussi ferroviaires et maritimes) et tous des passagers des vols à destination et en provenance du territoire national (à l’exception des vols reliant deux points de la France métropolitaine).

Une série de données sera collectée dans un fichier centralisé lors de l’achat d’un titre de transport : nom, prénom, adresse, numéro de téléphone, numéro de carte bancaire, itinéraire, dates de voyage, etc.

Alors que ce système sur les échanges de données des passagers (PNR) patine au niveau européen (le Parlement européen semble exprimer de fortes réticences), la France veut aller plus vite. « La plateforme française sera opérationnelle à partir de septembre », a déclaré Manuel Valls.

Autres mesures qui vont malmener notre marge de liberté à l’ère numérique : Manuel Valls a demandé au ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve de formuler des propositions concernant le contrôle d’internet et des réseaux sociaux.

Inutile de fermer les yeux : c’est un vecteur de propagande islamiste et un canal de recrutement pour alimenter les filières djihadistes. Un constat partagé au niveau européen mais il reste à trouver les bonnes solutions pour y remédier.

Au nom de la lutte anti-terroriste, le premier ministre britannique David Cameron exige que les services de renseignement nationaux aient la possibilité d’écouter les communications sur tous les services de messageries instantanées sur mobile.

Ce que l’on peut interpréter comme une volonté de mettre un terme aux velléités de chiffrement des services Internet pour renforcer la confidentialité des échanges. Une tendance suivie par les pros de l’IT et des géants du Web après les révélations d’Edward Snowden (à commencer par le scandale de la cyber-surveillance à grande échelle Prism montée par la NSA).

Apologie du terrorisme relayée sur Internet : la fermeté

Retour en France : le gouvernement de Manuel Valls se montre aussi vigilant sur les messages d’appels à la haine qui apparaissent sur Internet après les attentats qui ont ensanglanté la France pendant trois jours.

La justice prend le relais. Par exemple, le tribunal correctionnel de Toulon a condamné un jeune homme à un an de prison, dont trois mois ferme pour apologie d’un acte terroriste. Motif : il avait publié sur sa page Facebook des photos de djihadistes agrémentées de ce commentaire : « On a bien tapé, mettez la djellaba, on ne va pas se rendre, il y a d’autres frères à Marseille. »

Qu’importe les personnes concernées (inconnus ou personnalités médiatiques), le gouvernement prône la fermeté. En début de semaine, le Parquet de Paris a ouvert une enquête à l’encontre de Dieudonné. De façon odieuse, il avait écrit dimanche sur sa page Facebook : « Je me sens Charlie Coulibaly » (le message a disparu depuis). Il vient d’être placé en garde à vue à Paris ce mercredi matin.

Dans un article daté du 13 janvier, Libération a recensé six condamnations de prison ferme pour des délits similaires sur Internet ou dans la vie réelle depuis les attentats.

Mais la tâche est énorme : Bernard Cazeneuve a recensé 12 600 messages faisant l’apologie des attentats qui ont été repérés sur les réseaux sociaux depuis l’attaque sur Charlie Hebdo.

La plateforme Pharos est sollicitée. C’est le nom du dispositif du ministère de l’Intérieur qui collecte les signalements de contenus illicites sur la base des internautes volontaires (via Internet-signalement.gouv.fr).

La montée en charge est perceptible : « Du 7 au 12 janvier inclus, nous en avons reçu 20 200, dont environ 17 500 portaient sur des contenus faisant l’apologie du terrorisme ou incitant à la haine », recense Valérie Maldonado, qui dirige l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC), cité par LeMonde. « Lors d’une journée ‘normale’, nous recevons en moyenne 400 signalements. »

Il a fallu renforcer les équipes pour analyser les données collectées via Pharos et effectuer le suivi qui peut se traduire par un transfert des dossiers les plus compromettants au Parquet qui pourra engager des poursuites.


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