Manifestement, la justice américaine n’en a pas fini avec le cas Microsoft et ses pratiques anticoncurrentielles, conséquences de l’hégémonie de son système d’exploitation Windows sur les PC. Après une nouvelle plainte de dix-neuf Etats contre l’éditeur (voir édition du 22 octobre 2003), voilà que Collen Kollar-Kotelly – la juge d’instance à l’origine du règlement à l’amiable censé régler le long procès antitrust qui a opposé Microsoft aux instances juridiques fédérales et locales américaines – a publiquement émis des doutes sur l’efficacité du dispositif qu’elle a elle-même mis en place. La juge remet en cause notamment un des points clés de l’accord : l’ouverture de certaines portions du code source de Windows ? essentiellement les protocoles de communication – aux concurrents de Microsoft, ce qui leur permettrait de développer des produits parfaitement compatibles avec le système d’exploitation. En effet, à ce jour, seulement cinq éditeurs ont exploité cette possibilité en souscrivant une licence auprès de Microsoft, laquelle leur donne accès à sa technologie. « Nous espérions plus d’accords », a déclaré la juge, avant d’ajouter qu’elle avait à coeur de comprendre pourquoi tel n’était pas le cas.
Un prix « raisonnable et non discriminatoire »
A cette fin, elle a exhorté le ministère américain de la Justice (Department of Justice, DoJ) à enquêter auprès des éditeurs afin de savoir si cette disposition de l’accord à l’amiable ne les intéressait pas ou bien si les conditions financières qui leur sont faites étaient jugées trop défavorables. Pourtant, le DoJ n’a pas ménagé sa peine pour faire en sorte que le prix à payer pour accéder au code source de Windows soit « raisonnable et non discriminatoire ». Ce point avait fait l’objet d’âpres négociations entre le DoJ et Microsoft, aboutissant fin juillet à un accord satisfaisant les deux parties (voir édition du 28 juillet 2003).
Que faut-il attendre des interrogations de la juge Kollar-Kotelly ? A vrai dire, pas grand-chose dans l’immédiat, le DoJ ayant fait savoir qu’il faudrait plusieurs mois afin de déterminer si oui ou non l’accord à l’amiable est de nature à empêcher Microsoft de continuer d’abuser de sa position dominante sur les systèmes d’exploitation pour PC afin de s’imposer dans d’autres domaines applicatifs. Ce qu’il y a de certain en tout cas, c’est que ni la juge Kollar-Kollety, ni les ministres de la justice des Etats, ni le DoJ ne lâchent l’affaire et ils n’auront de cesse de reconsidérer leurs positions respectives au regard de l’évolution du paysage concurrentiel. Il faut également compter sur la pugnacité de l’Etat du Massachussets, le seul à n’avoir pas accepté l’accord à l’amiable. Dans un mois sera jugée en appel sa plainte contre Microsoft. Selon le tour que prennent les événements, sa position – qui a toujours été de demander des sanctions dures contre l’éditeur, comme son démantèlement – pourrait gagner en crédibilité.
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