Microsoft déclaré coupable !

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Le juge Jackson a rendu lundi soir ses conclusions définitives. Microsoft est reconnu coupable d’abus de position dominante. Il lui reste encore à statuer sur les sanctions qui découlent de cette décision.

Le couperet est donc finalement tombé. Quelques heures après que le Juge Posner a indiqué abandonné ses efforts de conciliation entre Microsoft et le gouvernement américain (voir édition du 3 avril 2000), le juge Thomas Penfield Jackson, chargé de l’affaire, a rendu ses conclusions finales. Microsoft est coupable d’abus de position dominante. Bien qu’un peu indigeste, son rapport est parfaitement clair : « la Cour conclue que Microsoft a maintenu son pouvoir de monopole par des moyens anti-concurrentiels et a tenté de monopoliser le marché des navigateurs Internet, en violation du paragraphe 2 du Sherman Act (la législation anti-trust américaine, ndlr). Microsoft a également violé le paragraphe 1 en couplant illégalement son butineur Internet avec son système d’exploitation ». Difficile d’être plus clair. En revanche, la Cour n’a pas retenu comme illégaux les « accords marketing conclus avec d’autres sociétés ». Autrement dit, les accords de distribution d’Internet Explorer ne sont pas visés.

Immédiatement après la déclaration du juge Jackson, les représentants de Microsoft ont indiqué qu’ils faisaient appel de cette décision. Cet appel est bien sûr suspensif, c’est-à-dire qu’aucune décision, quelle qu’elle soit, ne pourra s’appliquer à Microsoft tant que la Cour d’Appel ne se sera pas prononcée. En réalité, cette dernière ne pourra se saisir de l’affaire qu’une fois le travail du juge Jackson terminé. Il lui reste en effet à se prononcer sur les sanctions devant frapper la firme de Bill Gates. Ce qui devrait lui prendre encore quelques mois. Pendant cette période, le juge consultera de nombreux conseils, et les discussions avec Microsoft continueront. Toutefois, Olivier Richard, responsable de la Communication de Microsoft France, s’affirme plutôt pessimiste : « Techniquement, atteindre un accord à l’amiable est encore possible, mais franchement improbable, vu les quatre mois de négociation infructueuse qui viennent de s’écouler ».

Quelles sanctions ? De ci, de là, on évoque le démantèlement, la réorganisation forcée, la surveillance très stricte des procédés commerciaux de Microsoft. « Le démantèlement tient plus de la rumeur que d’actes probables », a insisté Olivier Richard. « Le juge ne l’a jamais envisagé, ni par écrit, ni par oral en public »ajoute-t-il.

Les conclusions du rapport Jackson portent tout de même de sacrés coups concernant les deux principaux problèmes ayant provoqué l’ire du gouvernement américain et des 19 états américains ayant porté plainte contre Microsoft. Concernant la lutte contre Netscape, qui a plus qu’érodé les parts de marché de Navigator au profit d’Explorer dont on estime qu’il est utilisé par plus de 70 % des internautes, le juge soutient notamment que « Microsoft a usé d’incitations et de menaces pour convaincre les principaux OEM de porter leurs efforts de distribution, de promotion et techniques vers Internet Explorer, tout en excluant Navigator ».

Tout aussi virulent face à l’attitude de Microsoft vis à vis de Java, le rapport explique qu’« une des parties de sa stratégie en vue de protéger ses barrières applicatives, consistait à utiliser un ensemble de tactiques destinées à maximiser la difficulté de portage des applications écrites en Java de Windows vers d’autres plate-formes et vice versa. La première de ces mesures a été la création d’une implémentation [de Java] pour Windows dégradant la portabilité et qui était incompatible avec les autres implémentations. Microsoft a ensuite incité les développeurs a utilisé son implémentation de Java plutôt que celles en accord avec les directives de Sun ».

Un porte-parole a clairement défini l’obstination de Microsoft : « Nous sommes persuadés que le système légal nous donnera raison à terme et confirmera notre capacité à développer des logiciels innovants ». Au delà du discours convenu, cette phrase montre que Microsoft ira jusqu’au bout, « jusqu’à la Cour Suprême, s’il le faut », nous a même confirmé Olivier Richard. Autant dire que « l’Affaire Microsoft » risque de durer encore de longues années.

Pour en savoir plus :

* Les conclusions du juge Jackson (en anglais)