Mobilisation contre la loi sur le droit d’auteur
Sous prétexte de protéger les droits d’auteur, les industriels chercheraient à interdire l’usage des logiciels d’échanges peer-to-peer.
A quelques semaines du vote de la loi sur le droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information (DADVSI) prévu les 22 et 23 décembre prochains, la communauté des logiciels libres et l’Association des audionautes (ADA) se mobilisent pour dénoncer « la mise en coupe réglée de la culture numérique », selon l’EUCD.info, une branche de la Free Software Foundation France (FSF France).
L’objet de leur inquiétude ? Un amendement émanant de la commission en charge de la distribution des oeuvres sur Internet rattachée au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA). Cette instance, rattachée au ministère de la Culture et dans laquelle siègent les représentants d’ayants droit, des industriels et des consommateurs, viserait à « vouloir faire interdire les seuls logiciels permettant à tous d’accéder [à la culture]« , précise l’EUCD.info dans son communiqué.
Autrement dit, cette mesure concernerait tous les logiciels d’échange de fichiers en peer-to-peer (P2P) non dotés d’un module de gestion des droits numériques (DRM) seraient purement et simplement interdits de diffusion. Notamment les logiciels libres qui n’ont pas vocation à intégrer les DRM.
« Vous allez arrêter de publier vos logiciels », se serait entendu dire Christophe Espern, cofondateur d’EUCD.info et représentant des licences Creative Commons France (voir édition du 19 novembre 2004), à l’occasion d’une réunion au ministère de la Culture le 18 novembre dernier.
Des menaces qui pourraient être mises à exécution si l’amendement « VU/SACEM/BSA/FT Division Contenus » était retenu par le CSPLA puis adopté par le gouvernement en vue de préparer le terrain pour les prochaines discussions parlementaires sur le projet de loi DADVSI. Cet amendement pourrait de même concerner les applications de dialogue en direct (chat) et de messagerie électronique, qui permettent également l’échange de fichiers entre particuliers.
Lutter contre les téléchargements illégaux
De son côté, l’ADA « s’étonne que le Président de la commission Internet du CSPLA propose le vote d’un amendement écrit par Vivendi Universal ». L’association regrette que la commission Internet du CSPLA « n’ait pas jugé utile d’auditionner les organisations représentatives des internautes lors de ses travaux, s’interdisant par la même d’appréhender le rôle de la société civile et l’évolution des usages du réseau ».
Certes, le texte défendu par le gouvernement vise à lutter contre les téléchargements illégaux. Mais le flou qui l’entoure ouvre la porte à de nombreuses dérives. Rappelons que le P2P n’est qu’une technologie parmi d’autres que certaines majors du disque et du cinéma regardent avec intérêt dans le cadre de leurs propres stratégies de distribution de leurs produits.
« Le loup est sorti du bois », déclare l’EUCD.info dans un communiqué du 25 novembre. « Comment des personnes peuvent-elles à la fois prétendre défendre la culture et vouloir faire interdire les seuls logiciels permettant à tous d’y accéder ? À mon sens, la contradiction n’est qu’apparente : leurs intentions visent le contrôle du public, la culture n’est qu’un prétexte. »
Pour le représentant de FSF France, la situation est intolérable. « Que des industriels emploient des moyens peu glorieux pour arriver à leurs fins, cela n’est pas nouveau. Qu’un gouvernement y participe avec une complicité de moins en moins dissimulée est déjà plus inquiétant », affirme le représentant de FSF France.
Pas d’avis définitif et fiable avant la réunion pleinière
Difficile d’avoir un commentaire du CSPLA sur le sujet. Sur le site Internet de l’instance rattaché au ministère de la Culture, on précise qu’avant la réunion pleinière prévue le 7 décembre, « aucun projet de rapport ou d’avis se réclamant du Conseil supérieur et relatif aux sujets traités par les commissions ne saurait être considéré comme définitif et fiable. »