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Napster retourne devant le juge

On a cru un moment que Napster allait fermer, mais quelques heures à peine avant le moment critique, un retournement de situation inattendu se produisait : l’injonction de fermeture était annulée (voir édition du 31 juillet 2000). Depuis, les soutiens au logiciel de partage de musique en ligne se sont multipliés et ses équivalents, légaux ou non, fleurissent sur le Web alors que les audiences dans le procès Napster reprennent aujourd’hui.

L’histoire Napster a commencé en 1998, dans la tête d’ un étudiant de 18 ans qui rêvait de mettre au point un moyen de rechercher et copier des chansons entre PC. Deux ans plus tard, Napster compterait plus de 25 millions d’utilisateurs. Et il est poursuivi depuis décembre 1999 par la très puissante RIAA (Recording industry association of America) qui compte parmi ses membres les plus importants acteurs de l’industrie du disque. On peut ainsi citer Seagram, Universal Music, BMG, Sony Music, Warner Music ou encore EMI. Des géants qui accusent Napster d’encourager le piratage et de violer leurs droits d’auteurs.

Mais c’est précisément ce procès qui a fait tout le succès de Napster. Ainsi, quand en juillet la juge Marilyn Patel ordonne la fermeture, le nombre d’utilisateurs triple. Surtout, Napster est le précurseur de toute une série de logiciels de partage de musique en ligne et plus généralement, son essor correspond au développement de la musique en ligne. Car depuis le début de l’année, toutes les Majors s’y sont mises (voir édition du 12 septembre 2000).

Napster a agi comme un catalyseur. Les réflexions sur le droit d’auteur ou la protection des fichiers ont bénéficié de la prise de conscience liée à ce logiciel. On parle désormais de « Peer-to-peer », l’échange de fichiers entre particuliers. Actuellement, des solutions sécurisées voient le jour, tel le watermarking, qui consiste à ajouter une empreinte à un fichier pour en vérifier l’identité. La SDMI est en train d’élaborer des standards dans ce sens (voir édition du 15 septembre 2000). D’ailleurs, de manière fort surprenante, Napster fait partie de la Secure digital music initiative, aux côtés de fournisseurs de solutions de protection des fichiers et de fabricants comme Intel. Intel qui serait en discussion avec Aimster, un descendant de Napster qui permet de partager des morceaux entre utilisateurs du logiciel de messagerie instantanée d’AOL (voir édition du 4 septembre 2000). La semaine dernière, on apprenait que EMI serait elle aussi intéressée par Aimster. Sa maison de disque Capitol Records, celle des Beatles, s’est associée au petit frère de Napster pour promouvoir le nouvel album du groupe Radiohead… Sachant qu’EMI fait partie de ceux qui ont porté plainte contre Napster, la démarche est plus que contradictoire.

Parmi les nouveaux alliés de Napster, on compte un nombre impressionnant d’associations regroupant des industriels ou des consommateurs (voir édition du 30 août 2000). Dernières arrivées : les universités américaines, dont Stanford, Princeton ou encore Duke, qui refusent d’interdire l’emploi du logiciel sur leurs campus. Pour finir, un sondage du Pew Internet and American life project rapporte que 43 % des Américains connectés à Internet considèrent que télécharger de la musique n’est pas du vol, alors que 31 % pensent le contraire. Selon cette même étude, 22 % des Américains ayant déjà navigué sur le Web ont déjà téléchargé de la musique.

Mais quel que soit le contexte, le destin de Napster est entre les mains de la justice américaine. Le jugement rendu pourrait faire jurisprudence au-delà de la musique en ligne, sur l’échange de fichiers en général. Il faut garder aussi à l’esprit que dans le cas de Napster, les juges sont face à une société, or de plus en plus de logiciels fonctionnent sans serveur, en reliant directement les ordinateurs de leurs utilisateurs entre eux. Pour les poursuivre devant la justice il faudrait porter plainte contre tous les utilisateurs. Beaucoup moins simple…

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