Nicolas Sarkozy a-t-il trouvé « la troisième voie » qu’il recherchait début 2006 en plein débat parlementaire sur la licence légale à l’occasion du projet de loi Dadvsi* ? A l’époque, il occupait le poste de ministre de l’Intérieur du gouvernement De Villepin et président de l’UMP et quasi-candidat à l’Elysée. Maintenant, en qualité de Président de la République, il dispose d’une marge de manoeuvre plus grande pour favoriser son approche dans la lutte anti-piratage déjà qualifiée de « graduelle » à l’époque.
Le chef d’Etat français a trouvé le bon tempo en s’exprimant vendredi en fin de matinée sur le sujet à l’occasion de la remise du rapport Olivennes sur la lutte contre le téléchargement illicite et le développement des offres légales d’oeuvres numériques (musique, télévision, cinéma) et de la signature de l’accord tripartite liant l’Etat, les fournisseurs d’accès Internet (FAI) et les ayants droit.
« Je veux saluer ce moment décisif pour l’avènement d’un Internet civilisé », s’enhardit Nicolas Sarkozy, qui n’hésite pas à évoquer le World Wide Web comme « une nouvelle frontière, un territoire à conquérir » (expression qui sonne comme une référence à la politique de l’ancien président des Etats-Unis JFK dans les années 60) sans que cela devienne le « Far-West high-tech ».
« Piratage, ce trou noir »
« Le clonage et la dissémination de fichiers à l’infini ont entraîné depuis cinq ans la ruine progressive de l’économie musicale », commente-t-il pour qualifier le piratage, véritable « trou noir ».
« Accord historique » avec un contenu « solide et équilibré »,« première grande alliance nationale autour de propositions précises et opérationelles »…Nicolas Sarkozy évoque avec emphase l’étape qui vient d’être franchie. En attendant de transposer l’accord papier en un dispositif opérationnel.
Sachant que les deux principales parties intéressées ont fait des concessions majeures sur des points d’achoppement majeurs. Côté FAI, ils s’engagent à mettre en oeuvre des dispositifs de filtrage. Côté ayants droit, ils fourniront des efforts pour « mettre plus complètement et plus rapidement leurs oeuvres en ligne » et « supprimer tous les verrous techniques qui empêchent de copier et de transporter la musique ».
« On ne peut pas mettre tous les jeunes en prison »
Chassez le naturel et il revient au galop dès lors que l’on aborde le thème du piratage. « Si tout le monde vole la musique et le cinéma, on ne va pas légaliser le vol. Et en même temps, nous savons tous qu’on ne va pas non plus mettre tous les jeunes en prison. » Le Président de la République s’est également justifié sur le volet répressif.
L’approche graduée (mails d’avertissement jusqu’à la suspension temporaire de l’accès à Internet en cas de récidive) est justifiée. « Cette démarche pédagogique sera bien sûr réservée ‘aux pirates de bonne foi’ pour reprendre une expression propre à la politique fiscale », précise Nicolas Sarkozy.
En revanche, pas de répit pour les « pirates professionnels ». « Ceux qui font sciemment du trafic et du commerce illicite de DVD et de fichiers contrefaits, resteront soumis au droit commun de la contrefaçon et traités au sein de juridictions spécialisées. » Plutôt croustillante cette distinction entre ‘pirates de bonne foi’ et « pirates professionnels », non ?
*Dadvsi du nom de la loi Droits d’auteur et droits voisins dans la société de l’information parue au Journal Officiel du 3 août 2006.
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