Objets nazis : Yahoo obtient une décision
Dans l' »affaire Yahoo » qui oppose le site de vente sur Internet à des associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, le portail établi aux Etats-Unis vient d’obtenir de la justice américaine qu’elle examine son droit à contester la décision française. Ceci alors que les associations françaises étaient déboutées de leur action visant à faire appliquer la décision aux Etats-Unis. La Licra et l’UEJF vont faire appel.
L' »affaire Yahoo » n’en finit pas d’en finir. Et elle n’est pas finie ! Jeudi 7 juin, un juge américain a autorisé Yahoo à mener une action en justice concernant l’applicabilité de la décision française aux Etats-Unis tandis qu’il rejetait la requête des associations françaises. La Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’anti-sémitisme) et l’UEJF (Union des étudiants juifs de France) tentaient d’obtenir des autorités américaines l’application de la décision française. En novembre 2000, la société américaine avait été condamnée par un magistrat français, le juge Jean-Jacques Gomez, à empêcher les internautes français d’accéder au contenu nazi présent sur son site d’enchères américain (voir édition du 20 novembre 2000). Une telle décision pose la question de la « frontièrisation » d’Internet. Fin décembre, on apprenait que Yahoo saisissait la justice américaine pour chercher à démontrer que le jugement français ne pouvait s’appliquer aux Etats-Unis, en vertu du premier amendement de la constitution américaine qui garantit la liberté d’expression (voir édition du 22 décembre 2000). Finalement, début janvier, Yahoo indiquait qu’il interdirait la vente d’objets nazis sur son site, mais sans lier sa décision au jugement français (voir édition du 3 janvier 2001).
La semaine dernière, le tribunal a déclaré qu’il était compétent pour examiner la demande de Yahoo et a rejeté la demande des associations qui cherchaient à l’en empêcher. « Alors que d’engager un procès auprès d’une juridiction étrangère peut être tout à fait légitime sous les lois de cette juridiction, un tel acte peut se révéler tout à fait contraire à la loi du point de vue d’un tribunal des Etats-Unis si son but premier ou son effet voulu consistent à déposséder un citoyen américain de ses droits constitutionnels », a déclaré le tribunal, cité par Ecommerce Times, avant d’ajouter : « Ce tribunal est le forum le plus efficace et le mieux indiqué pour résoudre la difficulté légale précise de cette question. » La Licra et l’UEJF ont déclaré qu’elles allaient faire appel et demandent au juge de suspendre sa décision d’examiner la requête de Yahoo.
De nouvelles questions légales
Cette affaire soulève de nouvelles questions liées à Internet et au droit international. « Cette affaire comprend des questions légales nouvelles, découlant de la nature globale de l’Internet », a ainsi estimé le juge Jeremy Fogel du tribunal californien de San Jose, cité par l’AFP. « Beaucoup de pays, notamment la France, limitent la liberté d’expression sur Internet au nom de principes légaux, culturels ou politiques. Mais étant donnée la nature globale d’Internet, n’importe qui peut accéder à n’importe quel site public dans le monde et en théorie, n’importe quel fournisseur de contenu sur Internet peut être attaqué légalement », a-t-il ajouté.