Après un premier focus sur le business de PriceMinister – Rakuten en marge du campus e-commerce réalisé la semaine dernière par le groupe Internet à Paris, ITespresso.fr diffuse le deuxième volet de l’interview réalisée avec son co-fondateur Olivier Mathiot en charge du marketing et de la communication.
Celui-ci s’implique activement dans la Net-économie en France.
C’est aussi un investisseur individuel (business angel) qui a pris la parole au nom du mouvement des Pigeons (fronde d’entrepreneurs vis-à-vis de la politique fiscale du gouvernement).
Il revient sur la polémique Dailymotion – Montebourg, perçue comme un mauvais réflexe d’interventionnisme politique.
(Entretien réalisé le 16 mai 2013).
ITespresso.fr : L’hypothèse du rachat de Dailymotion par Yahoo a suscité des polémiques. A votre avis, pourquoi l’idée de ce deal a fait plus de bruit que la rapprochement PriceMinister – Rakuten en 2010 ?
Olivier Mathiot : On en parlait encore récemment dans un débat sur Arrêt sur Images avec Benjamin Bejbaum (co-fondateur de Dailymotion).
A l’époque du rapprochement entre PriceMinister et Rakuten en 2010, nous avions été également critiqués. On a oublié depuis. Certes, c’était moins spectaculaire en l’absence d’Arnaud Montebourg qui n’était pas au gouvernement à l’époque du rachat [rappelons qu’en juin 2010, c’était une majorité de droite, deuxième gouvernement de François Fillon, ndlr].
Ce n’était pas forcément la direction de PriceMinister qui était critiquée (un peu quand même) mais on entendait déjà cet air : « Encore une pépite française en or qui nous échappe, qui ne peut pas se transformer en boîte qui fait un milliard. »
En France, il y a d’autres exemples comme Free ou Vente-Privée.com qui ont réussi à grossir. Même si Vente-Privée.com n’a pas vraiment réussi à percer à l’international à ma connaissance.
Nous avons également Cdiscount [Groupe Casino] qui atteint le milliard d’euros en chiffre d’affaires. Mais le site marchand ne serait pas valorisé un milliard en Bourse car ses profits sont très bas. Il avait esquissé une internationalisation de leur activité au Royaume-Uni avec peu de moyens mais il s’est finalement retiré de ce marché.
A l’époque, PriceMinister avait parallèlement été contacté par des sociétés françaises et européennes en vue d’un rapprochement. Mais c’est Rakuten qui valorisait le plus nos activités et qui avait une longueur d’avance en termes de vision stratégique.
Les industriels français sont à ranger dans une catégorie « petits bras » et « petits joueurs ». Du coup, ils prennent vite du retard. On le voit avec Les 3 Suisses qui constitue un énorme échec malgré cette magnifique marque de la VPC.
Autre exemple dans la grande distribution sur Internet : Carrefour est loin derrière son homologue américain Walmart. C’est dommage : ces grands acteurs prennent du retard à l’allumage alors qu’ils disposent des plus fortes capacité d’investissement.
En raison d’une mauvaise éducation économique, on considère en France que l’arrivée d’un investisseur étranger signifie des délocalisations d’activité. Il ne faut pas percevoir cela comme un acte agressif systématique.
Rakuten a prouvé le contraire avec PriceMinister en développant les équipes et le business en France (voir en complément les propos sur Dailymotion de Pierre Kociusko-Morizet, un autre confondateur de PriceMinister, via Rue 89).
ITespresso.fr : Après les Assises de l’Entreprenariat et ses conclusions plutôt favorables aux créateurs d’entreprises, quelle suite peut-on donner au mouvement des Pigeons ?
Olivier Mathiot : J’ai participé aux Assises en tant que représentant des Pigeons dans le groupe dédié à la fiscalité. De son côté, Jean-David Chamboredon [président exécutif d’ISAI Capital et cofondateur des pigeons, ndlr] a écrit son ouvrage sur les Pigeons*.
L’idée des Pigeons ne s’attache pas uniquement sur le volet fiscal mais aussi sur le développement de la culture de la création d’entreprise associé à l’environnement fiscal, juridique et législatif.
Nous avons beaucoup travaillé avec l’association France Digitale dans ce sens. D’ailleurs, c’est Marie Ekeland, Présidente de France Digitale, qui a animé le groupe fiscalité des Assises. Je ne pense pas que les Pigeons soient appelés à se transformer en mouvement politique.
On va surtout suivre la mise en oeuvre des engagements de François Hollande et du gouvernement. Pour que les mesures annoncées à la conclusion des Assises soient bien appliquées. Et qu’elles permettent effectivement de favoriser la création d’entreprise.
ITespresso.fr : En tant que business angel, vous avez récemment investi dans des start-up comme TheTops, Augment ou 1001Pharmacies. Néanmoins, aviez-vous ralenti la cadence dans vos soutiens ?
Olivier Mathiot : Effectivement, j’avais ralenti le rythme. Après les Assises, on devrait entrer dans un contexte beaucoup plus favorable. Je suis moins alarmiste. Même si je trouve cela encore trop compliqué.
Je perçois encore des mauvais signes et des mauvais réflexes entretenus entre le rapport Lescure sur la culture à l’ère numérique qui préconise la taxation des smartphones et des tablettes ou l’intervention de Montebourg sur Dailymotion.
Il faut au contraire libérer les initiatives dans les nouvelles technologies.
* »Génération pigeons », co-écrit par Jean-David Chamboredon et Olivier Jay, sortie début mai 2013
A lire en complément : Interview Olivier Mathiot – PriceMinister Rakuten : « Logistique et m-commerce : deux axes forts » (17/05/13)
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