La vidéo sur mobile constitue le principal produit d’appel dans la stratégie 3G des opérateurs. En prenant position sur ce terrain dès 2003, WonderPhone a perçu le potentiel de développement. Cette société, installée à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), se positionne en intermédiaire entre les diffuseurs audiovisuels et les opérateurs télécoms pour développer cette activité. Mi-agrégateur, mi-producteur de contenus sur mobiles (vidéo et jeux), elle collabore avec 70 opérateurs dans 40 pays (Master Distributor chez Telefonica, T-Mobile, Vodafone, Orange…). Son chiffre d’affaires s’élève désormais à 15 millions d’euros. Lors du lancement de la 3G en France au dernier trimestre 2004, WonderPhone s’était associée à SFR pour lancer son premier portail 3G (voir édition du 4 novembre 2004). Petit retour d’expérience avec Philip Plaisance, PDG de WonderPhone.
Vnunet.fr : Il y a un an, les premières offres commerciales 3G apparaissaient. Comment les Français ont-ils adopté la vidéo sur mobile ?
Philip Plaisance: Le résultat est plutôt satisfaisant puisque la France est le troisième pays qui consomme le plus de vidéo sur mobile dans le monde derrière le Japon et la Corée du Sud. L’Italie est bien placée également mais la consommation de vidéos sur mobile y est moindre. En France, un quart des utilisateurs 3G consomment en moyenne 25 minutes par mois. Je pense que les opérateurs n’ont jamais vu un usage se développer aussi vite sur leur portail mobile. Que ce soient Orange ou Vodafone, tous assurent que la France est un marché très en pointe. Si vous observez les portails de T-Mobile en Allemagne et de Vodafone en Grande-Bretagne, vous constatez que les portails français sont beaucoup plus riches en termes de contenus vidéo. C’est cette richesse qui a fait de WonderPhone le premier agrégateur de programmes mobiles en Europe.
Dans la vidéo sur mobile, quel est l’usage le plus populaire entre la télévision « live » de la vidéo à la demande ?
Dans un premier temps, c’est la télévision « live » qui marche le mieux auprès des clients. C’est la manifestation marketing la plus évidente de l’existence de la télévision sur mobile. Si vous souhaitez effectuer une démonstration des services télé sur votre mobile à votre entourage, vous avez comme réflexe de prendre une chaîne connue. C’est l’élément le plus parlant. Après l’acte d’achat d’un mobile 3G, le premier service testé est souvent la télévision sur mobile. Ce qui est intéressant à remarquer, c’est que les durées d’usage sont assez courtes, ce qui conduit dans un deuxième temps les abonnés à se tourner vers des sessions choisies, à la demande, mieux appropriées à un usage mobile.
Orange lance des forfaits proposant une consommation illimitée de la télévision sur mobile le week-end. Dans quelle mesure les opérateurs vont-ils développer cette approche illimitée ?
Pour des raisons de concurrence, les opérateurs vont probablement généraliser cette formule. Mais les offres ne seront pas linéaires car tous les contenus audiovisuels n’ont pas vocation à être facturés. Il existera un mélange entre une consommation illimitée forfaitaire et des facturations à l’acte. Dans l’univers du mobile, nous sommes davantage dans la juxtaposition de niches en fonction des pôles d’intérêts des consommateurs. L’approche est communautaire : le contenu audiovisuel n’est plus mis en avant pour faire du volume et créer des audiences de masse pour attirer les annonceurs. Les détenteurs de terminaux 3G tendent davantage vers une consommation de type vidéo à la demande : je cherche le contenu que je veux pour le consommer quand je veux.
Pour quels types de contenus audiovisuels sur mobile les consommateurs seraient-ils prêts à payer ?
C’est une des principales questions qui restent en suspens. Dans la télévision, il existe seulement trois catégories de contenus payants : le cinéma premium (qui n’est pas présent sous cette forme dans l’univers du mobile) ; le sport leader dans chaque pays, à regarder en direct (en France, on pense naturellement à la Ligue 1 de football) mais le support mobile n’est pas vraiment adapté ; enfin, le contenu sexy mais je ne suis pas convaincu du confort pour la consommation sur un support mobile. L’écran est peut-être un peu petit, ne trouvez-vous pas ? Et puis le fait d’être « porté » par des opérateurs sur leur portail interdira, pour des raisons de responsabilité citoyenne, une dérive de ce genre de programmes.
Pourquoi avez-vous demandé une licence spécifique auprès du Conseil supérieur de l’audiovisuel pour tester la télévision sur mobile ?
Les expérimentations menées par les opérateurs et les groupes audiovisuels sont bâties sur du broadcast avec l’idée de faire du mobile un téléviseur nomade. Les bandes de fréquences et de spectres sont une matière rare à optimiser. Actuellement, les fréquences sont monopolisées par la diffusion de chaînes « live ». Je trouve que l’on n’utilise pas assez les capacités de mémoire et de stockage des mobiles. Notre technologie « Push To Store » permet d’optimiser l’utilisation du spectre et de « pousser » plusieurs centaines de programmes audiovisuels au fur et à mesure des nouveautés, en remplaçant simplement les précédents. De plus, nous avons une voie de retour qui peut être utile pour des services comme des blogs. Nous n’avons pas encore obtenu de réponses formelles de la part du CSA concernant notre demande.
Dans le domaine des jeux vidéo sur mobile, Electronic Arts vient de racheter Jamdat, un spécialiste du contenu sur mobile. Les éditeurs de jeux vidéo seront-ils les grands gagnants ?
Ils seront dominants. Environ 7 000 jeux sur mobiles sont développés par an. Un opérateur mobile ne peut en placer qu’une cinquantaine sur son portail. Naturellement, les titres phares du type King Kong n’auront aucun souci pour se faire référencer sur les services mobiles. A ce niveau, les plus grands éditeurs ont raflé le marché. Nous continuons à travailler avec les licences de Vivendi Universal Games mais un petit éditeur comme nous a plus de raison d’être sur le volet de la distribution. WonderPhone vient de lancer Manta, un mégastore de jeux sur mobile. Nous travaillons avec une centaine de producteurs de jeux : les plus gros y trouveront un nouveau lieu pour commercialiser leurs jeux, les autres une occasion de distribuer mondialement leurs créations.
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