P2P : les producteurs de disques veulent durcir les accords Olivennes
Le Syndicat du disque préconise une modification de la loi Informatique et Libertés pour automatiser la chasse aux pirates.
Alors que la loi pour mettre en oeuvre les accords de la mission Olivennes de lutte contre le téléchargement illégal sur Internet est en route, le Snep (Syndicat national des éditeurs de phonogrammes) a fait part de ses préconisations pour leur application à l’occasion du Midem (Marché international de l’édition musicale à Cannes).
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les producteurs de disques n’y vont pas avec le dos de la cuillère. Ils considèrent avant tout que « la lutte contre la piraterie en ligne […] constitue un préalable indispensable au développement des offres légales sur Internet« , souligne le syndicat dans son communiqué avant de rappeler que les mécanismes de répression adoptés dans le cadre des accords signé le 23 novembre 2007 à l’Élysée visent à instaurer un système de riposte graduée : une première alerte à l’intention des partageurs en ligne, suivie d’une suspension temporaire d’abonnement Internet puis d’une résiliation définitive en cas de récidive avérée. Le tout sous le contrôle d’une Autorité administrative indépendante.
Le Snep veut aller plus loin, et plus vite. En effet, le syndicat du disque préconise d’attribuer à la future Autorité « la capacité de procéder à un traitement automatisé de données à caractère indirectement personnel« . C’est-à-dire les adresses IP qui permettent d’identifier les abonnés d’un accès Internet. Traitement automatisé qui serait effectué par les fournisseurs d’accès à la demande l’Autorité elle-même soumise à l’influence des ayants droits qui assureraient le prélèvement des adresses IP à lui transmettre. Ce qui entraînerait la « modification, le cas échéant, de la loi informatique et libertés« , de l’aveu même du Snep.
Sanctionner les FAI qui ne sanctionnent pas
Parmi les préconisations à adopter, le syndicat veut également faire inscrire comme sanction « la suspension et la résiliation du contrat dans le cadre des relations entre les fournisseurs d’accès et les abonnés« . Et, au besoin, appliquer des sanctions contres les FAI récalcitrants à engager les manoeuvres dissuasives, ce qui reviendrait tout simplement à les obliger à réduire leur clientèle. Impensable.
Pour le moment, rien de tout cela ne transparaît clairement dans le projet de loi annoncé à Cannes par la ministre de la Culture Christine Albanel. Mais l’industrie musicale veut profiter de l’engouement gouvernemental contre le piratage pour tenter de relancer une industrie aux aboies. Le chiffre d’affaires des ventes de disques en France en 2007 est, pour la sixième année consécutive, une nouvelle fois en baisse.
Avec 1,16 milliard d’euros, le chiffre d’affaires des ventes au détail baisse de 11,8 %. Le marché de gros ne se porte guère mieux avec une chute de 17,4 % pour un résultat de 713 millions d’euros. Si les ventes numériques (Internet et téléphone) de gros progressent de 16,6 % et génèrent 50,8 millions d’euros, elles sont encore loin de compenser les 19,2 % de chute des ventes physiques, ni d’égaler son chiffre d’affaires (662 millions d’euros).
La France inférieure à la moyenne mondiale
Le Snep souligne d’ailleurs que la part de marché des ventes numériques (7 %) et son taux de progression (16,6 %) restent bien en deçà de la moyenne mondiale respectivement à 15 % et 40 %, selon le rapport de l’Ifpi (Fédération internationale de l’industrie musicale).
Cependant, le marché montre des signes positifs. « Le nombre de titres téléchargés (Internet et mobile) est désormais supérieur au nombre de singles vendus en magasins : 36,3 millions contre 19,5 millions« , analyse le Snep. Et « les téléchargements de titres et albums (Internet et mobile) progressent de 30 % en volume« .
A noter pourtant que l’évolution des ventes numérique semble marquer une pause : +7,3 % en 2007 contre 13 % en 2006 et 21 % en 2005. Mais la part du numérique progresse dans le chiffre d’affaires des éditeurs : 7 % en 2007 contre 6 % en 2006, 3% en 2005 et 1% en 2004. Un embellissement que le Snep veut accélérer par l’adoption des mesures Olivennes… si tant est qu’elles apportent la réponse adéquate à l’épineux problème de l’usage des nouvelles technologies en réseau face à la consommation des biens culturels immatériels.