Auditionné ce mercredi 2 mars par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, Pascal Terrasse , député de l’Ardèche pour le groupe Socialiste, républicain et citoyen, a réaffirmé les priorités définies dans son rapport sur l’économie collaborative remis le mois dernier au Premier ministre.
Fruit de 75 auditions de parties prenantes (acteurs du numérique, administrations, organisations patronales et syndicales) et de 250 contributions citoyennes, le rapport en question alimentera deux textes législatifs. D’une part, le projet de loi de la ministre du Travail Myriam El Khomri. De l’autre, celui du ministre des Finances Michel Sapin.
Avec 276 plates-formes estimées, dont 70 % françaises, l’économie collaborative pèse environ 3,5 milliards d’euros dans l’Hexagone – et potentiellement trois fois plus à l’horizon 2018. Elle n’est pas, pour Pascal Terrasse, synonyme d’ubérisation : elle « peut être sociale, inclure les communs » et ne devrait pas exclure les acteurs de l’économie traditionnelle.
Tout en évoquant la montée en puissance de la blockchain, le député en appelle à une clarification des obligations fiscales et sociales de chacun : les particuliers, les professionnels et les plates-formes. Dans ce domaine, la France et l’Europe sont en retard face aux États-Unis et à la Chine. Elles ont donc tout intérêt à « valoriser les réussites » et à « adapter modèles et compétences », comme l’a souligné Corinne Ehrel, députée socialiste des Côtés-d’Armor.
Pour Laure de La Raudière, députée Les Républicains d’Eure-et-Loir, « nous devrions passer d’une logique de contrôle a priori, très franco-française, à une approche a posteriori, autrement dit une logique de conquête adaptée à l’ère numérique ». Pascal Terrasse le propose dans son rapport et le point de vue est partagé par Franck Reynier. Le député Union des démocrates et indépendants de la Drôme explique : « La régulation, oui, mais avec la souplesse suffisante pour que nos talents […] aient les moyens de développer leur activité ici et d’exporter ».
Autre idée qui semble faire l’unanimité : la promotion de « territoires collaboratifs expérimentaux » qui pourraient, dans le cadre d’appels à projets, mener localement des expérimentations innovantes (formation, émergence de nouvelles plates-formes, coworking…) Est aussi recommandée, l’ouverture d’un Observatoire de l’économie collaborative qui se pencherait sur les volets réglementaires et législatifs du marché, dans une logique de coopération au niveau européen.
Difficile d’éclipser la question des emplois. L’économie numérique et collaborative en crée, parfois occasionnels et précaires. Surtout, elle en détruit aussi, notamment dans les fonctions intermédiaires.
Pour remédier à l’inadéquation entre l’offre et la demande de compétences qualifiées, des formations adaptées et des reconversions sont nécessaires. Le rapport propose de renforcer la convergence des régimes de protection sociale des salariés et des travailleurs indépendants (mobiliser le compte personnel d’activité pour instaurer la portabilité des droits, mobiliser la validation des acquis de l’expérience, faciliter l’accès au crédit, etc.).
Il n’est, en revanche, pas question d’un troisième statut. Pascal Terrasse souhaite plutôt que le débat soit ouvert sur le revenu universel de base, comme l’a indiqué le Conseil national du numérique dans son rapport sur « les nouvelles trajectoires » remis début janvier à la ministre du Travail.
À l’instar d’autres rapporteurs en Europe et au sein de l’OCDE, le député est favorable à l’instauration d’un régime reliant la base d’imposition à l’endroit où les multinationales génèrent leurs profits.
S’il n’a pas retenu l’idée d’une franchise générale de 5 000 euros par an pour taxer les revenus de l’économie collaborative, il s’est dit favorable à l’automatisation de la procédure fiscale.
Il s’agit, comme le note Silicon.fr, d’engager les plates-formes à transmettre à l’administration fiscale le montant des revenus dégagés par leurs utilisateurs « en vue de fiabiliser les déclarations des contribuables ». Mais les plates-formes ne sont pas les employeurs des internautes qu’elles mettent en relation. Elles pourraient donc s’opposer vivement à une telle mesure.
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