L’arrivée de la télévision sur la ligne téléphonique (voir édition du 18 décembre 2003) n’arrange vraiment pas les câblo-opérateurs qui n’avaient pas besoin de cette concurrence soudaine et médiatisée pour affronter leurs difficultés. L’Association française des opérateurs de réseaux multiservices (Aform), qui représente, à travers ses membres, 93 % des clients du câble, vient d’envoyer un courrier au Premier ministre pour l’alerter sur leur situation. L’association regrette notamment l’abandon de la transposition en droit français de la directive européenne sur les communications électroniques par ordonnances.
La Commission européenne a engagé une procédure d’infraction contre la France (et sept autres Etats) qui devait transposer la directive avant le 25 juillet 2003. Pour l’heure, Bruxelles se contente d’envoyer des « avis motivés », sorte de rappel à l’ordre des directives à mettre en oeuvre. Mercredi dernier (le 17 décembre 2003), la France a reçu son deuxième « avis motivés ». Elle a deux mois pour répondre. Après, la Commission saisira la Cour de justice européenne. Face au retard pris par la France pour transposer cette directive dite « paquet télécom », le Premier ministre avait proposé d’avoir recours aux ordonnances pour se mettre à jour face à Bruxelles.
3 000 emplois en jeu
Mais le sujet est semble-t-il trop sensible pour être réglé par ordonnance. Les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat ont rejeté l’idée. Le texte devra donc être débattu et voté. Il devrait faire l’objet d’une première lecture par les députés avant fin janvier 2004 (le 30 janvier a priori). Une procédure trop longue pour l’Aform qui craint « que l’encombrement législatif ne repousse l’adoption définitive de la transposition de plusieurs mois et même plus ». Outre les amendes que l’Europe risque d’infliger à la France, l’absence de cadre réglementaire tend à profiter à la télévision sur ADSL au détriment du câble. « Compte tenu de la rapidité avec laquelle se perdent ou se gagnent les positions sur les marchés, il est évident qu’une telle perspective est dramatique pour notre industrie », lit-on dans la lettre de l’Aform qui met en avant les 3 000 emplois direct générés par le câble et les 150 à 180 millions d’euros annuels reversés à l’industrie audiovisuelle.
Rappelons que la directive « paquet télécom » doit notamment accorder au CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel) un droit de regard sur les contenus audiovisuels qui circulent dans la paire de cuivre du téléphone tandis que l’Autorité de régulation des télécoms (ART) devrait disposer d’un plus grand contrôle sur les opérateurs Internet qui distribuent la télévision en ligne. Mais surtout, la future loi devrait faire sauter la limite des 8 millions d’abonnés par câblo-opérateur jusqu’alors imposée et permettre le regroupement de plusieurs acteurs, ce qui optimiserait les coûts de structure. Dans ces conditions, on comprend l’empressement de l’Aform à voir la directive adoptée, quelle que soit le moyen de cette adoption. Mais il semble de plus en plus certain que l’industrie du câble va devoir patienter, c’est à dire résister face à cette nouvelle concurrence.
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