Haro sur la piraterie vidéo par Internet en France.
Par décision de justice, des sites Internet de diffusion gratuite de films seront bloqués par les FAI et déréférencés par certains moteurs de recherche (Google principalement).
Une belle brochette d’organisations professionnelles des secteurs du cinéma et de la vidéo* avait saisi le tribunal de grande instance de Paris pour mettre un terme aux activités présumées parasites de portails de streaming vidéo et plus globalement de diffusion de vidéos.
Sur les bancs des accusés, on trouve Allostreaming.com (fermé entretemps), AlloshowTV.com, Alloshare.com, Allomovies.com mais aussi Fifostream et Dpstream (16 sites en tout avec des exploitations en miroir sous différents noms de domaine).
Les ayants droits ont obtenu gain de cause sur fond d’accélération de procédure (la plainte remonte à fin 2011 pour finalement être examiné en référé ce jeudi 28 novembre).
Le TGI de Paris a considéré que les services Internet pointés du doigt « proposaient une offre massive et illégale en streaming de contrefaçon numérique d’oeuvres françaises et étrangères en version française. »
Par conséquent, cette piraterie doit cesser dans les plus brefs délais.
Selon l’AFP, les principaux fournisseurs d’accès Internet français (Orange, Bouygues Telecom, Numéricable, Free, SFR et Darty Telecom) doivent « mettre en oeuvre et/ou faire mettre en oeuvre (…) toutes mesures propres à empêcher, à partir du territoire français (…) l’accès par tout moyen efficace et notamment par le blocage » des sites alternatifs concernés.
Pour les moteurs comme Google, Microsoft, Yahoo et Orange, il conviendra de « prendre ou faire prendre toute mesure utile en vue d’empêcher sur leurs services l’apparition de toute réponse et tout résultat renvoyant vers l’une des pages » de ces sites.
Les parties concernées ont 15 jours pour faire appliquer le jugement. Et ce, pendant une durée de 12 mois.
Mais les opérateurs télécoms et les moteurs de recherche pourraient se tourner vers les organisations professionnelles des secteurs du cinéma et de la vidéo à l’origine de l’assaut judiciaire anti-piratage pour solliciter les paiements des frais associés à ces mesures de restriction.
Après l’annonce de la décision du TGI, les associations de défenses des intérêts des ayants droit ont exprimé leur satisfaction (sachant qu’il existe des recours pour les sociétés défenderesses).
« Il s’agit d’une première mondiale s’agissant du déréférencement de sites pirates par les moteurs de recherche et d’une étape capitale vers le respect du droit sur Internet. »
La Quadrature du Net exprime son point de vue divergent sur ce dossier et appelle à « une véritable réforme du droit d’auteur ».
« En dehors du blocage, il existe d’autres façons de s’attaquer aux intermédiaires qui tirent profit de la distribution d’œuvres. Surtout, il faut reconnaître une fois pour toutes la légitimité et l’utilité du partage de la culture entre individus, hors-marché, dont la répression a conduit à l’explosion des sites de streaming« , commente Jérémie Zimmermann, cofondateur et porte-parole de l’association qui a vocation à défendre les libertés civiles sur le Net, cité dans le communiqué.
On pourrait rapprocher rapprocher cette affaire parisienne d’un avis de l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne dans un autre dossier d’infraction copyright qui a été rendu public en début de semaine.
En Autriche, des ayants droit avaient exigé que le câblo-opérateur UPC Telekabel Wien (propriété du groupe américain Liberty Media) bloque l’accès au portail Kino.to (là encore, c’est du streaming vidéo).
Dans ses conclusions, l’avocat général de la CJUE estimait que la justice est en droit d’ordonner à un FAI de bloquer l’accès à un site Internet diffusant illégalement des oeuvres culturelles.
Mais, là encore, il faut nuancer : « Le fait d’ordonner à un fournisseur d’accès de prendre une mesure de blocage concrète à l’encontre d’un site Internet déterminé n’est pas, en principe, disproportionné du simple fait que cette mesure requiert des moyens non négligeables, mais peut facilement être contournée sans connaissances techniques spécifiques. Il incombe aux juridictions nationales de mettre en balance, dans le cas concret et en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes de l’espèce, les différents droits fondamentaux des parties concernées et de garantir un juste équilibre entre ces droits fondamentaux« , peut-on lire dans le communiqué de presse de la CJUE qui sert d’explication de texte de la décision de justice européenne.
* Association des producteurs de cinéma (APF), Fédération nationale des distributeurs de films (FNDF), Syndicat des éditeurs de vidéo numérique (SEVN), Union des producteurs de films (UPF) et Syndicat des producteurs indépendants (SPI).
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