Quand bien même elle « partage pleinement » les objectifs de renforcement de la filière de cybersécurité française affichés par les pouvoirs publics, l’Afdel émet de sérieuses réserves quant aux dispositions récemment adoptées par le comité de pilotage de la « Nouvelle France industrielle ».
Celui-ci a validé, le 5 juin, la feuille de route établie par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) dans le cadre du plan Cybersécurité annoncé en septembre 2013 par Bercy. Les dix-sept mesures adoptées répondent à quatre priorités : développer le marché français de la cybersécurité de 20% par an, renforcer l’offre de produits et services dans de domaines encore peu couverts, augmenter de 30% la part des industriels nationaux à l’export et consolider le secteur.
Après examen du texte, les acteurs du software déplorent un plan « pas à la hauteur des enjeux [car] stato-centré« , en d’autres termes orienté sur la Défense nationale et le marché français. « La feuille de route validée par le gouvernement vise davantage à placer cette filière à l’abri des forces du marché qu’à lui permettre d’utiliser ces forces au service d’intérêts nationaux propres« , explique Thierry Rouquet.
Interrogé par Silicon.fr, le président de la commission cybersécurité de l’Afdel ajoute que la France peine à mettre en oeuvre un projet industriel de la cybersécurité « au-delà du secteur de la Défense ». Jusqu’à présent, « le soutien des pouvoirs publics aux entreprises [de la filière] reste ambivalent et entraîne des conséquences en demi-teinte sur leur dynamique de croissance« .
Dans le livre blanc publié pour l’occasion, l’Afdel évoque une fragmentation du secteur et souligne le manque d’attractivité des PME du logiciel de cybersécurité, qui « sont centrées sur le marché domestique et n’atteignent jamais la taille critique« . Alors qu’à l’échelle mondiale, « le secteur reste dominé par les écosystèmes américain et israélien, où les start-up de la cybersécurité foisonnent aux côtés de grandes entreprises« .
Pour le groupement d’éditeurs, la création du fonds d’investissement « cyber » ne devra pas se limiter à des ressources semi-publiques et se focaliser sur la nationalité des entreprises concernées. Ce qui prime pour les éditeurs de logiciels, c’est le développement d’un écosystème ayant la France pour « centre de gravité ». « Les pouvoirs publics sous-estiment encore les dividendes politiques et stratégiques qui découleraient de la mise en oeuvre d’une stratégie […] fondée sur une croissance rapide des sociétés de cybersécurité permettant la constitution d’un écosystème dynamique« , commente Thierry Rouquet.
L’Afdel estime que la politique de contrôle des investissements peut être préjudiciable à la filière. L’arrivée d’investisseurs privés s’accompagnerait inévitablement du rachat de sociétés par des acteurs étrangers, mais elle « accélérerait aussi le développement permanent d’un savoir-faire technique et entrepreneurial« . Jusqu’à permettre l’émergence d’acteurs nationaux capables, à leur tour, de consolider des acteurs étrangers.
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