Pokémon Go en France : des voix s’élèvent dans la frénésie
Le ministère de la Santé, la gendarmerie nationale, l’UFC-Que choisir… À chacun sa perception du phénomène Pokémon Go, entre opportunisme et vigilance.
La gendarmerie et la police nationales, la ministre de la Santé Marisol Touraine, l’association de défense des consommateurs UFC-Que choisir… Les appels à la vigilance se sont multipliés ces derniers jours à l’adresse des joueurs de Pokémon Go.
Lancé officiellement en France ce dimanche 24 juillet 2016, le jeu développé par Niantic Labs sous licence Nintendo n’a pas tardé à trouver son public. Les énormes rassemblements constatés au jardin public de Bordeaux, au parc Borély de Marseille ou sur le Champ-de-Mars à Paris ont suffi à illustrer la viralité du phénomène.
Certains s’en sont amusés, à l’image du FC Grenoble Rugby, dont le stade Lesdiguières a enregistré une « fréquentation inhabituelle » en période de vacances estivales.
Voulez-vous capturer avec moi ?
D’autres ont sauté sur l’occasion pour faire passer un message… souvent à teneur commerciale, mais pas que. Ainsi le Fonds mondial pour la nature (WWF) s’est-il approprié la frénésie Pokémon Go pour promouvoir la cause animale, notamment en remplaçant la phrase « Attrapez-les tous » par « Sauvez-les tous » et en l’associant à des photographies d’espèces menacées.
Chez Bouygues Telecom, on est allé jusqu’à épingler un tweet à l’attention des dresseurs, qui peuvent tenter de « gagner le pack ultime pour partir à la chasse », avec une casquette, une batterie externe et une carte SIM B&You 40 Go.
Boulanger a lui aussi lancé une « opération retweet » avec, à la clé, 10 guides Pokéball, qui doivent faciliter la capture des Pokémon.
Dans la même veine, Auchan a lancé un concours photo pour attirer des clients dans ses drives.
Monoprix a également suivi la tendance en offrant à ceux qui se présentaient dans certains magasins des « kits du dresseur » comprenant crème solaire, boisson et barre de céréales.
Chers Pokémons
Les initiatives des uns et des autres sont à la hauteur du rush Pokémon Go, illustré par cette vidéo que le Huffington Post décortique en évoquant « une ruée digne d’un premier jour de soldes ».
Les réserves de l’UFC-Que choisir sont d’autant plus grandes.
L’association de défense des consommateurs reconnaît le caractère « innovant » d’une application qui « mêle astucieusement jeu vidéo et réalité virtuelle », mais qui est aussi « très [curieuse] en matière de données personnelles, potentiellement [coûteuse] et même parfois [dangereuse] ».
Sur le dernier point, il est question d’accidents provoqués par des joueurs « captivés » qui manquent d’attention et s’engagent parfois dans des zones à risques. Cela en deviendrait même un problème de sécurité routière, selon les forces de l’ordre, qui ont invité les conducteurs à la prudence.
Sur le volet financier, l’UFC-Que choisir signale que si le jeu est gratuit, il est possible d’acheter, pour progresser plus vite, des options… pas forcément données, à l’image des Poképièces (99 cents les 100 ; 4,99 euros les 550 ; 9,99 euros les 1 200 ; 99,99 euros les 14 500).
Il s’agit surtout d’appeler à la prudence ceux qui ont configuré des achats partagés sur leur appareil. On peut effectivement penser aux nombreux cas d’achats abusifs réalisés par des enfants, comme cette petite fille qui avait dépensé, aux États-Unis, 2 600 dollars via l’application Tap Pet Hotel (construction d’un hôtel pour animaux de compagnie).
À la lumière de ces affaires qui ont coûté plus de 100 millions de dollars à Apple pour défaut d’information des utilisateurs, la Commission européenne a imposé aux éditeurs et exploitants de places de marché d’applications davantage de transparence. Il leur appartient notamment de s’assurer que les contenus présentés comme « gratuits » n’induisent pas en erreur quant aux coûts réels impliqués.
Concernant les données personnelles, l’UFC-Que choisir pointe du doigt l’ampleur des collectes. Niantic et Nintendo accèdent aussi bien aux noms, prénoms, numéros de téléphone et adresses e-mail des utilisateurs qu’à leur âge, leur sexe, leur pays de résidence, leurs centres d’intérêts et leurs jeux préférés.
Il est précisé, dans les conditions générales d’utilisation de Pokémon Go, que « des publicités et certains contenus pourraient s’afficher en fonction de ces données ». Nintendo se réserve aussi le droit de réutiliser toute image qu’on partagerait sur les réseaux sociaux depuis l’application.
Crédit photo : Niantic Labs