La Russie a-t-elle favorisé l’élection de Donald Trump ?
L’administration Obama en est persuadée. Pour soutenir cette position auprès de l’opinion publique, elle vient de déclassifier un rapport établi par le FBI, la NSA et la CIA sur la base d’informations recueillies jusqu’au 29 décembre 2016.
Le document (PDF, 25 pages) accable ouvertement Vladimir Poutine. James R. Clapper, directeur du renseignement national des États-Unis, en avait donné un aperçu la semaine passée. Il avait évoqué un programme « aux multiples facettes » destiné à influencer l’issue du vote des Américains.
D’après les trois agences auteures du rapport, ce n’est pas – et de loin – la première fois que Moscou tente de « perturber l’équilibre démocratique » aux USA. Elles en veulent pour exemple les connexions établies, dans les années 70, entre le KGB et un activiste démocrate qui a fourni des informations sur Jimmy Carter, futur président.
La « campagne 2016 » aura toutefois mobilisé des moyens sans précédent sur un périmètre inédit. Elle a, en l’occurrence, inscrit les cyber-attaques dans une stratégie plus globale impliquant les médias, ainsi que les réseaux sociaux*, exploités à des fins de « propagande ».
Le FBI et la CIA se disent « hautement confiants » envers l’ambition du Kremlin de discréditer Hillary Clinton, tout en « [érodant] la confiance à l’égard des institutions démocratiques ».
La NSA ne se déclare que « modérément confiante », mais elle s’aligne sur ses homologues concernant la préférence affichée de l’administration Poutine pour Donald Trump.
À mesure que le scrutin approchait, les médias proches du pouvoir, telle l’agence de presse Sputnik, se sont montrés, dans leurs éditions ciblant le public anglophone, de plus en plus conciliantes vis-à-vis du candidat républicain. À l’inverse, Clinton aurait été présentée comme corrompue et liée aux mouvances islamistes, sa santé physique et mentale étant par ailleurs mise en doute.
Le rapport fait aussi état d’une « collaboration active » entre le média RT (ex-Russia Today) et WikiLeaks. Mais aussi de l’utilisation, à partir de juin 2016 par le renseignement militaire russe, de la plate-forme DCLeaks.com pour publier des données volées à des cibles d’intérêt aux États-Unis. Des victimes associées en grande majorité au clan démocrate.
Pour les services du renseignement américain, la Russie se nourrira de cette expérience « couronnée de succès » afin de s’attaquer à des alliés des États-Unis. « Il y a déjà eu des tentatives en Europe », peut-on lire dans le rapport.
Dès le lendemain de l’élection, le renseignement russe aurait lancé une campagne de hameçonnage visant des employés du gouvernement, de think tanks et d’ONG impliqués dans la sécurité nationale, la défense et les relations internationales. Autant de personnes susceptibles d’influer sur la future ligne politique du pays.
Comment la NSA, le FBI et la CIA ont-ils déterminé que les « cyberactivités » recensées dans la course à la présidentielle étaient bien l’œuvre de la Russie ? Pas un mot sur les « sources et méthodes sensibles » exploitées dans ce cadre : elles « ne peuvent être publiées ». Quant aux annexes, elles se concentrent sur le comportement des médias et plus particulièrement de RT.
Du côté de Donald Trump, le discours s’est adouci, sans toutefois s’infléchir, le président élu reconnaissant que « la Russie, la Chine et d’autres États […] piratent les USA », mais affirmant qu’il n’y avait eu « absolument aucun effet sur l’issue de l’élection ».
* Le hashtag #DemocracyRIP était prêt en cas de victoire de Clinton.
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