Nous connaissons bien les chatbots, ces agents conversationnels robotisés qui ont inondé Facebook Messenger et prennent désormais d’assaut les services supports des entreprises. Ce que nous connaissons moins, ce sont les « métabots ». Qu’entendons-nous derrière ce terme abscons ? Décryptage d’une technologie émergente.
Un constat simple : un manque d’interopérabilité
Depuis trois ans, les chatbots se sont démocratisés. Objets de curiosité en 2016, ils font désormais partie du paysage numérique français, les internautes s’étant habitués à discuter avec ces « dialogueurs » virtuels. Au sein des entreprises, les chatbots ont également su se faire une place de choix. Il n’est plus rare qu’une même société ait déjà lancé deux, trois, quatre projets de chatbots sur des périmètres différents.
Par exemple, un acteur du secteur aéronautique peut avoir besoin :
-D’un chatbot helpdesk pour décharger le service support et répondre aux questions des collaborateurs ;
-D’un chatbot de formation pour les nouveaux collaborateurs ;
-D’un chatbot RH (Ressources Humaines) pour renseigner les collaborateurs sur leurs congés ;
-D’un chatbot d’orientation pour répondre aux questions liées à la sécurité et à la RGPD.
Ces quatre besoins sont quatre cas d’usages distincts : l’objectif et les fonctionnalités du chatbot sont complètement différents. Ainsi, il semble logique de créer un chatbot par sous-périmètre, afin qu’il soit conçu et optimisé pour cet usage spécifique.
Or, parmi le riche microcosme des chatbots, chaque éditeur de solution conversationnelle a sa propre spécialité. Chatbot transactionnel, chatbot d’orientation, chatbot helpdesk, chatbot de recommandation. Les usages sont aussi nombreux que les éditeurs. Avec l’expérience, chaque société experte a développé une technologie propriétaire pensée et optimisée pour un usage particulier. De fait, pouvoir installer plusieurs chatbots issus de plusieurs offreurs de solutions différents serait une perspective idéale pour la majorité des grands comptes pour pouvoir proposer le meilleur service en fonction du besoin.
Néanmoins, dans l’exemple précédemment cité, les quatre chatbots s’adressent à la même cible : les collaborateurs de l’entreprise. Actuellement, nous constatons qu’il est pénible pour le salarié de devoir jongler entre les différents chatbots de son entreprise afin de déterminer quel serait l’interlocuteur adapté. Il serait donc plus simple, logique et ergonomique que ces quatre chatbots soient regroupés au sein d’une même interface, afin de faciliter l’expérience utilisateur.
C’est là que le bât blesse. Du fait de la diversité et de la complexité des technologies utilisées par chaque acteur, il est aujourd’hui souvent impossible d’orchestrer ces différentes solutions au sein d’une même interface. Les technologies propriétaires sont difficilement compatibles et les clients souffrent de ce manque d’interopérabilité entre les chatbots déjà implémentés.
Le métabot, un chatbot au-dessus des chatbots
Le métabot arrive alors comme une technologie émergente capable d’orchestrer plusieurs chatbots au sein d’une même interface. Concrètement, le métabot agit comme un centre de tri : il reçoit le courrier (les requêtes utilisateurs) et les redirige vers le service approprié (le bon chatbot) afin de pouvoir renvoyer la réponse adéquate. Il simplifie l’expérience utilisateur en proposant une interface unique, à l’intérieur de laquelle sera traitée l’ensemble des demandes, aussi disparates soient elles. Au métabot ensuite de coordonner les différents chatbots pour les solliciter au bon moment, à la manière d’un bon chef d’orchestre.
Actuellement, il existe deux manières de concevoir le fonctionnement d’un métabot :
-Le métabot reçoit une requête, puis il interroge tous les chatbots qui lui remontent – ou non – une réponse associée à un score de pertinence. Le métabot renvoie alors la meilleure des réponses reçues.
-Le métabot reçoit une requête, l’analyse grâce à des méthodes de traitement automatique du langage (Natural Langage Processing en anglais), puis choisit de lui-même à quel chatbot il va la transférer en fonction des spécificités de chacun. Cette méthode ne peut fonctionner que si les périmètres de chaque chatbot sont bien délimités et exclusifs.
Dans les deux cas, pour qu’un métabot fonctionne efficacement, il convient de normaliser entre chaque chatbot la manière de gérer les entrées (les requêtes utilisateurs) et les sorties (les réponses apportées par le chatbot). Cela nécessite un travail préalable pour trouver un terrain d’entente et définir des normes entre les différents éditeurs de solution.
C’est la mission qui est actuellement menée par un regroupement d’éditeurs, l’Alliance for Open Chatbot. Cette association entend définir un standard ouvert et une solution collaborative et open source permettant d’interconnecter les chatbots via un métabot.
Les métabots vont apporter deux améliorations majeures aux solutions conversationnelles existantes. Du point de vue de l’expérience utilisateur, les métabots offrent une promesse d’unification des points d’entrée : ils n’auront plus à se demander si leur question concerne tel ou tel chatbot. L’interface commune sera le gage d’une expérience sans couture et intuitive. Du point de vue des entreprises, le gain sera majeur. Les métabots vont combler une carence technologique en offrant la possibilité de tirer parti du meilleur des solutions disponibles actuellement sur le marché.
L’année 2019 promet de belles avancées sur cette technologie qui n’en est qu’à ses balbutiements. Extrêmement prometteurs et attendus par les grands comptes, les métabots s’annoncent déjà comme une petite révolution sur le marché des chatbots, toujours en pleine effervescence
Par Patrick SEGUELA, chez Synapse développement