À la demande de la mairie de Paris, l’encadrement des loyers sera de nouveau applicable à partir du 1er juillet 2019. Après avoir été annulé fin 2017, ce dispositif fait son retour après l’adoption, en novembre 2018, de la loi ELAN.
“L’intention d’encadrer les loyers est louable, mais mal réalisé, l’encadrement est perçu comme injuste et distord les rendements locatifs.”
L’intention d’encadrer les loyers parisiens est louable : contenir la hausse des loyers pour faciliter l’accès au logement est logique, surtout s’il s’agit de s’assurer que les évolutions des loyers restent en ligne avec l’évolution des niveaux de salaire.
Pour autant, mal réalisé, l’encadrement est perçu comme injuste et distord les rendements locatifs. Il incite ainsi plutôt les propriétaires bailleurs à vendre ou à laisser vacants leurs biens, qui sortent ainsi du parc locatif, ou à en délaisser l’entretien, avec toutes les conséquences néfastes que cela implique pour les locataires.
“L’administration a raté une opportunité pour apprendre des lacunes de l’ancien dispositif et proposer un encadrement amélioré.”
L’administration avait une opportunité en or pour apprendre des lacunes de l’ancien dispositif d’encadrement et proposer un encadrement plus juste et plus durable. Force est de constater que malgré quelques améliorations, les modalités du dispositif restent les mêmes et présentent les mêmes lacunes que l’encadrement de 2014.
Tout d’abord, l’encadrement des loyers se superpose à la limitation de la hausse des loyers. En effet, à partir du 1er juillet le propriétaire fera de nouveau face à deux contraintes dans la fixation de son loyer : un encadrement du montant du loyer et une limitation de la hausse du loyer entre deux locations. Ainsi, si l’ancien locataire payait un loyer supérieur au loyer encadré, le propriétaire devra baisser son loyer, parfois radicalement. À l’inverse, si le locataire précédent payait un loyer inférieur au loyer de référence de l’encadrement, le propriétaire sera, sauf exception, limité à suivre l’évolution de l’indice des loyers, qui limite la hausse du loyer entre deux locations.
D’autre part et surtout, la méthode utilisée reste trop imprécise et imparfaite. Ainsi, de nombreuses aberrations subsistent, à commencer par la répartition des 80 quartiers de Paris en 14 zones, parfois très hétérogènes. Par exemple, à partir du 1er juillet, un même appartement aura le même loyer encadré, qu’il soit situé au pied du Sacré-cœur, Porte de Clignancourt ou dans le quartier de la Goutte d’Or. Ces trois quartiers étant regroupés au sein de la même zone.
Autre surprise, à surface égale, un studio se louera plus cher qu’un appartement deux pièces, et ce quelle que soit la zone. De plus, un logement au rez-de-chaussée aura le même loyer encadré qu’un logement au troisième étage, alors qu’en matière de vente immobilière les différences de prix selon l’étage sont de plus de 6%.
Il existe également des incohérences relatives à la période de construction de l’immeuble. Par exemple, dans certaines zones, les appartements construits après 1990 auront un loyer sensiblement inférieur à ceux de mêmes biens construits dans les années 1970, d’un confort pourtant moindre.
Certes, les propriétaires de biens aux caractéristiques de confort et de localisation dites exceptionnelles en comparaison de leur zone d’encadrement pourront toujours demander un complément de loyer. Mais, tout comme en 2014 sa définition reste trop floue, trop peu d’indications ayant été données à ce sujet.
“L’encadrement risque de freiner l’investissement locatif et de remettre en question les objectifs de création de logements du Grand Paris.”
Enfin, on peut légitimement se demander quel impact aura ce nouvel encadrement sur le développement du Grand Paris.
Aujourd’hui il ne concerne que la ville de Paris. Mais, une trentaine de communes du Grand Paris ont déjà montré leur intérêt pour le dispositif d’encadrement.
Le Grand Paris du Logement s’est fixé comme impératif le développement de l’offre de logements à des prix accessibles en ayant pour objectif la construction de 70 000 logements chaque année pendant 25 ans. Mais, le dispositif d’encadrement pourrait freiner l’investissement locatif en remettant en question la rentabilité de ces achats. Difficile en effet d’investir sans visibilité sur les montants des loyers futurs.
“Le dispositif d’encadrement doit être corrigé pour assurer une politique d’encadrement des loyers plus juste et plus durable.”
L’encadrement des loyers, s’il paraît pertinent dans le contexte actuel, doit être corrigé pour assurer une politique d’encadrement des loyers plus juste et plus durable. Nous disposons de données qui permettent de refléter fidèlement le juste loyer d’un appartement. Tout d’abord en utilisant une granularité plus fine au niveau des quartiers, et par ailleurs en prenant en compte d’autres critères, tels que l’ensoleillement, la présence d’un ascenseur, d’un balcon, l’étage du logement, son agencement ou encore la qualité de l’ameublement.
L’utilisation de ces nouveaux critères pour le calcul de loyer de référence permettrait d’encadrer les loyers de façon plus cohérente, et de diminuer les risques de répercussions sur le parc locatif parisien que l’on peut craindre aujourd’hui.
L’auteur – Laurent Kretz
Laurent Kretz est le co-fondateur de Homepilot, le premier gestionnaire immobilier en ligne. Avant de lancer Homepilot, Laurent a travaillé dans le secteur bancaire et le commerce international. Laurent est diplômé de ESCP-Europe et l’Université Paris-Dauphine.
Homepilot
Lancé en 2017 par Laurent Kretz et Gilles Bourcy, Homepilot est le premier gestionnaire immobilier nouvelle génération. La startup accompagne les propriétaires de la mise en location à la gestion locative de leur patrimoine. Basée sur l’automatisation et le machine learning, la technologie de Homepilot permet de réduire significativement les durées de mise en location et les délais d’intervention en cas de sinistre. Simple et transparente, la plateforme Homepilot assure un service réactif et garantit au propriétaire une location rapide. Deux ans après son lancement, Homepilot gère plus de 300 millions d’euros d’actifs immobiliers. www.homepilot.fr