« Je ne crois pas qu’il s’agisse d’une très bonne décision pour Microsoft. J’ai entendu Microsoft essayer de la présenter comme un succès, mais je ne vois pas de grande victoire pour eux. » Ces propos de Andy Gavil, professeur spécialisé dans l’antitrust dans une université américaine, cité par Cnet, résume bien l’ambiance dans laquelle se trouve l’industrie informatique suite à la décision que la cour d’appel a rendu dans le procès contre Microsoft (voir édition du 28 juin 2001). Chacune des deux parties essaie de tirer la couverture à elle. Bill Gates, notamment, s’est réjoui, lors d’une conférence de presse donnée dans les locaux de l’éditeur à Redmond, du jugement rendu par la cour d’appel. Seulement, si les mots étaient clairs, son attitude l’était moins. Une fois n’est pas coutume, l’architecte logiciel en chef de Microsoft n’a fait que lire une déclaration vraisemblablement mitonnée à la virgule près par son armée d’avocats. Pas question de grand show comme pour la présentation d’un nouveau produit. La « joie » de Bill Gates en devenait presque « triste ».
La concurrence crie victoire
Il est vrai qu’il reste encore un grand nombre d’inconnues dans ce procès fleuve qui, rappelons-le, voit alliés contre Microsoft le ministère de la Justice et 19 Etats américains depuis octobre 1998 ! Si la sanction de scission décidée par le juge Jackson a bien été annulée, une nouvelle cour de première instance doit tout de même de nouveau statuer sur le cas Microsoft, puisque la société reste convaincue d’avoir violé la loi antitrust américaine. Une nouvelle qui semble réjouir le procureur général américain, John Aschcroft : « Je suis content de pouvoir dire que la cour a unanimement reconnu que Microsoft avait usé de pratiques illégales pour maintenir sa position dominante sur le marché des systèmes d’exploitation », a-t-il notamment déclaré. Du côté de la concurrence, on adopte également la même tournure d’esprit. Pour Scott McNeally, patron de Sun, la décision désigne clairement Microsoft comme coupable. Quant à Matthew Szulik, directeur général de RedHat, il estime que le jugement « confirme les pratiques de prédateur de Microsoft et ses comportements monopolistiques ».
En réalité, le vrai changement par rapport au début du procès concerne le contexte politique. Avant même son élection, on prêtait à Georges W. Bush une plus grande tolérance vis-à-vis de Microsoft que Bill Clinton. Et on peut remarquer que quatre des sept juges de la cour d’appel ont été nommés par des présidents républicains. Ce qui, il est vrai, n’a pas empêché le collège de voter à l’unanimité. Aujourd’hui, il est fort probable que les discussions entre Microsoft et le gouvernement américain reprennent. Et cette fois-ci, un accord à l’amiable pourrait être trouvé, contrairement aux discussions qui s’étaient soldées par un échec au printemps 2000 (voir édition du 27 mars 2000).
Le juge Penfield désavoué
Finalement, le vrai perdant de ce procès semble bien être le juge Thomas Penfield Jackson, qui s’est franchement fait taper sur les doigts par la cour d’appel. Notamment parce qu’il s’est un peu trop épanché auprès de la presse sur ses sentiments (plutôt hargneux) vis-à-vis de Microsoft, alors que le procès en première instance était encore en cours. Il pourrait même se voir appliquer des sanctions si une des parties déposait plainte. Le feuilleton continue…
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