Faire casquer les GAFA, ce n’est pas si évident. A cause des trous dans la raquette législative ? Le tribunal administratif de Paris vient d’annuler une procédure de redressement fiscal visant Google France.
Le ministère de l’Economie et des Finances réclamaient la rondelette somme de 1,1 milliard d’euros à la branche hexagonale du groupe Internet américain, en estimant que la contribution au titre de versement de l’impôt sur les sociétés ne reflétait pas son réel niveau de business en France sur la période 2005-2010.
Ce dossier de présumée optimisation fiscale empoisonne les relations entre l’Etat français et Google depuis au moins 2012 (avec un premier article sorti dans le Canard Enchaîné).
Il a donné lieu à une perquisition médiatisée en mai 2016 dans les locaux parisiens du groupe Internet. Par précaution, le groupe Internet a même provisionné le montant exigé par les autorités françaises au cas où…
Mais le tribunal administratif de Paris vient de considérer que cette procédure de redressement fiscal à l’encontre de Google n’était pas justifiée. « La société irlandaise Google Ireland Limited (GIL) n’est pas imposable en France », évoque-t-il.
En fait, la pièce principale du puzzle dans cette affaire n’est pas Google France mais la société irlandaise Google Ireland Limited (GIL), une autre filiale du groupe américain qui commercialise, en France notamment, le programme de liens sponsorisés AdWords associé à l’exploitation du moteur de recherche Google.
Cette structure, basée à Dublin, est considérée comme le passage incontournable dans le process de facturation des prestations du groupe Internet dans son déploiement européen.
Elle encaisse les revenus publicitaires auprès des annonceurs français puis elle rémunère Google France (GF) pour ses activités de conseil, de marketing et d’ingénierie rendue auprès de cette base d’annonceurs.
« La société GIL contestait les redressements fiscaux dont elle avait fait l’objet en matière d’impôt sur les sociétés, retenue à la source, TVA, cotisation minimale de taxe professionnelle et cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, à raison des prestations de publicité qu’elle facture à ses clients français », selon le communiqué de presse du tribunal administratif.
Celui-ci a « a donné raison à la société GIL en prononçant la décharge des impositions contestées ».
L’administration comptait s’appuyer sur la notion « d’établissement stable » en France selon les critères de l’OCDE pour exiger que Google règle l’ardoise.
Mais le tribunal a jugé que GIL ne disposait pas en France, en la personne morale de GF, d’un tel établissement stable. Il manque deux liens de subordination : la dépendance de GF vis-à-vis de GIL et le pouvoir de GF d’engager juridiquement GIL.
« Or, GF ne pouvait engager juridiquement GIL car les salariés de GF ne pouvaient procéder eux-mêmes à la mise en ligne des annonces publicitaires commandées par les clients français, toute commande devant en dernier ressort faire l’objet d’une validation de GIL », estime le tribunal.
Officiellement, Google déclare un chiffre d’affaires de 247 millions d’euros et 22 millions d’euros de bénéfices en 2015. A ce titre, il a versé 6,7 millions d’euros au titre de l’impôt sur les sociétés en 2015, soit 30% de plus que l’année précédente.
Mais cela reste encore en dessous de la réalité du business de Google en France mais la firme californienne se sort indemne du bras de fer fiscal enclenché avec l’Etat français.
Google se contente d’une réaction laconique après sa victoire : « Après un examen approfondi mené par le rapporteur public, le Tribunal administratif de Paris a confirmé que Google respecte les règles fiscales et les normes internationales. Notre investissement en France demeure, ainsi que notre engagement au service de sa croissance numérique. »
A savourer juste comme un répit ? Les autorités françaises se montrent déterminées à « faire payer » aux géants américains du Net (que l’on résume de manière sommaire au cercle GAFA : Google, Apple, Facebook et Amazon) leurs impôts en Europe. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire l’a répété dimanche après la réunion du G20 à Hambourg.
(Crédit photo : Archive NME/Shutterstock)
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