Les administrations, comme les entreprises qui obtiennent des marchés publics, vont devoir se mettre à la page : avec le projet de loi « pour une République numérique », l’open data devient la politique par défaut.
Du côté de TECH IN France (ex-AFDEL), on se réjouit des « améliorations significatives » qu’apporte le texte dans sa version issue de la commission mixte paritaire.
Réunis ce 29 juin, sénateurs et députés ont notamment supprimé la dimension d’analyse des risques introduite par le Sénat. Celle-là même que la secrétaire d’État au Numérique Axelle Lemaire avait contestée au point de se dire prête à « [demander] une nouvelle lecture ».
Cette disposition vaut pour l’ouverture de données publiques dans son ensemble, exception faite des jugements de juridictions administratives ou judiciaires dans lesquels l’identification d’un protagoniste est possible. Elle est inscrite au titre I du projet de loi, relatif à la « Circulation des données et du savoir ».
L’essentiel du chapitre Ier (« Économie de la donnée ») a été conservé dans sa version adoptée le 3 mai dernier par le Sénat. Illustration avec l’article 1, qui impose la transmission de documents entre administrations pour l’accomplissement de missions de service public, y compris autres que celle pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus.
Certains articles votés par l’Assemblée nationale, mais écartés par la Chambre haute, n’ont pas été réintégrés. C’est le cas du 1 bis A, qui imposait la remise, au gouvernement, d’un rapport sur la nécessité de créer une consultation publique en ligne avant que tout projet ou proposition de loi soit inscrit à l’ordre du jour du Parlement.
La commission mixte paritaire a entériné les conditions de mise à disposition des données sous forme électronique (si possible, dans un standard ouvert, « aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé »). Elle a retenu la rédaction du Sénat, qui avait institué la possibilité de refuser une publication si les documents ne font pas l’objet de demandes de communication émanant d’un « nombre significatif » de personnes.
Les codes sources feront, en vertu de l’article 1 bis B, partie desdits documents, sauf s’ils émanent de personnes publiques ou privées chargées d’une mission de service public dans un secteur exposé à la concurrence, à l’image de la RATP.
L’article 4, en version Sénat, introduit d’autres exceptions. Ainsi les personnes morales dont le nombre d’agents ou de salariés est inférieur à un seuil qui sera fixé par décret (l’Assemblée nationale l’avait établi à 50) seront-elles exemptées de publier leurs données sous forme électronique. Il en ira de même pour les collectivités de moins de 3 500 habitants.
L’Assemblée nationale devrait examiner le texte une dernière fois le 20 juillet, le Sénat prenant le relais d’ici à la mi-septembre.
Une modification est possible en théorie, mais peu probable dans la pratique. On restera donc, a priori, sur un délai de 6 mois à 1 an après la promulgation de la loi pour s’y ajuster et publier les documents concernés.
Tout administration devra par ailleurs mentionner explicitement les décisions individuelles prises sur le fondement d’un traitement algorithmique (ce qui devait être facultatif dans la vision des députés sera finalement obligatoire, comme l’avaient décidé les sénateurs). Et communiquer, sur demande des intéressés, les règles et les principales caractéristiques de mise en œuvre de ce traitement.
Les administrations ne pourront pas ailleurs pas faire obstacle à la réutilisation du contenu des bases de données qu’elle publient, sauf dans le cas d’une mission de service public à caractère industriel ou commercial (SPIC) soumise à la concurrence. En cas de refus, elle s’exposeront à des astreintes pouvant atteindre 2 millions d’euros, selon l’article 8.
À quels critères devront répondre ces données ? L’article 9 fournit quelques détails, mais moins qu’à l’origine, lorsque l’Assemblée nationale avait défini une « qualité des données » en matière de précision, de disponibilité ou de fréquence de mise à jour.
Côté logiciel libre (9 ter), on se contentera d’un « encouragement » à son utilisation dans l’administration, comme l’avait entendu le Sénat. Pas de retour à la version de l’Assemblée nationale, en accord avec la proposition de rédaction de la députée Corinne Erhel (PS, Côtes-d’Armor).
L’open data concernera, outre les décisions de justice (un point longuement discuté en séance publique au Sénat), les vitesses maximales autorisées sur le domaine routier. Une base de données dédiée sera publiée en vertu de l’article 12 bis C introduit au Sénat.
Les gestionnaires des réseaux publics de distribution et de transport d’électricité et de gaz naturel sont quand à eux concernés par le 12 bis ; l’administration fiscale l’est pas le 12 ter, concernant la fourniture des éléments d’information qu’elle détient au sujet des valeurs foncières.
Ces initiatives visent à faciliter la création, par les start-up et PME françaises, de services à valeur ajoutée, à l’heure où les GAFAM (acronyme désignant les grands groupes IT Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) tirent un énorme bénéfice de la data.
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