République numérique : après la loi promulguée, voici la course aux décrets

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Lundi soir, Axelle Lemaire a évoqué le chemin qui reste à faire après la loi promulguée sur le Numérique : « Publier la quarantaine de textes d’application d’ici six mois ».

Hier soir, au laboratoire parisien de biohacking La Paillasse, c’était la consécration de la loi pour une République numérique. C’était tellement intense qu’on a oublié de déboucher les bouteilles à la fin.

Soyons sérieux : le Premier ministre Manuel Valls avait quand même fait le déplacement pour l’occasion. Après la promulgation de la loi au Journal Officiel en date du 8 octobre, il reste encore du chemin à parcourir. Axelle Lemaire l’admet malgré l’énergie déjà consommée pour faire passer le texte à une très grande majorité au Parlement.

« Le vrai chantier est devant nous : c’est la mise en œuvre du texte. Il parait que l’on n’a toujours pas fait le plus gros », esquisse la secrétaire d’Etat chargée du Numérique et de l’Innovation en guise introduction de son allocution.

Avec cette consultation ouverte à tous pour participer à la conception (avant-projet de loi entre septembre et octobre 2015) puis pour peaufiner le projet de loi pour une République numérique, Axelle Lemaire souligne « l’oeuvre collaborative » à laquelle le Conseil national du numérique avait aussi apporté sa touche de manière encore plus précoce.

« Les historiens du droit, les sociologues du droit comprendront plus tard comment cette loi est le fruit d’un compromis historique, social et sociétal à un moment donné entre des forces qui s’opposent. Et c’est cela la politique. »

On rappelle les trois grands piliers de la loi présentés par le ministère de l’Economie : « libérer l’innovation » (open data…), « créer un cadre de confiance » (protection des données personnelles…), « construire une république ouverte et inclusive » (transition numérique, couverture haut débit, e-sport…). Difficile de trouver un cheminement cohérent à cette loi fourre-tout, qui constituera – avec l’élan French Tech – l’héritage de la présidence de François Hollande.

Diffusion intensive de décrets à prévoir

Alors quel est le chantier d’application à venir ? Le temps est compté en raison de la fin du quinquennat qui se profile à la mi-2017. Axelle Lemaire doit aller vite pour boucler les étapes d’exécutions de l’ensemble des volets de la loi.

La feuille de route est établie: « Publier la quarantaine de textes d’application d’ici six mois ».

On commencera par des choses assez simples à mettre en place comme la possibilité d’effectuer des dons par SMS aux associations caritatives partenaires. Le dispositif devrait être disponible pour Noël. Chaque donateur pourra donner jusqu’à 50 euros (dans une limite de 300 euros par mois) par l’envoi d’un SMS depuis son téléphone mobile, précise le dossier de presse.

Le maintien de la connexion Internet devrait également devenir une réalité rapidement. « Il s’exercera pour les personnes les plus démunies en cas de défaut de paiement », précise le dossier de presse. Des premières conventions entre opérateurs télécoms, l’Etat et des départements (Seine-Saint-Denis, Haute Saône) devraient être bouclées d’ici la fin du mois d’octobre.

Open data et Confiance: vague de décrets jusqu’en mars 2017

Les dispositions open data, qui ont fait couler de l’encre, seront établies début 2017.

Après avoir autorisé l’accès libre aux publications scientifiques de la recherche publique, une série d’autres décrets doit être bouclée d’ici fin janvier.

La représentante du gouvernement a évoqué l’obligation pour les organisations publiques de publier sur Internet leurs bases de données, la fouille de recherche et de données, l’accès sécurisé pour les chercheurs et statisticiens en vue d’études de données publiques confidentielles (pourquoi pas évaluer l’éventuelle perspective de l’introduction d’un revenu universel), la reconnaissance des MOOC publics (cours en ligne)…

Le dossier précise en complément la mention explicite de l’utilisation d’un traitement algorithmique dans le cadre d’une décision administrative, l’ouverture et  gratuité des données de l’INSEE, le Service Public de la Donnée (voir encadré sous l’article), le décloisonnement des données de jurisprudence ou de consommation énergétique…

D’ici la fin du premier trimestre 2017, tous les textes relatifs à la confiance seront publiés, assure la secrétaire d’Etat au Numérique et à l’Innovation. Un volet qui englobe la loyauté des plateformes en ligne, la « mort numérique », la portabilité des données (décrets publiés en mars 2017 pour une entrée en vigueur en 2018), et le secret des correspondances privées. « Sur ce dernier sujet, la discussion avec les autorités européennes continuent dans la perspective de la directive e-privacy », précise Axelle Lemaire.

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Il va y avoir de l’e-sport

L’ARCEP sera mise à contribution sur le volet de la neutralité Internet et des capacités accrues de sanction en cas de manquements. Et la CNIL disposera aussi d’une marge de manœuvre plus grande pour sanctionner les infractions à la protection des données personnelles (le plafond des sanctions passe de 150 000 euros à 3 millions d’euros). De quoi ré-équilibrer (un peu) les rapports de force face aux géants du Web (Google, Facebook…) ?

Les entreprises seront intéressées par les décrets sur l’identité numérique, le coffre-fort numérique et le recommandé électronique qui devraient être prêts pour mars 2017.

Le statut des compétitions dans l’e-sport est officialisé à travers la loi pour une République numérique. La représentante du gouvernement espère qu’une « grande compétition internationale » pourra se dérouler en France dès l’année prochaine après la publication des décrets prévus d’ici février.

Sur le front des mesures en faveur de l’accessibilité téléphonique censées être appliquées en janvier 2017, les opérateurs télécoms seront mis à contribution. « L’Etat va promouvoir des nouvelles technologies pour que l’offre se structure et que la France devienne un leader dans ce sens », souligne Axelle Lemaire. Dans quelques jours, un appel à projets doté de cinq millions d’euros sera lancé dans ce sens via le Programme d’Investissements d’Avenir.

Pêle-mêle, on peut noter des clauses visant à accélérer le déploiement du très haut débit sur le territoire français et de la couverture mobile dans les zones rurales, mais aussi la peine accentuée en cas de condamnation pour « revanche pornographique » (jusqu’à 2 ans de prison et 60 000 euros d’amende).

Et la sécurité IT là-dedans ? Même si le sujet est survolé dans la loi, l’ANSSI obtient une certaine protection des « hackers  blancs » : tout citoyen détecteur de faille qui se tourne vers l’agence de sécurité informatique nationale ne pourra pas être poursuivi en justice.

Après avoir présenté l’essentiel des chantiers à mettre en œuvre pour concrétiser la loi pour une République numérique, Axelle Lemaire a conclu son allocution sur la culture de l’innovation qui nécessite « une certaine prise de risque », avec laquelle il faut « laisser tomber certains a priori » et « trébucher pour mieux se relever ».

Tout en constituant une « exigence de l’enjeu de la transformation numérique ».

SPD : consultation publique enclenchée
C’est prévu dans l’article 9 de la loi d’Axelle Lemaire : la création du « Service Public de la Donnée » (SPD) pour faciliter la réutilisation de ses principales bases de données (telles que le cadastre, la base adresse nationale ou le répertoire SIRENE des entreprises) par les acteurs publics ou privés « en garantissant un niveau de qualité de service ». Une ouverture qui bénéficiera aussi à l’écosystème des start-up pour stimuler la création de nouveaux services innovants. Dans ce but, le gouvernement lance jusqu’au 20 octobre une consultation en ligne sur le SPD.

 

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