Les chauffeurs Uber sont-ils salariés ou relèvent-ils du régime des indépendants ?
La justice américaine se penchera sur cette question dans le cadre d’un procès dont l’ouverture est fixée au 20 juin 2016.
Ce n’est pas la première fois que la problématique est discutée devant un tribunal aux États-Unis. Mais le dossier en question a un caractère particulier : il s’agit d’un recours collectif qui pourrait fédérer plusieurs milliers de chauffeurs… et avoir un impact sur l’activité des entreprises de l’économie collaborative.
Pour saisir les subtilités de cette affaire, il faut remonter à 2013 et cette plainte de trois chauffeurs qui exigeaient que soit reconnu leur statut d’employé.
Plusieurs juridictions ont étudié la demande jusqu’à accepter la mise en place d’une class action.
L’issue de cette bataille pourrait obliger Uber à revoir son mode de fonctionnement : les chauffeurs auraient droit, entre autres, à une couverture maladie et à un remboursement des dépenses associées à leur véhicule (carburant, contrôle technique…).
Du côté d’Uber, on persiste et signe* : les chauffeurs sont assimilables à des entrepreneurs indépendants, entre autres parce que leurs horaires sont flexibles et non imposés. On rappelle aussi que le taux d’indépendants est « élevé depuis des années dans de nombreuses industries ». Et de citer l’immobilier (taux de 80 % en 2014), les conseillers financiers (64 %)… ainsi que les taxis (90 %).
Ayant pris acte de cette position, la ville de San Francisco a retourné le problème en imposant aux chauffeurs VTC qui travaillent plus de 7 jours par an d’obtenir un permis professionnel : s’ils sont indépendants, alors il leur faudra s’enregistrer comme tels, moyennant une contribution de 91 dollars par an. Le tout est rétroactif au titre du nombre d’années d’exercice, la loi étant « établie de longue date ».
D’après la presse sur place, la ville de San Francisco justifie cette décision par le lancement, il y a quelques semaines, d’un service en ligne d’enregistrement de sociétés (auparavant, il fallait se rendre à l’hôtel de ville).
Un courrier d’information est actuellement envoyé aux personnes identifiées comme chauffeurs – sachant qu’Uber, comme son concurrent Lyft, s’est toujours fermement opposé à donner leurs noms. Il leur est demandé de régulariser leur situation sous 30 jours, « sous peine de pénalités et d’obligations de paiement ».
Selon les services de la ville de San Francisco, plus de 37 000 chauffeurs seraient concernés. Ce qui représenterait une rentrée financière de 3,37 millions de dollars par an.
Uber a choisi de ne pas s’opposer à cette décision, expliquant qu’il appartenait aux chauffeurs de « suivre les réglementations locales ». Au contraire, Lyft exprime des craintes, notamment sur le fait que les données personnelles des chauffeurs soient collectées et regroupées dans une base de données publique.
L’exploitant VTC reconnaissable par la moustache apposée sur ses véhicules est lui aussi sous le coup d’une class action qu’il a tenté de solder à l’amiable en début d’année. La justice a dernièrement rejeté sa proposition, qui consistait à dédommager les plaignants à hauteur de 12,25 millions de dollars, sans toutefois leur reconnaître un statut de salariés.
* Concernant le recours collectif, Uber considère qu’au regard des multiples contrats qui régissent ses relations avec les chauffeurs, les trois plaignants « ne sauraient représenter de manière adéquate » l’ensemble des personnes potentiellement concernées.
Crédit photo : focal point – Shutterstock.com
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