La partie de poker menteur continue entre d’un côté SCO Group, qui affirme détenir des droits sur Linux, et de l’autre les fournisseurs informatiques qui ont développé une activité économique autour du système d’exploitation Open source, tels IBM ou les distributeurs de suites et leurs clients. C’est surtout sur ces derniers que SCO met désormais la pression. Début août, l’éditeur – fort de sa conviction que des technologies lui appartenant ont été illégalement copiées dans Linux – avait en effet présenté un système de licence sur ce système d’exploitation ? près de 700 dollars pour un serveur monoprocesseur – censé mettre les utilisateurs à l’abri d’éventuelles poursuites judiciaires. Manifestement, les entreprises ne se sont pas précipitées pour acheter ces licences, ce qui incite aujourd’hui SCO à annoncer qu’il va dès ce mois-ci leur envoyer directement une facture. Il vise notamment les grands groupes qui ont publiquement affirmé qu’ils avaient mené à bien de vastes déploiements impliquant Linux. Cela va sans dire, SCO n’exclut pas, au cas où elles ne répondraient pas favorablement à cette première démarche, de passer à des actions plus coercitives : en clair, de leur intenter un procès. Les entreprises qui recevront une facture provenant de SCO sont donc celles qu’il a dans le collimateur et qu’il ne compte pas lâcher si facilement. Mais comment pourrait-elles s’exécuter tant que la justice n’a pas établi la validité des affirmations de SCO ? Or, récemment, SCO a tenté de prouver publiquement à partir d’exemples concrets que des portions du code source d’Unix Systems V, un des noyaux d’Unix sur lequel il détient les droits à la propriété intellectuelle, ont été copiées intégralement dans celui de Linux (voir édition du 20 août 2003). Bien sûr, ces exemples ont été passés au crible par des spécialistes, certes farouches partisans de Linux, qui se sont employés à démontrer que SCO n’avait en fait aucun droit sur le code en question voir édition du 21 août 2003. Bref, SCO n’a convaincu personne et sa position paraît plus que jamais fragile. Peut-être l’éditeur tente-t-il dans l’urgence de « racketter » les entreprises, sentant qu’il lui sera difficile d’obtenir gain de cause devant une cour de justice.
Il n’obtiendra rien, pour le moment en tout cas, des entreprises allemandes : un tribunal vient en effet de condamner l’éditeur à verser 10 000 euros pour ne pas avoir respecté une décision de la justice allemande qui, suite à une plainte déposée par une association pro-Linux, LinuxTag, lui a interdit, en Allemagne, d’affirmer sans apporter la moindre preuve que Linux exploite indûment ses droits à la propriété intellectuelle. L’éditeur avait notamment dû modifier son site Web en langue allemande de façon à ce qu’il ne fasse pas allusion à cette affaire. Mais depuis, il y a rajouté un lien vers la lettre de mise en garde qu’il avait envoyée au mois de mai à 1 500 grandes entreprises. D’où l’amende.
Dell laisse ses clients se débrouiller
Il n’en est pas moins vrai que les entreprises, en tout cas les plus grandes d’entre elles, commencent à se méfier de Linux. C’est Michael Dell, la patron de Dell, qui l’affirme. Il observe en effet que la diffusion de Linux commence à marquer le pas. D’autre part, certains gros clients ont demandé au constructeur s’il comptait les indemniser dans l’hypothèse où SCO les attaquerait en justice. Et bien sûr, Dell n’a aucun projet en ce sens. Dans cette période un peu difficile pour Linux, il appartiendrait pourtant à ces grands fournisseurs, qui se sont proclamés les « amis » de Linux, de s’employer à rassurer les entreprises de façon à ne pas obérer l’avenir de l’OS. S’ils ne le font pas, c’est que le devenir de Linux leur importe peu : il est surtout pour eux un argumentaire marketing leur permettant de vendre plus de serveurs.
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