Sun Microsystems a annoncé en début de semaine avec force communication le lancement des Sun Fire V60x et V65x, deux serveurs équipés du processeur Xeon d’Intel, disponibles à partir de 2 450 dollars. Des serveurs d’entrée de gamme donc, qui fonctionnent soit sous Solaris, dans sa version adaptée pour l’architecture x86 dont Sun a repris la commercialisation début février 2003 après l’avoir interrompue pendant un an (voir édition du 7 février 2003), soit sous Linux, par le biais d’un accord de distribution signé avec Red Hat. Parallèlement, Oracle a annoncé le portage de ses produits sous Solaris x86. On notera que le couple Sun-Oracle a été reformé pour l’occasion. Bien qu’uni à Sun depuis de nombreuses années par leur inimitié commune envers Microsoft, le patron d’Oracle, Larry Ellison, s’était en effet désolidarisé du constructeur il y a quelques semaines, pronostiquant en compagnie de son nouvel ami, Michael Dell, la marginalisation prochaine des serveurs Risc et des Unix propriétaires dans les centres de données, au profit de clusters de serveurs Intel sous Linux (voir édition du 4 avril 2003).
Découpler Solaris d’UltraSparcAvec ce train d’annonces, Sun tente de clairement signifier sa volonté de s’imposer dans les serveurs Intel, en complément de ses serveurs Risc UltraSparc. Cette inflexion stratégique intervient tardivement alors que, depuis plusieurs années déjà, le seul segment sur le marché des serveurs à véritablement connaître une forte progression est celui des serveurs Intel. Sun avait déjà fait plusieurs incursions sur ce terrain dans le passé mais sans jamais rencontrer le succès, son axe de développement prioritaire ayant toujours été la promotion des serveurs Ultrasparc en s’appuyant sur Solaris. Il tente désormais de découpler l’un de l’autre. Mais une question se pose : peut-il aujourd’hui s’imposer sur un marché déjà bien occupé par HP, Dell et IBM ? Pour convaincre les entreprises, Sun a bâti un argumentaire basé sur son aptitude à réduire le TCO (total cost of ownership ou coût total de possession) des serveurs grâce à toute la gamme d’outils d’administration associée à Solaris. C’est sur ce point ? la mise en avant de Solaris ? qu’il se distingue de ses concurrents, ces derniers misant sur Linux.
Un patron contestéCe choix stratégique est-il pertinent ? La lecture d’un récent rapport du cabinet d’études Meta Group alimente le doute. Il prédit en effet un sombre destin à Sun, qui pourrait bien ressembler à celui de Digital, ex-star de l’informatique des années 80 rachetée en 1998 par Compaq ? effectivement, un article paru dans le New York Times évoque un possible rachat de Sun par IBM, Cisco ou un groupe d’investisseurs – à moins qu’il ne se recentre sur les systèmes Intel sous Linux et les services Web. Problème : le rapport conteste en des termes peu amènes la capacité du CEO de Sun, Scott McNealy, à opérer une telle mutation et appelle de ses voeux la nomination d’un nouveau dirigeant. En attendant, on peut au moins reconnaître à Scott McNealy que sur le premier point au moins ? le recentrage sur les serveurs Intel sous Linux ? il a permis à Sun de parcourir la moitié du chemin.
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