Avec l’Amazon Web Services Summit qui s’est déroulé hier à Paris, on a pu palper l’intérêt du secteur IT français et des entreprises vis-à-vis des solutions cloud du groupe Internet américain et découvrir qu’il existe un embryon d’équipe locale.
Malgré la présence d’AWS sur des salons IT (comme Big Data organisé en avril 2013), le fournisseur de solutions cloud rattaché au groupe Internet Amazon communiquait peu avec la presse IT française. Cela change un peu…
Stephan Hadinger, Senior Manager Solutions Architecture chez Amazon Web Services, explique comment AWS s’organise pour percer sur le marché du cloud en France.
Si le porte-parole se montre à l’aise pour parler des technologies et promouvoir des références clients, c’est un peu plus compliqué dès que l’on aborde des questions un brin plus sensibles.
(Interview réalisée le 25 juin 2013)
ITespresso.fr : Comment Amazon Web Services s’organise pour investir le marché français ?
Stephan Hadinger : En fait, nous sommes présents en France sous la forme d’un support clients. Cela fait un an que j’ai pris mes fonctions en France pour le compte d’AWS. Je dispose d’une équipe « Architecte Solutions » qui a vocation à aider les clients à comprendre quelles sont les principes d’architectures extensibles qui permettent de tirer des bénéfices du cloud.
Le degré de maturité dans ce domaine est différent en fonction des clients. On y trouve des start-up comme IsCool (jeux sociaux sur le Web et mobile) qui utilisent AWS depuis 2009, Chef Jerome (e-cuisine) ou Botify (Web analytics). On reste vraiment sur du support.
En France, il n’y a pas d’équipes de vente ou commerciales. On ne fait donc pas de facturation à partir de la France. Les transactions se font en dollars par l’intermédiaire la plateforme Amazon Web Services.
ITespresso.fr : Comment animez-vous et enrichissez-vous votre écosystème de partenaires en France ?
Stephan Hadinger : Nous disposons d’un programme partenaires (Amazon Partner Network) avec différents niveaux de participations. Il s’appuie sur deux axes au niveau international ou local : les partenaires consulting (avec des intégrateurs comme Capgemini ou Accenture) et les partenaires technologiques (éditeurs de logiciels). Pour vous donner un ordre de grandeur global, nous affichons 3000 partenaires Conseils et plus de 1800 partenaires technologiques dans le monde (correctif apporté le 27/06/13).
En France, nous organisons des webinaires et produisons des contenus spécifiques pour le compte de nos clients. Nous les aidons dans leur démarche et organisons des formations.
Le modèle de distribution est variable. Nous pouvons avoir le modèle à trois (client – partenaire intégrateur – AWS) et le client peut payer directement à AWS. Mais il existe des modèles indirects : certains intégrateurs sur certains projets préfèrent élaborer une offre complète et packagée avec des engagements spécifiques. Dans ce cas, le partenaire peut prendre en charge l’intégralité de la facturation puis effectue un versement à la partie due à AWS.
ITespresso.fr : Dans le cadre du développement des activités d’Amazon Web Services, est-ce gênant de ne pas disposer de data centers en France ?
Stephan Hadinger : De manière générale, nous n’annonçons pas à l’avance ce type de projets. Nous restons focalisés sur les demandes de nos clients. D’ailleurs, cela ne représente pas à leurs yeux un souci en termes de performance. Prenons un exemple : depuis 2011, tous les sites Web frontaux d’Amazon.fr sont hébergés chez AWS en Irlande. Je vous laisse juger de la performance pure de nos sites Web en France…C’est un élément rassurant.
En termes d’infrastructure, il vaut mieux que nos clients utilisent notre offre CloudFront de content delivery network (CDN) pour réduire la latence sur les pages statiques ou les contenus dynamiques. Nous disposons de deux points de présence à Paris.
ITespresso.fr : Sur la France, la « météo du cloud » de Cedexis (un outil de benchmarking des performances des CDN), place AWS dans la moyenne. Mais vous n’êtes pas au top…
Stephan Hadinger : Les temps de réponse réseaux représente une chose. C’est un élément de réponse et nous apportons CloudFront pour cela. Mais, ce qui est important, ce sont les temps de réponse au global de l’application.
Nous écoutons avec attention le retour de nos clients sur la manière de réduire le temps de latence globale des applications avec les parties des frontaux Web et des bases de données.
ITespresso.fr : Vous vous sentez toujours à la pointe de l’innovation dans la course technologique du cloud ?
Stephan Hadinger : L’innovation est un puissant moteur chez Amazon Web Services. Courant 2012, nous avons mis sur le marché 159 nouveautés qui sont placées en priorité en fonction de la demande de nos clients. Le rythme est donc soutenu. En regardant également le nombre de cycles de nouvelles fonctionnalités apportées chaque année, leur livraison a tendance à s’accélérer. Autre axe : les prix les plus bas. En sept ans, nous avons procédé à 35 baisses de prix.
ITespresso.fr : Comment percevez-vous le champ de la concurrence dans le cloud en France ? Notamment face à Google et Microsoft…
Stephan Hadinger : Nous ne commentons pas ce que font les entreprises concurrentes. On se concentre sur les clients. Les activités d’Amazon Web Services ont démarré en 2006, issues du savoir-faire d’Amazon.com et de ses data centers déployés à grande échelle. A l’époque, on considérait déjà que l’on était assez bon pour gérer des infrastructures massives.
Sept ans plus tard, nous sommes encore meilleurs. Nous sommes à l’aise sur un marché de gros volumes et à faibles marges. Pour les acteurs de l’IT traditionnels habitués à des fortes marges, c’est moins évident.
ITespresso.fr : Vous suivez les débats sur le cloud souverain ?
Stephan Hadinger : On considère que le cloud est une valeur tellement forte qu’il y aura de la concurrence sur ce marché.
ITespresso.fr : En France, comment pourriez-vous développer la visibilité des offres d’Amazon Web Services au-delà de la sphère des techniciens. La semaine dernière, on évoquait un partenariat entre Microsoft et Capgemini. Mais on ignorait la collaboration AWS – Capgemini…
Stephan Hadinger : L’Amazon Web Services Summit à Paris sert à cela. D’ailleurs, Capgemini est Gold Sponsor de l’événement. Nous organisons également avec nos partenaires des webinaires en français pour toucher les métiers.
ITespresso.fr : La sécurité dans le cloud demeure-t-elle une préoccupation de vos clients en France ?
Stephan Hadinger : La sécurité est la priorité numéro un chez Amazon Web Services. On investit beaucoup en technologies et en personnes. Après, il faut bien comprendre aussi que c’est un modèle de sécurité partagé. Amazon Web Services prend en charge la sécurité des infrastructures (bâtiments, réseaux, hyperviseurs, firewall…).
Après, prenons le cas d’un client qui va lancer un serveur virtualisé dans Amazon EC2 par exemple. Il devra protéger ses machines, ses OS et ses données. Nous ne regardons pas cette partie-là.
Les activités d’AWS sont réparties en 9 régions (dont une spéciale GovCloud aux Etats-Unis). Ce qui est important à savoir, c’est que quand vous lancez une machine virtuelle dans une zone, les contenus ne sortent jamais de cette région. Si vous stockez des données en Irlande, nous ne déplacerons jamais ses données. A moins que le client émette un souhait dans ce sens.
Parallèlement, nous nous engageons beaucoup sur la dimension de la certification de la sécurité. Nous en avons beaucoup sur notre liste (notamment SOC 1, SOC 2, ISO 27001, PCI DDS niveau 1…).
ITespresso.fr : Evasion fiscale, protection des données et les failles du Patriot Act…Amazon se retrouve impliqué dans des débats chauds. Cela ne nuit-il pas à votre business en France ?
Stephan Hadinger : Amazon répond à l’ensemble des règlementations des pays dans lesquels il opère. Dans un grand nombre de pays, la loi impose différentes choses sur les réquisitions judiciaires.
On a souvent des questions légitimes sur la protection des données. Nous préconisons à nos clients de chiffrer leurs données. En fonction de nos offres (notamment Cloud HSM), nous proposons un système intégré de chiffrement des données. Les clients peuvent également recourir à des partenaires AWS dans la sécurité IT comme TrendMicro ou SafeNet.
Amazon Web Services : « Disruptive, isn’t it ? » |
Il suffit de se rendre sur le site d’Amazon Web Services pour se rendre compte de l’étendue de leurs services cloud (une vingtaine) : calcul, diffusion de contenus, bases de données, stockage…Le contenu de la déclinaison française de la plateforme AWS est plutôt didactique. Ce qui est un bon point pour un fournisseur de services cloud qui facture ses clients français…en dollars. La saga Amazon Web Services est assez fascinante. Elle a démarré en mars 2006, forte de l’expérience acquise depuis 1995 avec le site pionnier de commerce électronique Amazon.com. AWS a vocation à permettre aux développeurs et aux entreprises d’utiliser des services Web afin de créer des applications extensibles dans le cloud et de développer du business ancré dans un écosystème de services IT qui s’étend. Des grandes entreprises et des start-up comme Netflix (vidéo à la demande) repose en grande partie sur AWS. Un coup d’essai transformé en coup de maître. Amazon ne communique pas sur la proportion de business réalisée par sa division AWS (a priori moins de 10% du chiffre d’affaires groupe). Mais le groupe Internet a réussi à bluffer les éditeurs traditionnels du marché IT en apportant une dimension que tout le monde copie désormais : la flexibilité. Véritable mot-clé du cloud. |
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