Tempête sur les salaires de PDG ! C’est devenu le sport national de certains articles de presse en France, alors qu’en temps normal, on en entend très peu parler aux Etats-Unis. La dernière chasse aux sorcières du même style date du début des années 90, selon Fortune, l’un des magazines américains les plus respectés pour ses analyses économiques. Depuis, plus rien ! Il était donc temps de repartir en guerre contre les véritables hold-up organisés par les patrons. Et puis, une petite poussée d’adrénaline de temps en temps ne fait pas de mal, surtout quand il s’agit d’épingler des dirigeants qui se protègent du chômage en se faisant accorder des parachutes dorés en cas d’éjection et des stock-options à la pelle pour devenir millionnaires. La Silicon Valley en compte un grand nombre, Fortune s’est donc intéressé à ses plus visibles représentants. Ils font une bonne cible. Dans le lot, les dirigeants de Computer Associates, Oracle ou Apple.
381 millions de dollars de revenus en 2000
La question qui taraude est très juste : les revenus des PDG ont connu une inflation continue et apparaissent comme de véritables braquages organisés, au détriment des actionnaires et des salariés. Les échelles de revenus diffèrent totalement : de quelques dizaines de millions de dollars à quelque 150 millions (un peu plus d’un milliard de francs !) pour la plupart des patrons en présence. Mais l’outrage le plus important, selon le magazine, ce sont les revenus de Steve Jobs : 381 millions de dollars (près de 3 milliards de francs !) versés en 2000. Une somme ! Et le magazine de souligner les faibles performances de la firme qu’il dirige sur la période (depuis le dégonflement de la bulle boursière de la nouvelle économie et le profit warning de la fin d’année 2000).
C’est aller un peu vite en besogne : si Geoffrey Colvin rappelle bien que le salaire de Steve Jobs a été de 1 dollar pour l’année (7,75 francs au cours actuel), il omet de souligner que le patron d’Apple n’a pas touché plus depuis son retour aux commandes de la firme voilà plus de quatre ans. Steve Jobs s’est donc vu décerner, à sa propre demande, une obole de 31 francs depuis fin 1996 ! Ajoutez à cela le fait qu’il a sauvé la firme d’une mort certaine, prévue par les spécialistes, annoncée par les médias et entérinée par les clients qui ont pour beaucoup abandonné sa plate-forme. Enfin, depuis son arrivée, la valeur de l’action Apple a augmenté de 800 % (de moins de 15 dollars en 1998 à plus de 120 au printemps 2000, avant que le nombre d’actions ne soit multiplié par deux, faisant passer le cours à 50 dollars). Même aujourd’hui, la valeur d’Apple a augmenté de 166 % depuis 1998 (plus de 41 % de progression annuelle).
Avantages et gratifications
Les revenus annoncés par Fortune comprennent en réalité essentiellement un avion d’affaire d’une valeur de plus de 670 millions de francs, offert par le conseil d’administration (un outil de travail, en somme !) et 10 millions de stock-options, des parts de la société représentant près de 5 % de la firme. Ces avantages lui ont été attribués pour le remercier de son action au service de la firme pendant plus de trois ans. Autant dire que les revenus de Jobs depuis son retour et jusqu’à l’année 2001 comprise se décomposent ainsi : un avion, un peu plus de 2 millions de stock-options par année de service (et moins tant que le temps passe et qu’aucune autre rétribution ne lui est accordée) représentant aujourd’hui en moyenne 40 millions de dollars (près de 310 millions de francs) par an et 30 francs de salaire symbolique. Loin des 3 milliards de francs annoncés ! Cela dit, loin de nous l’idée de plaindre Steve Jobs…
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