La détermination de la France, les réserves de l’Allemagne… et d’autant plus d’incertitude.
Ainsi pourrait-on résumer l’état des négociations sur le projet de « taxation des GAFA » dans l’Union européenne.
Les divergences se sont confirmées samedi dernier à Vienne, au deuxième jour d’une réunion des ministres des Finances.
Olaf Scholz, qui occupe cette fonction au sein du gouvernement Merkel, n’a pas exclu de parvenir à un accord d’ici à la fin de l’année. Mais il a laissé entendre qu’un « débat rigoureux » s’imposait*.
Le projet de l’UE implique une démarche en deux temps. Sur le long terme, il s’agit de réformer les règles fiscales pour imposer les profits des sociétés là où elles ont « une interaction significative avec les utilisateurs via les canaux numériques ».
En dépendraient les entreprises qui ne disposent pas d’une présence physique dans un États membres, mais qui satisfont au moins un des trois critères suivants :
Dans un premier temps, il est question de taxer, à hauteur de 3 % de leurs revenus dans chaque État membre, les sociétés qui réalisent plus de 750 millions d’euros de C.A. annuel mondial, dont au moins 50 millions d’euros dans l’UE.
Sont censées entrer dans la catégorie « numérique » les entreprises dont le modèle économique est basé sur la publicité, la revente de données personnelles ou la mise en relation de personnes (marketplaces).
Pour pousser à un compromis, l’Autriche, qui occupe la présidence tournante de l’Union, a suggéré que la taxation ne soit pas appliquée aux modèles économiques fondés sur la revente de data.
Du côté de Bruno Le Maire, on avance un mécanisme de clause crépusculaire : les mesures proposées prendraient fin dès lors que serait trouvé un accord global pour la taxation des entreprises du numérique.
Le ministre de l’Économie et des Finances français formalise là ce que le projet prévoit déjà en l’état. L’idée étant d’aller vers une assiette commune et consolidée (Accis), afin que les sociétés aient la même base fiscale au sein de l’UE et ne déposent qu’une déclaration.
La France propose aussi de dédommager l’Irlande au titre des probables pertes qu’engendrerait cette réforme fiscale. De nombreuses entreprises du secteur numérique – à commencer par Apple, Google et Microsoft – ont en l’occurrence établi leur siège européen sur place.
Le gouvernement irlandais n’est pas le seul à exprimer un fort scepticisme. On peut en dire autant de Malte et du Luxembourg, où les taux d’impôt sur les sociétés comptent parmi les plus bas d’Europe.
Tous ces États membres devront, sans exception, approuver la réforme pour qu’elle soit entérinée. Même chose avec l’Allemagne, dite particulièrement inquiète pour ses constructeurs automobiles et les relations avec leurs partenaires internationaux.
Onze États ont officiellement prévu des cadres législatifs nationaux au cas où aucun consensus ne serait trouvé à l’échelle de l’UE.
* Olaf Scholz avait annoncé la couleur en avril dernier à Sofia (Bulgarie), quelques semaines après son investiture. « Je pense forcément qu’un nouveau ministre apporte son style […]. C’est ce qu’il fait déjà et c’est ce qu’il va faire de plus en plus », avait déclaré Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et monétaires.
Crédit photo (Olaf Scholz à gauche, Bruno Le Maire à droite) : BKA / Martin Votava
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