Fin avril, le député socialiste de Saône-et-Loire Thomas Thévenoud remettait à Matignon le rapport associé à la mission de concertation que lui avait confiée l’ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault pour tenter d’apaiser les tensions concurrentielles entre sociétés de taxis et exploitants de véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC).
De la trentaine de recommandations émises pour pérenniser chacune des deux activités de transport de passagers en automobiles avait résulté une proposition de loi destinée à « moderniser la profession de taxi » tout en établissant des « règles du jeu plus claires pour les VTC ». Malgré l’abstention du Front de Gauche et de l’UMP, le texte a été adopté, ce 10 juillet, par l’Assemblée nationale.
Il appartient désormais au Sénat d’examiner les différentes résolutions proposées : régionaliser l’immatriculation des VTC, leur imposer la souscription d’une assurance professionnelle de transport, instaurer une tarification claire et au forfait… Mais aussi interdire la maraude électronique, cette pratique qui consiste à prendre en charge des clients dans la rue, sans réservation, grâce à la géolocalisation.
Sur ce dernier point, l’Autorité de la concurrence considère que les taxis « jouissent d’un monopole légal […] qui découle de l’autorisation de stationnement dont ils sont titulaires et qui est la contrepartie de la réglementation à laquelle ils sont assujettis« . Du côté des exploitants de VTC, on met en avant un fonctionnement pratique qui « rend la maraude très difficile » : leur logiciel sait à chaque instant quels véhicules sont libres et leur affecte des courses à mesure qu’il enregistre des réservations. Par conséquent, si l’un des chauffeurs a chargé un client hors de toute réservation, il apparaître toujours comme disponible, mais ne pourra, par définition, pas prendre en charge le client qui lui est affecté.
Si elle prévoit de sanctionner les VTC à hauteur de 15 000 euros d’amende et un an d’emprisonnement pour l’utilisation de la maraude électronique (et non des seules courses avec réservation préalable), la proposition de loi Thévenoud encourage au contraire l’exploitation des technologies de géolocalisation par les taxis. Il est question de créer un « registre de disponibilité des taxis » géré par l’État, sur la base du volontariat et sans surcoût. En contrepartie, et conformément à une décision du Conseil d’Etat prise en février dernier, le délai d’attente de 15 minutes pour la prise en charge d’un client par les VTC est annulé.
Sur BFMTV, Thomas Thévenoud résume : « La géolocalisation va permettre [aux taxis] de développer leur chiffre d’affaires et de maintenir la valeur de la licence. Le but n’est pas d’empêcher les gens de travailler ; au contraire, c’est de créer des emplois dans ce secteur. » A l’inverse, Yan Hascoet, P-DG de Chauffeur-privé.com (présenté comme le leader français sur le marché des VTC), considère que « c’est triste de voir qu’il faut légiférer pour ne plus afficher sur un écran la position d’un véhicule« . Il ajoute : « C’est pourtant la fonction la plus ergonomique pour les usagers. Une fois de plus, c’est symptomatique de la façon d’appréhender, en France, l’évolution de la technologie« .
Parmi les autres mesures évoquées dans le texte de loi, l’interdiction pour les chauffeurs de cumuler des activités taxi et VTC et la possibilité pour les mairies (ou préfectures de police à Paris) de définir une couleur unique pour les taxis afin de mieux les identifier. Le rapport Thévenoud recommande également de généraliser l’usage de la carte bancaire pour les taxis, de définir un montant fixe pour la course d’approche et de créer une voie réservée dans les aéroports parisiens.
Roissy et Orly ont constitué, le 11 juin dernier, le théâtre d’opérations escargot à l’initiative d’environ 500 taxis qui se sont dirigés au ralenti vers le centre de la capitale, dans le cadre d’un mouvement européen de contestation. En France, c’est la société américaine Uber – soutenue financièrement par Google – qui symbolise le conflit entre VTC et taxis.
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