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Taxis-VTC : des députés divisés adoptent la proposition de loi Grandguillaume

Ce mercredi 20 juillet 2016, l’Assemblée nationale adoptait, à la suite du rapport de la commission mixte paritaire, le projet de loi « pour une République numérique ».

À l’ordre du jour figurait aussi la suite de l’examen – entamé la veille – de la proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes.

Déposé le 21 juin 2016, le texte fait l’objet d’une procédure accélérée. Laurent Grandguillaume, député PS de Côte-d’Or et médiateur dans le conflit taxis-VTC, en est l’auteur… et le rapporteur, nommé par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

Cette dernière avait examiné la proposition de loi début juillet. Le texte qui en est ressorti a été amendé par les députés sur de nombreux points.

En introduction de la séance publique du mardi 19 juillet, Laurent Grandguillaume avait tenu à rappeler que la notion d’économie collaborative « renferme différentes réalités : cela va de la start-up française, qui innove et s’inscrit dans une dynamique collaborative, à la multinationale, qui se développe sur la base de schémas d’optimisation fiscale et qui veut imposer au consommateur un monopole sectoriel en mettant en concurrence les travailleurs indépendants ».

Il avait ajouté : « Peut-être y a-t-il, dans l’hémicycle, des libéraux libertariens qui ne veulent aucune règle, aucune régulation, aucune protection. Cela peut être un modèle de société ; ce n’est pas celui que je défends ».

Avec ou sans covoiturage ?

Sur l’article 1, qui prévoit que les plates-formes jouant le rôle d’intermédiaires dans le transport public particulier de personnes procèdent à un certain nombre de vérifications auprès des conducteurs et mettent en place des mesures préventives pour éviter la fraude, l’amendement no 12 a suscité le débat.

Défendu par Martial Saddier (Les Républicains, Haute-Savoie), il a été rejeté, à 16 voix contre et 14 pour. Il s’agissait d’exclure explicitement le covoiturage du champ de la régulation instituée par la proposition de loi, en tant que transport privé routier de personnes.

Le ministre des Transports Alain Vidalies, qui représentait le gouvernement, a émis un avis défavorable, expliquant que l’article, tel que rédigé, allait « éviter d’avoir à reprendre en d’autres circonstances le débat ».

Même son de cloche chez Laurent Grandguillaume : « On ne peut […] pas dire que le transport public particulier de personnes se caractériserait pas des abus dont le covoiturage serait totalement exempt ».

Sur ce même article 1, on relèvera l’échec de Virginie Duby-Muller (LR, Haute-Savoie) à faire adopter l’amendement no 49, qui visait à supprimer les alinéas 21 et 22. Ces derniers instaurent une responsabilité des plates-formes de réservation à l’égard des clients dans la bonne exécution de la prestation, alors que les conducteurs sont, pour la plupart, « des travailleurs indépendants sans lien de subordination avec les plates-formes », selon la députée.

LOTI, c’est fini ?

Sur l’article 2, qui doit permettre à l’autorité administrative d’imposer aux acteurs du secteur de lui transmettre des données, on a retrouvé Martial Saddier et son amendement no 17, non adopté.

Le député craint que le texte « procède à une aspiration importante et non limitée des données d’entreprises privées » et estime que cela fait peser, sur elles et les travailleurs indépendants concernés, une charge importante. Il considère, en outre, que l’Autorité de la concurrence « dispose déjà de moyens pour détecter les pratiques anticoncurrentielles sans qu’une transmission soit nécessaire ».

À noter l’adoption de l’amendement no 86 de Luc Belot (PS, Maine-et-Loire), qui prévoit que les données communiquées à l’autorité administrative soient anonymisées avant leur transmission.

Gros morceau de cette proposition de loi, l’article 4 a conclu les débats du 19 juillet. Il porte notamment réforme du statut LOTI, issu de la loi du même nom, votée en 1982.

Ce statut a été massivement adopté par les chauffeurs au vu de la souplesse qu’il offrait jusque récemment par rapport à celui de VTC. Laurent Grandguillaume cherche désormais à en empêcher le dévoiement dans les agglomérations les plus denses.

C’est l’objet de l’article 4 : rendre illégale la proposition de prestations de transport LOTI dans des véhicules de moins de 9 places pour des trajets entièrement situés dans le périmètre géographique d’un plan de déplacement urbain (en l’occurrence, des agglomérations de plus de 100 000 habitants).

Non adopté, l’amendement no 97 de Luc Belot a toutefois posé la question de la réalité du secteur dans les zones rurales, où, selon Alain Vidalies, « l’activité des taxis […] est constituée, dans des proportions considérables, de transports pour le compte d’autrui, et plus de 80 % de leur chiffre d’affaires […] correspond au transport de malades assis pour la Sécurité sociale ».

Quelles garanties pour les LOTI qui voudront faire du transport occasionnel en milieu urbain et devront par là même devenir VTC ? Une équivalence, après 12 mois d’activité, leurs véhicules étant identifiés par un élément « inamovible et infalsifiable ».

Dure réalité ?

Cette séance du 19 juillet aura été l’occasion d’aborder les problématiques de destruction de valeur, de dumping social, de précarisation et de fiscalité inhérentes au TIC appliquées à l’économie collaborative.

Sur ce point, on citera Thomas Thévenoud (PS, Saône-et-Loire) : « Aujourd’hui [à Paris], vous avez 20 000 taxis, plus de 10 000 VTC, des stations d’Autolib’ ont fleuri partout […], et tout le monde travaille. La question qu’il faut se poser, cependant, c’est de savoir si tout le monde travaille suffisamment pour pouvoir payer ses charges à la fin du mois ».

Dans la même veine, Patrice Carvalho (groupe communiste, Oise), a fait référence à une étude du bureau de recherche indépendant 6-T.

À l’échelle des 13 plus grandes métropoles de France, un chauffeur de taxi dégagerait en moyenne 54 000 euros de chiffre d’affaires par an… avec des dépenses annuelles de 53 340 euros pour un artisan qui n’a pas fini de rembourser sa licence. Quant aux chauffeurs partenaires d’Uber, ils gagneraient 6 813,50 euros par an, l’entreprise américaine touchant, de son côté, 8 225 euros au titre des commissions de 20 % prélevées sur chaque course…

Luc Belot a proposé avec succès un autre amendement : le no 89, adopté en séance le 20 juillet lors de l’examen de l’article 5, relatif aux conditions d’aptitude professionnelle. Objectif : mettre à disposition des candidats aux examens des instruments leur permettant d’améliorer leurs capacités, à l’instar des annales du baccalauréat.

Il appartient désormais au Sénat d’examiner le texte, qui doit complémenter la loi Thévenoud entrée en vigueur le 1er octobre 2014.

Crédit photo : leolintang – Shutterstock.com

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