Pas de chance pour le collectif Libre ADSL, l’annonce de la création de ce collectif réclamant « des conditions de concurrence normales sur la boucle locale et une baisse des prix » tombe le jour même où l’on apprend que le ministère des Finances a validé les nouveaux tarifs ADSL de France Télécom? en baisse (voir édition du jour). Même si Libre ADSL considère certainement ces derniers comme encore trop élevés, la lettre ouverte de Jean-Louis Constanza, directeur général de Tele2, risque de rester lettre morte auprès de son destinataire Michel Bon, le président de France Télécom. Si le but du collectif est clair, son message l’est nettement moins. On se perd dans des considérations généralistes et là où une baisse des prix est réclamée, aucun tarif n’est exigé ni même suggéré. L’ADSL c’est trop cher, soit. Mais après ? Il faut baisser les tarifs. D’accord, mais de combien ? Le collectif exprime à demi-mot ce que pensent nombre d’opérateurs, fournisseurs d’accès et autres acteurs de l’ADSL en France. On aurait aimé qu’il le fasse à voix haute. Quand Jean-Louis Constanza écrit dans sa lettre ouverte « Beaucoup de vos concurrents vont jusqu’à murmurer que France Telecom abuserait de sa position de monopole de fait, pour empêcher leur développement », on aimerait qu’il se départisse du conditionnel. Le collectif vient d’être créé, d’accord, mais jusqu’à aujourd’hui, quand on cherchait à savoir qui se cachait derrière Libre ADSL (à part Tele2), pour toute réponse le site indiquait qu’il était « composé d’opérateurs de télécommunications et des principaux acteurs du marché de l’Internet ». Un peu léger. Depuis, les noms des opérateurs Kaptech et LDCom sont apparus, eux qui auparavant « ne souhaitaient pas que leur logo apparaisse sur le site », dixit un porte-parole de Tele2. Nous avons cherché à connaître leurs motivations à participer à Libre ADSL : ni l’un, ni l’autre n’ont donné suite à nos demandes. Depuis, sont aussi apparus les noms d’Everyday.com, Distrigame.com, Netloterie.com ainsi que l’Adim (Association des internautes médiateurs) et Siotel (présentée comme « association d’opérateurs »).
Libre ADSL remet en cause la position de l’ART, « qui ne prenait pas de décision », nous indique un porte-parole de Tele2, ajoutant que « cela fait assez longtemps que ça dure ». Le but du collectif et de la lettre ouverte est, selon elle, de « créer un mouvement de masse » en expliquant la situation. D’où la pétition, qu’on retrouve sur une page où ne figure, comme indication de ce que l’on signe, que « Libérons l’ADSL ! ». Un peu léger aussi. Pas non plus de compteur indiquant le nombre de signataires, pas d’accès aux signatures, rien. Juste un formulaire à remplir. Du texte, on en trouve par contre quand on se rend sur les rubriques « Pourquoi le haut débit chez vous et pour tout le monde ? ». Suit un discours marketing du plus bel acabit. Morceaux choisis : « L’Internet haut débit n’est pas qu’un outil de travail ou un amusement technologique… Les femmes échangent en ligne leurs expériences de maternité, de couple, de beauté et elles sont aussi très actives dans les forums politiques de nos grands quotidiens français. » Ou encore : « Consommer des nouvelles technologies, c’est aussi participer à la dissolution de la fracture numérique. Plus il y aura de monde qui utilisera ces techniques, moins chers seront les équipements qui seront développés par les constructeurs et les opérateurs ». On croit rêver. Le passage intitulé « Le haut débit moins cher, c’est plus de croissance et d’emplois » vaut aussi le détour : « Les innovations dans les télécommunications servent surtout la démocratisation, en donnant accès au plus de monde possible à l’information. (…) Rendre la vérité accessible à tous, c’est faire que les horreurs du totalitarisme appartiennent définitivement au passé. »France Télécom joue l’étonnement
La partie la plus intéressante reste certainement celle qui explique « Pourquoi c’est cher aujourd’hui ». Là, le collectif assène quelques coups bien placés à France Télécom. « Alors que la création d’une salle dans ses propres centraux coûte à l’opérateur de l’ordre de 150 000 francs, France Télécom facture l’entrée dans ses centraux plusieurs millions de francs, et met plusieurs mois à laisser les opérateurs s’installer », peut-on lire. Une critique que balaye Patrick Thielemans porte-parole de France Télécom. « Les coûts se partagent entre opérateurs », lance-t-il, « nous travaillons sur devis, avec les même prix que ceux que nos fournisseurs nous facturent », ajoutant qu’« il faut parfois du génie civil, amener l’énergie, des câbles, etc. »« On fait payer au prix réel ». Même réaction face à l’indignation de Libre ADSL qui écrit : « France Télécom facture l’installation du dégroupage 700 francs HT par ligne, alors qu’il s’agit de déplacer l’extrémité de la ligne téléphonique dans son central, ce qu’elle facture 175 francs HT à ses propres clients résidentiels quand ils emménagent ! »« Ce n’est pas comparable », assure Patrick Thielemans qui évoque « les coûts techniques et les coûts commerciaux », parle de « différence de facturation » et « recettes de trafic ». Au final, il se dit « surpris » de l’initiative de Libre ADSL : « Juste quand on baisse les prix, je ne comprends pas, ce sont des faits, pas des paroles. » Il assure que « tout le monde va bénéficier [de la baisse des tarifs] » et quand on évoque l’absence de répercussion sur les prix notamment des packs ADSL des concurrents, Patrick Thielemans estime qu’au moins cela « devrait les aider à rattraper leur marge ».
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