« Comme chaque année, nous recevons un scud sur la tête ».
Après le raz-de-marée de critiques en 2010 suite à l’attribution de la 4ème licence 3G, suivi de la préparation de la 4G en 2011 et du débat sur le taux de couverture de Free Mobile en 2012, Jean-Ludovic Silicani fait référence, pour 2013, au rapport de Bercy sur les prérogatives de l’ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes) qu’il dirige et sa décision d’anticiper l’ouverture de la bande des 1800 MHz à Bouygues Telecom pour exploiter la 4G.
« Il faut prendre ça avec distance », relativise le président de l’instance de régulation qui a profité d’un point avec la presse, ce 21 mars, pour défendre les fonctions et résultats de l’ARCEP. Notamment sur l’activité du marché des opérateurs en 2012.
Il en ressort « une légère baisse », de 3,5%, en valeur avec un chiffre d’affaires global des quatre principaux opérateurs (hors Numericable qui n’avait pas rendu ses résultats) d’un peu plus de 41 milliards d’euros en 2012. « Il s’agit d’une baisse très limitée, moins importante qu’entre 2010 et 2011 », défend Jean-Ludovic Silicani.
Une analyse que ne partageront pas forcément tous les acteurs. Dans les détails, seul Iliad/Free affiche une croissance du CA (de plus de 48%) alors que Orange, SFR et Bouygues Telecom reculent de 5%, 7,3% et 9% respectivement, rapporte Silicon.fr.
Le président de l’ARCEP souligne néanmoins que ce recul est à mettre sur le dos de la baisse du coût de la terminaison des appels (TA que se facturent entre eux les opérateurs). Hors ces effets de bords, le chiffre d’affaires global resterait stable (+0,1%). Une stabilité qui, sous cet angle, se renforcera en 2013 puisque le coût des TA sera fixé à 0,8 centime d’euro pour tous les acteurs à partir du 1er juillet 2013.
Mais depuis l’ouverture du marché il y a 15 ans, défend Jean-Ludovic Silicani, le marché a augmenté de 70% en valeur (4% par an en moyenne), 133% en volume tout en affichant une baisse de prix de détails de 25%. Des prix qui alternent périodes de baisses et de stabilité selon les évolutions technologiques ou de marché (dégroupage fixe, arrivée de la 3G, 4e opérateur…). « On peut penser qu’on retrouvera un nouveau plateau de prix moyen en 2013 », avance le régulateur.
Si le chiffre d’affaires des opérateurs recule, le montant des investissements affiche lui un record historique en 2012 à plus de 9 milliards d’euros, selon les premières évaluations à confirmer. Il faut remonter à 2001 pour trouver un tel niveau (9,2 milliards).
Comme en 2001 avec la 3G, les investissements de 2012 ont notamment été portés par l’achat des licences 4G.
Hors licences, les montants investis dépassent les 6,2 milliards, en hausse annuelle de 3,4%. « C’est une très bonne nouvelle et les opérateurs ont annoncé qu’ils maintiendraient ces niveaux d’investissements pour 2013 », souligne Jean-Ludovic Silicani.
Autre sujet polémique, qui fait régulièrement l’objet de chantage de la part des opérateurs : les emplois. « Malgré la conjoncture, ils sont stables chez les opérateurs », assure l’ARCEP. Autour de 129 000 salariés (dont 100 000 environ chez Orange).
L’impact sur les emplois indirects est en revanche plus difficile à estimer. Mais le président de l’ARCEP souligne que le CA des centres d’appel a progressé de 4% en 2012 (sous-entendu, s’il y a licenciements ils ne sont pas dus à un recul économique) et que les licenciements annoncés dans les réseaux de boutiques sont en partis dus à des choix d’internaliser les fonctions chez certains opérateurs.
Il reste néanmoins à regarder l’évolution du côté des équipementiers. Notamment chez Alcatel-Lucent qui a engagé un plan de restructuration mondial qui touchera plus de 1400 emplois en France.
« On est donc très loin d’un marché dynamité », conclut Jean-Ludovic Silicani pour qui « l’arrivée de Free Mobile ne s’est pas traduite par un effet dévastateur ». Il est vrai qu’en comparaison avec d’autres opérateurs historiques européens (-13% pour Telefonica, -5,8% pour Telecom Italia), Orange s’en sort pas trop mal (-4,9%) tout en augmentant ses investissements (+3,5%) alors que Deutsche Telekom les réduits (-2,5%).
« Si l’économie de la France ressemblait à celui des télécoms – avec des investissements en hausse de 6 milliards et des baisses de prix –, les commentateurs ne diraient pas que l’économie française est sinistrée », a martelé Jean-Ludovic Silicani. « Ce secteur peut sortir renforcé des transformations importantes qui sont advenues en 2012. »
Quant au rapport de Bercy, publié dans la presse, ouvrant la voie à une réduction des pouvoirs de l’ARCEP, son président s’en est tenu au discours officiel : « Un document de travail dont le gouvernement ne reprendra pas les propositions. »
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