Tout sur la campagne anti-piratage de Microsoft
Nos confrères de The Register se sont procuré un e-mail dans lequel le responsable de l’équipe anti-piratage de Microsoft France décrit par le menu les actions prévues et celle « de fond » menée « pour faire de la lutte contre le piratage une ’cause nationale' ». Voici une plongée inédite dans la stratégie d’une des branches de la société de Bill Gates. Fort instructif !
La sortie au grand jour de documents réservés à une communication interne est toujours intéressante. Cette fois-ci, il s’agit d’un point sur les actions de l’équipe anti-piratage de Microsoft France, publié par nos confrères britanniques de The Register. Microsoft France reconnaît l’authenticité du document et indique qu’une enquête est en cours pour établir les responsabilités, « tout est envisagé » nous a-t-on assuré, « même l’hypothèse d’un piratage ».
Didactique, la note est organisée en quatre points, « nous répartissons nos actions suivant quatre grands axes » peut-on lire : actions vers les entreprises, action de sensibilisation et / ou de répression du channel (les revendeurs), influence auprès des pouvoirs publics et enfin implémentation de technologies anti-piratage dans les produits Microsoft. Le paragraphe concernant les pouvoirs publics est donc baptisé « influence », entre guillemets. « C’est là où j’ai un problème en me relisant » admet Guillaume Tostain, responsable marketing des programmes de licences de Microsoft France et en charge de l’équipe anti-piratage, en qualifiant le terme « d’anglicisme au sein d’une entreprise américaine » avant d’ajouter « il serait abusif de croire que Microsoft dicte sa loi au gouvernement, ils nous écoutent comme ils écoutent les autres ». Dans son mémo, le responsable de l’équipe anti-piratage note : « La plus belle réalisation du semestre [est] l’engagement de Jospin au Milia, ». Le Premier ministre avait en effet dénoncé le piratage lors du 8ème Marché international de l’édition et des contenus interactifs (voir édition du 13 février 2001).
Quelle « influence » sur le gouvernement ?
Mais ce qui intéresse Microsoft c’est surtout la « campagne gouvernementale » comme il la nomme : « le Premier ministre annonce en début de mois son engagement à mener une campagne nationale d’information sur le piratage… ». On apprend que la branche française de la société de Bill Gates fait partie d’un « groupe de travail » dont le lobbying a produit son effet : « En bref une campagne clé en main est proposée au ministère de l’industrie qui achète (…) en impliquant donc en plus le Ministère de la Culture… puis récemment de l’Education, » note Guillaume Tostain, et un peu plus bas « Modestement nous ne comptabilisons pas : les pages de rédactionnel, les réunions préparatoires, les RDVs ministériels… » Quant au titre « influence » et au fait que le ministère de l’industrie « achète » une campagne, Guillaume Tostain fait son mea culpa, « si je devais réécrire ce mémo je changerais ‘influence’ en ‘action auprès de’ et ‘achète’ en ‘adhère à' ». Le reste, il le garde.
Et le reste nous apprend que Microsoft cherche à être plus informatif. « Nos partenaires manquent d’information » explique le responsable de l’équipe anti-piratage qui justifie le contenu de son mémo et admet « avant on était plus incisifs ». L’accent a donc été mis sur l’audit des parcs informatiques des entreprises, mais pas seulement. En effet, à partir du 15 mars c’est une nouvelle phase qui débute auprès de « 100 000 PME-PMI de 20 à 200 salariés ». Les moyens pour amener les entreprises à régulariser leur situation : « une pression progressive, soit deux lettres puis un contact ‘telesales’, avec un message de plus en plus directif, mais non agressif ». Les entreprises savent à quoi se préparer ! La Business software alliance » (BSA) a souvent employé des pratiques contestées (voir l’enquête SVM Mac « BSA l’épouvantail des pirates). La consigne est donc : pas de vagues avant la « campagne gouvernementale télévisée à l’automne », il est vrai que cela ferait désordre !