Trainline : ce pavillon sous lequel Captain Train a changé
L’activité et l’équipe de Capitaine Train ont évolué depuis l’intégration dans Trainline. Dans quelle direction ? Focus à l’occasion d’un afterwork.
Que devient l’équipe de la start-up française Captain Train (ex-Capitaine Train) après son acquisition par son homologue britannique Trainline survenue en mars 2016 ?
ITespresso.fr a accepté l’invitation d’un afterwork organisé mardi soir pour faire le point.
Le temps réel est sur les rails
Le grand concurrent Voyages-SNCF.com a ses « feature teams » ; Trainline, ses « clusters ».
L’un et l’autre terme font référence à une organisation interne au travers de laquelle chacune des deux sociétés dit avoir trouvé une « nouvelle agilité ».
Chez la filiale du groupe SNCF, la démarche a consisté à créer des équipes fonctionnant comme des start-up.
Responsables des différentes parties du portail de distribution de billets, elles réunissent des profils allant du designer UX au responsable de la création interactive en passant par l’ingénieur d’études et développement.
Cette transversalité, on la retrouve dans les bureaux français de Trainline. Elle s’illustre, entre autres, par l’initiative « Everybody on support », dans le cadre de laquelle les employés se mettent, une demi-journée par mois, dans la peau d’un chargé du service client.
Carl Anderson le reconnaît : l’exercice a ses limites et certaines demandes sont finalement transmises à la « WOW team », du surnom donné aux collaborateurs dont c’est la fonction première.
Fraîchement recruté (il est arrivé au mois de mai en provenance de Deezer), le responsable technique Europe de Trainline affirme néanmoins en tirer le bénéfice d’être au plus près de l’expérience client.
Cet aspect stratégique est piloté, depuis bientôt un an, par Vincent Degove.
En novembre dernier, lors d’une rencontre organisée dans les locaux du Partech Shaker, l’intéressé avait résumé l’approche de Trainline : rendre le client « le plus autonome possible par le produit ».
Un objectif qu’il avait justifié par « des marges très faibles » et par là même l’impossibilité de « parler en one-to-one avec la majorité [des] clients ».
Du côté des collaborateurs de Trainline France présents ce mardi à l’occasion de ce point presse, on a tenu à relativiser ces propos rapportés par le média Petit Web.
Mais l’heure était surtout à l’annonce d’une nouveauté : l’intégration, dans les applications mobiles pour iOS et Android, de l’information en temps réel sur les trains SNCF.
En l’occurrence, les TGV, les TER et les Intercités, ainsi que les Thalys et les Eurostar – uniquement au départ de la France dans les deux cas.
Le poids de la technique
La jonction n’est pas encore établie avec les 85 autres transporteurs dont Trainline commercialise les billets à l’échelle de 24 pays en Europe. Et ce n’est pas si évident, à en croire Daniel Beutler.
Le directeur général de Trainline International mesure le défi qu’a représenté l’intégration de deux API (connecteurs logicielles).
Un poste de supervision globale qu’il cumule avec ses fonctions de directeur des opérations de Captain Train prises avant l’acquisition de la start-up française par la société britannique.
D’un côté, celle développée par les équipes back-end de Trainline pour le parcours de réservation ; de l’autre, celle de la SNCF pour l’info trafic.
Trainline détaille parfois, sur son blog alimenté par de nombreux employés, les problématiques techniques rencontrées.
Exemple l’an dernier, lorsque la compagnie nationale ferroviaire avait mis à jour son système tarifaire destiné à déterminer les prix des billets.
L’équilibre des effectifs s’en ressent : sur les quelque 500 personnes qui travaillent pour Trainline, plus de la moitié sont impliquées sur la partie technique, entre Londres, Paris et Edimbourg.
Structurer les forces
Depuis l’abandon, à la rentrée 2016, de la marque « Captain Train » au profit de « Trainline », les recrutements se sont succédé à des postes-clés.
Dick Wissink, vétéran du secteur des voyages (KLM, Opodo, Carlson Wagonlit Travel), avait pris, en septembre 2016, la direction des ventes BtoB pour l’Europe. À l’époque, Trainline déclarait que près d’un tiers de ses clients étaient des utilisateurs professionnels.
Début 2017, Mark Brooker, ancien responsable de Betfair (sites de paris en ligne), a été nommé à un poste nouvellement créé de COO (Chief operational Officer), responsable à la fois du marketing, du produit et du groupe Trainline.
En France, le printemps a été marqué par l’arrivée de Jean-Gabriel Audebert-Lasrochas en tant que directeur des affaires publiques.
L’une des missions de cet ancien collaborateur parlementaire et conseiller politique consiste à « œuvrer en faveur d’un cadre réglementaire […] clair, stable, équitable et loyal » pour la distribution de billets de train.
La liste des embauches s’est officiellement allongée ce mercredi avec Audrey Détrie (ex-SFR, PriceMinister et M6 Web), nommée responsable pour la France et le Benelux.
Que devient, dans ces changements, Jean-Daniel Guyot ? Le cofondateur de Capitaine Train a pris du recul sur l’opérationnel, mais reste, nous assure-t-on, président de Trainline International.
Quand bien même l’entrepreneur a lancé TrustBK, un nouveau projet de banque pour les petites et moyennes entreprises.
Se rapprocher des voyageurs
L’agrandissement des effectifs coïncide avec la croissance des ventes : Trainline revendique, sur les douze derniers mois, un volume d’affaires de 2,7 milliards d’euros, pour une moyenne de 125 000 billets écoulés par jour sur la période du 1er mars 2016 au 28 février 2017.
Des données à comparer avec celles fournies pour l’année 2015 : 72 millions d’euros de volume d’affaires pour 5 000 billets par jour.
Sur les 45 millions de visites mensuelles que Trainline revendique sur ses sites et ses applications, 77 % du trafic se fait sur mobile, selon les relevés effectués entre janvier et mars 2017. La volonté de devenir un « compagnon de voyage » est d’autant plus grande.
L’association, en une seule application, de la réservation et du suivi en temps réel y contribue. En revanche, pour ce qui est des chatbots, on repassera.
Carl Anderson ne néglige pas le potentiel de ces agents conversationnels dont il anticipe un développement multiplateforme à l’instar des applications, mais admet que le chantier n’est pas prioritaire.
Pas non plus d’intention d’élargir l’offre aux avions, aux hôtels ou encore aux loisirs comme a pu le faire Voyages-SNCF.com.
Trainline se concentre sur le rail et fait valoir son indépendance vis-à-vis des transporteurs, non sans mentionner le marché italien, sur lequel de nombreux acteurs se sont établis avec, dès 1997, l’ouverture à la concurrence des lignes régionales.
Mais on ne vit pas dans le même monde.
En photo d’illustration : Audrey Détrie et Daniel Beutler