Selon une étude du cabinet GFK, et sur la base de l’offre décrite par Xavier Niel devant les médias, 8 Français sur 10 ont l’intention, à court ou moyen terme, de souscrire à l’offre de téléphonie mobile de Free.
Mais comment s’y prend Free pour monter son offre illimitée à 19,99 euros par mois (15,99 euros pour les abonnés ADSL Free) et son forfait 60 minutes et 60 SMS pour 2 euros par mois (pour les abonnés ADSL Free) ?
Quelles seront les incidences cette nouvelle offre sur le marché des télécommunications en France ?
Et que se passera-t-il si les Français interrogés confirment par des actes leurs intentions de basculer chez Free mobile ?
Free Mobile est financé par ses concurrents via la terminaison d’appel
Free Mobile compte d’abord sur le prix de la terminaison d’appel dont il va bénéficier pendant sa période de lancement.
Qu’est-ce que la terminaison d’appel ? Lorsque l’abonné d’un opérateur A appelle un abonné chez un opérateur B, l’opérateur B facture à l’opérateur A des frais d’interconnexion (ou terminaison d’appel).
Or, jusqu’au 31 décembre 2013, Free Mobile pourra facturer la terminaison d’appel plus cher que ses concurrents, selon une décision de l’ARCEP mise en consultation jusqu’au 27 janvier.
Pendant les 6 premiers mois, Free Mobile pourra facturer 2,4 centimes d’euro par minute pour la terminaison d’appel, soit 0,9 centime de plus que ses concurrents (Free comptait sur un tarif plus généreux en sa faveur, de 3,4 centimes d’euro par minute).
Pour une 1 heure de conversation mobile par jour, répartie à 50/50 entre les appels entrants (provenant d’un autre opérateur que Free mobile) et les appels sortants, un abonné Free Mobile permettra ainsi à son opérateur de gagner 4,32 euros HT par mois (8 heures, soit 480 minutes x 0,9 centime d’euro), financés par les autres opérateurs, sur décision du régulateur.
La prétendue « concurrence libre et non faussée » impose en effet aux opérateurs en place de financer l’installation de leurs concurrents.
Cette faveur n’est cependant pas définitive, et la terminaison d’appel progressivement ramenée au tarif commun pourra obliger Free mobile à revoir ses tarifs dans le futur.
Mais si tous les clients passent à Free Mobile, le système ne marche plus, et c’est bien pourquoi l’offre Free mobile est limitée à 3 millions de clients.
Officiellement, Free Mobile couvre à ce jour que 27 % de la population avec son propre réseau (source ARCEP), le reste de son trafic étant assuré par le réseau d’Orange, avec lequel il a signé un accord d’itinérance.
Ses investissements dans le réseau sont donc moindres que ceux des autres opérateurs.
Le réseau Free mobile est-il réellement activé ?
La polémique gronde depuis deux jours, et les équipes techniques d’Orange s’interrogent : le réseau de Free Mobile, supposé écouler 27 % des communications, ne serait pas activé, au moins pas dans son intégralité.
L’essentiel du trafic est donc écoulé par le réseau d’Orange, mais pas dans des proportions conformes à celles prévues par l’ARCEP lors de l’attribution de la licence 3G.
Free a-t-il abusé l’ARCEP lors des tests de couverture ? Il est vrai qu’il existe des techniques pour ouvrir un réseau en couverture, mais sans avoir la capacité à écouler le trafic…
Et quelle est alors la justification du différentiel de terminaison d’appel en faveur de Free mobile ?
Le nouvel entrant pourrait facturer à ses concurrents, y compris Orange, 0,9 centime par minute de plus au titre de la terminaison d’appel… rendue par le réseau d’Orange ?
La décision mise en consultation par l’ARCEP, qui offre le même avantage à deux « full MVNO », Lycamobile (sur le réseau Bouygues Telecom) et Oméa Telecom (sur le réseau de SFR), semble faire fi des investissements dans le réseau pour accorder des avantages tarifaires.
Pourtant, les investissements nécessaires sont conséquents. Le profit moyen net après impôts des 3 opérateurs mobiles en place est de 8% du chiffre d’affaires.
Sur une facture moyenne mensuelle mobile de 24 euros (source ARCEP), il reste donc à l’opérateur 1,92 euro par mois et par abonné pour financer les investissements futurs et rémunérer les actionnaires.
En parallèle, le niveau de CAPEX (investissements corporels, hors licences ) pour le développement et le renouvellement des réseaux mobiles en France s’élève, pour France Telecom-Orange, à 11% du chiffre d’affaires en 2010 [voir doc France Telecom en fichier Excel].
C’est ce que Xavier Niel appelle « presser le citron » ! Mais en l’occurrence, on peut se demander qui le presse ?
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