Le Président de la République avait annoncé le 29 avril 2013, à l’occasion des Assises de l’Entrepreneuriat, l’établissement d’un cadre juridique sécurisé pour le développement de la finance participative en France.
Fleur Pellerin a organisé, à Bercy, les Assises de la Finance Participative, et le Gouvernement a dans la foulée fait état de propositions précises pour rattraper le retard français en matière de crowdfunding, et en faire un axe fort de la relance économique.
Pour Charles Egly et Geoffroy Guigou, co-fondateurs de Pret d’Union, c’est une excellente nouvelle que le sujet soit désormais à l’agenda des gouvernants.
Le crowdfunding est une nouvelle façon pour les ménages, les entreprises, les entrepreneurs ou les créateurs de faire financer leur projet, via internet, en faisant appel à d’autres internautes.
Il revêt différentes formes : financement par le don (micro-crédit principalement, pour des porteurs de projets dans des pays en développement mais aussi en France), financement par le prêt (prêt à des particuliers, à des entreprises), financement en capital (pour des entreprises de toute taille).
Ces modèles connaissent un développement fulgurant dans tous les pays. Google ne s’y est pas trompé, en investissant cet été 125 millions de dollars dans la première plateforme de crédit entre particuliers aux Etats-Unis.
Il est sain et nécessaire que le crowdfunding soit une activité qui demeure encadrée et réglementée. Le cadre réglementaire applicable doit cependant être clarifié pour deux raisons.
D’une part, pour simplifier les démarches de nouveaux entrants et leur permettre un gain de temps vital dans le lancement de leur projet (le leader français de la finance participative avait en effet travaillé pendant un an pour définir le meilleur modèle juridique et réglementaire pour lancer son offre, puis deux ans à en ajuster et à en faire valider les contours par la Banque de France !) ; d’autre part, pour protéger les clientèles d’emprunteurs et d’investisseurs.
Notons qu’au Royaume-Uni, pays où la réglementation sur le crédit est la plus souple (bien plus qu’aux Etats-Unis), les acteurs de crédit entre particuliers – notamment ZOPA – demandent depuis plusieurs années qu’un cadre réglementaire soit défini et s’applique à eux, afin d’apporter la garantie aux emprunteurs et aux investisseurs que leur modèle a bien été « validé » et est conforme aux bonnes pratiques de la réglementation bancaire (lutte anti-blanchiment, contrôle interne, contrôle des risques).
L’absence de réglementation est un frein à leur développement commercial.
De quelle façon doit alors évoluer la réglementation pour accompagner le développement du crowdfunding ? Notre point de vue est qu’il faut d’abord faire urgemment évoluer le type d’investisseurs-prêteurs éligibles.
Pour de nombreuses plateformes, la réglementation limite aujourd’hui la clientèle ciblée à des « investisseurs qualifiés/professionnels », c’est-à-dire ayant une expérience professionnelle dans le secteur financier, ou ayant une pratique très active de boursicotage ou encore ayant un patrimoine financier supérieur à 500 000 euros !
Aux Etats-Unis, les critères définissant un investisseur qualifié/professionnel sont beaucoup plus souples.
Il est extrêmement choquant de constater que l’achat d’une action en bourse soit ouvert à 100% des ménages, alors que les actions comportent un risque de perte totale en capital et que leur achat est souvent spéculatif (on achète pour revendre ses titres avec une plus-value, les titres sont parfois ceux de sociétés étrangères) ; et qu’a contrario, un produit comme ceux proposés par de nombreuses plateformes de financement participatif, de nature obligataire et qui finance directement l’économie réelle française soit limité à un profil très spécifique et très limité d’investisseurs.
Par ailleurs, nous proposons que l’Etat accompagne activement le développement des plateformes de crowdfunding en plaçant une partie de sa trésorerie, en tant qu’ « investisseur-prêteur » sur les plateformes de crowdfunding qui répondront à certains critères (agrément dûment obtenu auprès de l’ACP et ou de l’AMF, production de prêts réalisées supérieure à un certain montant, etc.).
Il s’agit bien de placement de trésorerie directement sur les plateformes, et non d’investissement au capital de ces plateformes, qui sont souvent des jeunes entreprises.
Au Royaume-Uni, le gouvernement a décidé récemment de mettre 100 Millions de Livres à disposition des acteurs de crowdfunding sous cette forme de « placement direct ».
Dans le cadre de ce programme « Business Finance Partnership » initié par le Ministère « Business, Innovation and Skills », 7 plateformes ont déjà été sélectionnées (4 en décembre 2012 pour un investissement total de 55 Millions de Livres, et 3 en mars 2013 pour un investissement total de 32 Millions de Livres).
Les plateformes de crowdfunding retenues sont spécialisées dans le financement des ménages, des TPE et des PME.
Le crowdfunding a vocation à remplacer des pans entiers du système bancaire.
Il répond en effet aux attentes fondamentales des emprunteurs (transparence de l’épargne, et utilisation au service de l’économie réelle), et des porteurs de projets qu’ils soient particuliers ou professionnels (simplicité des produits de crédits proposés, et surtout taux inférieurs à ceux pratiqués par les banques).
Avec une réglementation adaptée, sa croissance ne pourra en être que plus rapide.
C’est un Français, Michel Barnier, qui a pris la main à Bruxelles sur le sujet du financement participatif.
Ceci est pour nous de bonne augure, et montre que, dans ce domaine, la France peut s’affirmer comme la locomotive de l’Europe.
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Crédit photo : Shutterstock.com – Copyright: Olivier Le Moal
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