En novembre 2016, Vivendi détenait environ un quart des actions de Telecom Italia, ce qui, en tant qu’actionnaire principal, lui offrait déjà un large champ de manœuvre au sein de la société italienne.
Mais Vivendi n’entend pas s’arrêter là. En effet, à l’annonce du renouvellement du conseil d’administration de Telecom Italia lors de l’assemblée générale du 4 mai 2017, la multinationale française a proposé dix candidats, dont Arnaud de Puyfontaine, le président de son directoire.
Elle demande également une réduction du nombre de sièges au conseil d’administration (pour passer de seize membres actuellement à quinze).
Si ses dix candidats sont retenus, elle contrôlera de facto Telecom Italia. Anticipant cette nomination, qui exige pourtant l’approbation d’une majorité des actionnaires de l’opérateur télécoms, Vivendi a d’ores et déjà notifié à la Commission européenne cette situation à venir.
Cette « prise de pouvoir » porte la signature de Vincent Bolloré, actionnaire principal de Vivendi avec 20% du capital.
L’homme est coutumier de ce type d’opération, qualifiée par certains de « prise de contrôle rampante », qui lui permet de contrôler une société cible, sans avoir recours à une offre publique d’achat (OPA).
Il a d’ailleurs déjà eu l’occasion de la pratiquer sur des sociétés telles qu’Ubisoft, Vivendi, Havas (en 2005) et Gameloft sur laquelle le géant des médias a finalement lancé une OPA.
En asseyant sa position au sein de Telecom Italia, le groupe français renforce son influence sur le marché italien et plus largement en Europe.
Mais il devra faire face à un concurrent français sur le marché italien des télécoms, puisqu’Iliad (Free) s’apprête à tenter une percée, en lançant des offres mobiles à bas prix. Objectif : atteindre les 15 % de parts de marché.
Dès lors, afin de sécuriser sa position, le groupe de Vincent Bolloré devra soutenir fermement Telecom Italia. Ce marché deviendra-t-il un terrain d’affrontement entre les deux importants concurrents français ? L’avenir nous le dira.
Cependant, cette prise de contrôle aura eu une répercussion importante s’agissant de la participation de Vivendi au sein du capital du groupe média italien Mediaset.
En effet, l’autorité italienne de tutelle des télécommunications (Agcom) a rendu une décision le 18 avril 2017 sur la position de Vivendi au capital de Telecom Italia et Mediaset.
Elle avait été saisie par Mediaset en décembre 2016 et a finalement décidé que la prise de participation dans ces deux sociétés n’est pas légale au regard des règles du droit de la concurrence italien.
Celles-ci interdisent aux entreprises de détenir des participations trop importantes à la fois dans les secteurs des télécommunications et des médias.
Or, le groupe français est le premier actionnaire de Telecom Italia et le deuxième actionnaire de Mediaset, dont les parts de marché en Italie sont respectivement de 44,7 % et de 13,3 %, qui dépassent les seuils cumulés autorisés (respectivement 40% et 10% selon l’Agcom).
En conclusion, Vivendi doit maintenant présenter un « plan d’action » d’ici soixante jours auprès de l’Agcom et dispose d’un an pour réduire soit sa participation au sein de Mediaset, soit celle dans Telecom Italia.
D’un point de vue stratégique, le groupe français pourrait décider de se recentrer sur Telecom Italia, où des synergies restent à réaliser et ainsi entrer en concurrence avec les futures offres de Free en Italie.
Une tribune de Frédéric Ichay, avocat associé du cabinet Pinsent Masons
(Crédit photo une : @Vivendi – archives photos)
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