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Uber freiné sur le covoiturage en France

Après s’être imposé comme la locomotive du marché des voitures de tourisme avec chauffeur (VTC), la société Internet californienne Uber lançait, le 5 février 2014, la déclinaison française de son offre UberPOP, présentée comme un service de covoiturage.

Déjà disponible dans une quinzaine de villes des Etats-Unis, UberPOP était déployé à Paris avec l’objectif de favoriser la mise en relation de particuliers dans le cadre de trajets de courte distance. Toute personne majeure disposant d’un permis de conduire depuis plus de trois ans et d’un casier judiciaire vierge allait pouvoir s’improviser chauffeur pour le compte de tiers.

L’Union Nationale des Chauffeurs Courtois (UNCC) n’avait pas tardé à monter au créneau, soulevant « des problèmes évidents d’assurance et de travail dissimulé » liés au statut même de particuliers « pseudo-chauffeurs de taxi ». L’enquête lancée en conséquence par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) avait mené, fin avril, à la saisine du procureur de la République de Paris.

L’Union nationale des taxis et la Chambre syndicale des loueurs d’automobiles, qui s’étaient constituées parties civiles pour dénoncer des « pratiques commerciales trompeuses », viennent d’obtenir gain de cause. Dans une décision rendue ce jeudi 16 octobre, le tribunal correctionnel de Paris confirme les 100 000 euros d’amende requis au mois de juillet contre la filiale française d’Uber, coupable d’avoir « sciemment » assimilé à du « covoiturage » ce qui serait en fait une « offre payante de transport entre particuliers ».

Les juges de la 31e chambre correctionnelle estiment que le système de tarification (au kilomètre parcouru et au temps écoulé, avec un prix minimum) ne saurait s’apparenter à un partage de frais, mais bien au paiement d’une course. Ils pointent également de doigt le « complément de revenus pour les personnes déjà en activité » mentionné par Uber dans la description de son service. Une proposition de valeur jugée non conforme à l’arrêt rendu en mars 2013 par la Cour de cassation et selon lequel le covoiturage ne peut donner lieu à une rémunération « au-delà des frais induits par l’utilisation [du véhicule] ».

Selon Thibault Simphal, principal dirigeant d’Uber France, l’offre UberPOP est avant tout conçue pour « aider les particuliers à amortir le coût d’achat et d’entretien de leur véhicule« . Et elle n’entre pas en concurrence avec les services comme Blablacar, « spécialisés dans les trajets longue distance ». Problème : les chauffeurs, bien que « sélectionnés à la suite d’un processus rigoureux », ne sont pas des professionnels titulaires d’une licence, au contraire de ceux retenus des autres offres d’Uber. Un élément que les magistrats ont également pris en compte pour qualifier une prestation « dont les conditions d’exercice faisaient qu’elle était dès l’origine illégale » au regard de la législation française sur le transport routier de particuliers.

Dans l’état actuel, Uber est tenu de publier cette décision de justice sur ses deux sites Web français en précisant que les utilisateurs d’UberPOP s’exposent eux-mêmes à une condamnation pénale. Mais la société, aujourd’hui présente dans 45 pays et plus de 200 villes, a déjà annoncé son intention de faire appel… et de poursuivre, en France, l’activité incriminée.

Les frictions persistent avec les compagnies traditionnelles de taxis et les chauffeurs indépendants, qui perçoivent le business d’Uber comme une forme de concurrence déloyale. Joint par Le Monde, Gilles Boulin, directeur de Gescop (groupement coopératif qui fédère environ 1200 chauffeurs de taxi), se félicite de la sanction infligée à Uber. Se référant à la loi Thévenoud promulguée le 2 octobre 2014, il ajoute : « Dommage qu’elle ne soit pas encore en vigueur, l’amende aurait pu être encore plus importante« .

UberPOP pose également des problèmes en Allemagne. Début septembre, Uber a été sommé de stopper cette activité. En cas d’infraction constatée, le montant de l’amende peut atteindre 250 000 euros, avec une résiliation des contrats d’assurance des particuliers qui tenteraient de passer outre l’interdiction judiciaire.

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