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Unilend : 2 ans de crowdlending et un modèle à développer

Plus de 200 projets financés avec succès, 16 millions d’euros investis et un taux de rendement net global de 5,37 % : au premier abord, la machine Unilend est bien rodée après deux ans d’activité.

C’est en s’entretenant avec Gilles le partenaire technique, Vincent l’ancien stagiaire ou encore Pierre l’investisseur, qu’on constate le chemin qu’il reste à parcourir pour la plate-forme, figure de proue en France sur le segment du crowdlending (financement participatif de prêts aux TPE/PME).

Toute cette communauté était conviée lundi soir dans la grande salle du Hub Bpifrance à Paris.

Unilend y faisait le point sur l’évolution de son offre… et sur l’agrandissement de ses équipes, qui se sont féminisées avec, en tête de liste, la directrice générale déléguée Sabine Fillias, arrivée en septembre dernier en provenance du groupe Rothschild, où elle avait contribué à la mise en place de l’activité levées de fonds pour les entreprises technologiques en forte croissance.

Le transfert n’est pas anodin : la première opération supervisée par Sabine Fillias chez Rothschild fut précisément l’augmentation de capital de 8 millions d’euros bouclée par Unilend en mars 2015, avec la participation de Ventech, du fonds franco-italien 360 Capital Partners et de Bpifrance.

Un club select

En l’état actuel, la plate-forme agréée par l’ORIAS (association rattachée à la Direction générale du Trésor) sous le statut d’Intermédiaire en financement participatif n’est toujours pas rentable. Mais avec 9,5 millions d’euros levés en capitaux propres, elle s’est assuré un matelas.

Elle dispose d’un autre atout : son cofondateur et directeur général Nicolas Lesur est président de l’association professionnelle Financement participatif France, impliquée au plus près des pouvoirs publics sur les évolutions réglementaires dans le domaine du crowdfunding.

Unilend fait également valoir son processus de sélection des TPE/PME désireuses d’emprunter de l’argent pour financer leur développement. Environ 2 % des projets déposés sont effectivement exposés aux prêteurs – personnes physiques ou morales.

Et quand on suggère à l’équipe qu’il pourrait être tentant d’élargir la sélection au regard de la concurrence sur le marché du crowdlending, on nous répond tout net : « On constate plutôt ce phénomène sur d’autres plates-formes, où rebondissent des projets que nous n’avons pas sélectionnés ».

Ce processus s’effectue en deux étapes. Dans un premier temps, un test d’éligibilité est réalisé en partenariat avec Altares (membre du réseau Dun & Bradstreet, spécialiste de l’information sur les entreprises).

« Seules les entreprises dont les derniers comptes disponibles font état d’un excédent brut d’exploitation positif et de fonds propres positifs sont admises à déposer leur projet », peut-on lire sur le site Web d’Unilend.

Évaluer les risques

Le positionnement de la plate-forme au sein de la chaîne de financement se reflète dans ce processus de sélection qui suppose, pour les entreprises admises, un examen plus approfondi par un comité d’analyse des risques à la tête duquel on trouve Alain Elkaim, qui dispose d’une vingtaine d’années d’expérience dans la finance.

Cet examen se traduit par l’attribution d’une note aux entreprises en fonction de leur profil de risque.

Les prêteurs intéressés ont alors accès à la campagne de financement avec les détails du projet et l’état des comptes financiers. Ils peuvent définir le montant qu’ils souhaitent investir, puis fixer un taux d’intérêt.

À l’issue de la période de souscription, seules les offres les plus favorables (c’est-à-dire présentant les taux d’intérêt les plus bas dans une fourchette autorisée de 4 à 10 %) sont retenues.

Unilend organise et diffuse les contrats de prêts, assure la gestion des flux financiers et prélève une commission lors du versement des fonds ; en l’occurrence, 4 % de la somme réunie, auxquels s’ajoute 1 % par du capital restant dû sur les remboursements mensuels des emprunteurs.

Le montant des emprunts peut s’échelonner de 10 000 à 500 000 euros (un plafond qui pourrait un jour être relevé, sachant que le cadre réglementaire autorise des levées jusqu’à 1 million d’euros), sur une durée de 3 mois à 5 ans. Les intérêts et le capital sont remboursés par mensualités, déduction faite des prélèvements sociaux et fiscaux obligatoires.

Répartir le capital

Si l’on se fie aux témoignages des prêteurs présents ce lundi soir, le message est passé : il faut « diversifier le risque ». En d’autres termes, investir dans beaucoup de projets pour bénéficier d’un meilleur taux de rendement.

Unilend a ses statistiques en la matière : si 94 % des prêteurs « ont un taux de rendement positif », ceux qui ont prêté à au moins 69 projets sont 100 % dans ce cas.

La possibilité d’investir des tickets à partir de 20 euros facilite cette répartition du capital… qu’il faut néanmoins s’assurer de pouvoir immobiliser : se constituer un portefeuille de projets suffisamment large prend au moins 6 mois, si l’on en croit les retours glanés çà et là.

Un certain nombre de recommandations ont été mises en place pour guider les prêteurs dans la prise en compte d’éléments comme l’inflation (perte de la valeur de la monnaie à travers le temps), les impôts… et le risque d’impayé.

Sur ce dernier point, difficile d’éclipser l’affaire Smok-It, du nom de cette société placée en redressement judiciaire peu après avoir levé des fonds sur Unilend. Quand on y fait référence, les principaux intéressés ont tendance à changer de conversation, se contentant d’affirmer que « l’aide qui peut être apportée aux prêteurs en la matière est réglementairement limitée »…

Se prendre au jeu

À la louche, toujours en fonction des retours des participants, le prêteur « moyen » consacre environ 10 % de son épargne au crowdlending.

Du retraité de la fonction publique au conseiller en patrimoine, les profils sont très variés. Les comportements le sont tout autant : alors que certains vont se fixer sur un taux d’intérêt donné et se positionner dès le début des campagnes, d’autres vont fonctionner comme ils le feraient sur des sites d’enchères, en « snipant » au dernier moment.

« À ce petit jeu, ça descend parfois très bas. À tel point qu’on se demande si c’est encore rentable une fois déduits tous les impôts », nous confie-t-on dans l’assistance. Mais globalement, on reconnaît qu’avec un taux moyen net de 5,36 % (et certains projets à 8 ou 9 %), ledit jeu en vaut la chandelle par rapport à de nombreux produits d’épargne.

Dans l’absolu, les particuliers prennent là un risque que les banques n’assumeraient pas, tout particulièrement face à des entreprises ayant des besoins immatériels, typiquement associés à la transformation numérique (5 % des projets). Quoique l’une d’entre elles a fait la jonction avec Unilend : Groupama Banque s’est engagé à verser, sur 4 ans, 100 millions d’euros.

Financement express ?

Bien que la plate-forme ne soit pas positionnée sur le même segment qu’un Kickstarter (crowdfunding sous forme de don avec contreparties), les tendances sont les mêmes en termes d’activité : ça bouge en début et en fin de campagne, avec un creux dans l’intervalle.

C’est ce qui s’est produit avec le traiteur Histoire des Sens, qui a financé, auprès de 328 prêteurs en juin 2015, l’acquisition d’un second véhicule et de matériel de réception.

La clé pour ces emprunteurs, c’est l’accès rapide au financement, dans un délai moyen de 2 semaines, grâce à la dématérialisation intégrale des processus. En outre, il n’y a pas de prise de garanties, d’affectation formelle du crédit et de contreparties telles que la domiciliation des flux.

Pour les prêteurs, il faut être patient : pour le moment, sur l’ensemble des sommes prêtées, 3,272 millions d’euros ont été remboursés en capital, montant auquel s’ajoute 1,094 million d’euros en intérêts bruts.

Vers l’Italie

Au-delà de cette plus-value financière, il faut considérer l’impact sur l’économie : Unilend évoque « 106 emplois créés » par les projets financés sur sa plate-forme.

Des passerelles s’établissent par ailleurs vis-à-vis des circuits de financement traditionnels. Illustration avec la SAS Artlices (groupe SIFRA), localisée à Saint-Tropez et qui exploite une galerie d’art contemporain : elle a levé 400 000 euros sur Unilend auprès de 1 323 tout en obtenant, en parallèle, la même somme auprès de banques.

Avec une communauté de 26 258 membres pour 8 413 prêteurs « actifs » dont la moitié âgés de moins de 36 ans, Unilend promet « beaucoup de surprises » pour 2016, mais n’entre pas dans les détails.

Tout au plus est-il question du lancement, dans quelques semaines, d’un outil d’aide à la répartition des prêts pour les prêteurs. Puis d’une expansion en Italie, pays où le tissu entrepreneurial et la relation avec les banques « sont similaires à ce que l’on connaît en France ».

Pour développer sa visibilité, Unilend ne va pas jusqu’au media for equity, comme le concurrent Lendopolis a pu le faire avec Les Échos (le pôle média du groupe LVMH a pris une part au capital de la plate-forme en échange d’espaces publicitaires). Un partenariat a en revanche été monté avec Le Figaro sur des contenus sponsorisés.

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