Serons-nous tous fichés dans la société à l’ère numérique ?
Au-delà du syndrome Big Brother, une proposition de loi contre l’usurpation d’identité (numérique en particulier) laisse planer un doute.
Mercredi soir, l’Assemblée nationale a adopté une nouvelle mouture mais, au nom de la navette parlementaire, le texte doit repartir pour une nouvelle lecture au Sénat et il reviendra ensuite à l’Assemblée en vue d’une adoption définitive.
La proposition de loi vise notamment à instaurer une carte d’identité numérique à la française, après le déploiement du passeport biométrique.
La nouvelle pièce d’identité devrait comporter deux puces. L’une contiendrait des éléments civils (état civil, adresse, taille, couleur des yeux, empreintes digitales, photographie).
L’autre serait facultative et elle aurait vocation à faciliter les démarches administratives et commerciales via Internet (à travers un système de signature électronique).
Mais ce texte provoque des discordes entre l’Assemblée nationale et le Sénat.
L’une des principales polémiques porte sur l’instauration d’un fichier centralisé associé à la future carte d’identité nouvelle génération.
L’AFP tente de synthétiser les deux approches divergentes : l’Assemblée nationale prône plutôt un « lien fort » (les données recueillies sur le terrain peuvent être mises en correspondance avec celles d’un seul individu du fichier).
Tandis que le Sénat défend plutôt l’approche du « lien faible » (à une empreinte d’un individu correspond non une seule identité mais un ensemble d’identités).
La première vision est soutenue par le ministre de l’Intérieur Claude Guéant car elle garantirait « une réelle protection de l’identité » : « Le fichier à lien faible permet de déterminer l’existence d’une fraude, mais pourquoi se priver de la possibilité d’identifier à coup sûr l’usurpateur ? [via le lien fort, ndlr] »
Une différence de point de vues qui n’est pas sans rappeler les réticences exprimées par la CNIL.
Le sujet demeure crucial puisque le fichier centralisé des données d’état civil et concernera tout le monde.
La question de son architecture doit donc être examinée avec soin pour éviter la création d’un fichier de police à l’échelle de la population française.
Pour railler cette initiative, les détracteurs du texte l’ont baptisé « fichier des gens honnêtes » en référence à une chanson de George Brassens.
A l’origine, la proposition de loi avait été déposé en juillet 2010 par les sénateurs Jean-René Lecerf et Michel Houel (de bord UMP) pour assurer « une fiabilité maximale aux passeports et aux cartes nationales d’identité, afin de lutter contre les délits liés à l’usurpation d’identité et à la fraude documentaire ».
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