Après trois mois de surenchère, l’opérateur mobile britannique Vodafone est parvenu à s’offrir l’allemand Mannesmann, pour devenir un géant mondial fort de 42 millions de clients. Même si, à l’heure où nous écrivons ces lignes, le conseil de surveillance de Mannesmann n’a pas encore annoncé officiellement son accord, les dirigeants des deux sociétés ont indiqué que la fusion était en bonne voie.
Pour parvenir à ses fins, le patron de Vodafone, Chris Gent, aura été contraint de renouveler l’offre publique d’échange (OPE) pour valoriser aujourd’hui l’action Mannessmann à plus de 350 euros. Chiffrée à environ 180 milliards d’euros, la fusion a été en partie provoquée par l’annonce du rapprochement Vodafone-Vivendi (voir édition du 31 janvier 2000). En perdant toute chance de soutien de la part du groupe de Jean-Marie Messier, seul allié susceptible de contrecarrer l’offre de Vodafone, Mannesmann ne pouvait plus guère trouver d’argument convaincant à l’adresse de ses actionnaires. Ces derniers obtiennent une participation minoritaire (49,5 %) dans le nouveau géant des télécoms.
Présent sur tous les continents et propulsé numéro un en Europe, Vodafone-Mannesmann devra abandonner le troisième opérateur mobile britannique Orange, actuellement détenu par le groupe allemand, pour ne pas fausser la concurrence outre-Manche. La Commission européenne et l’autorité de régulation des télécoms national Oftel surveilleront la vente de la société, lorgnée par France Télécom. Mais alors que chacun évoque l’intérêt financier des actionnaires, on s’étend rarement sur les répercussions pour les consommateurs.
Quels seront les choix qui prévaudront en matière de services sans fil ? D’un point de vue pessimiste, il est possible que, pour rentabiliser leurs réseaux GSM, les opérateurs freinent le déploiement des services de troisième génération UMTS, synonyme d’Internet mobile à haut débit. L’alternative GPRS est déjà en préparation en Europe (et en France) mais n’apportera courant 2000 que des débits de quelques dizaines de Kbits/s (voir édition du 2 février 2000). Affichant l’image du pragmatisme, la filiale Orange de Mannesmann a préféré se tourner vers une technologie directement exploitable, le HSCSD. C’est plus lent, avec un débit maximal proposé à 28 Kbits/s, mais les investissements pour l’opérateur sont réduits. D’autres opérateurs, comme France Télécom ou BT, ont mis de côté cette solution pour privilégier le GPRS.
Comme dans la plupart des cas de concentration de sociétés, la force commerciale du nouveau groupe risque surtout de freiner la concurrence, au détriment des tarifs et de la pluralité des offres proposées aux clients. Mannesmann est d’ailleurs particulièrement influent, puisqu’il est l’actionnaire principal de deux des trois plus grands opérateurs mobiles européens, en Allemagne et en Italie avec Omnitel (avec un total de 8 millions de clients). Même si Vodafone-Mannesmann pourra défendre les avantages d’une offre standardisée sur l’Europe, on s’éloigne du bourgeonnement de prestations alternatives souhaitées par les gendarmes des télécoms nationaux.
Pour en savoir plus :
* Vodafone
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