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Voiture autonome : les réponses de Matignon à la Cour des comptes

Pour favoriser la structuration des acteurs français du domaine de la mobilité intelligente, le gouvernement compte mettre en œuvre un dispositif de « Mobilité 3.0 » que pilotera le ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer.

C’est l’un des nombreux points abordés par le Premier ministre Manuel Valls dans une lettre (PDF, 7 pages) du 26 avril 2016 à l’adresse de la Cour des comptes.

Le locataire de Matignon faisait suite au référé (PDF, 5 pages) que la juridiction administrative lui avait envoyé le 19 février à propos de « l’action de l’État pour le développement des transports intelligents ».

Les deux documents ont été publiés ce lundi 9 mai. Ils donnent un aperçu de la feuille de route des pouvoirs publics sur des sujets comme les véhicules autonomes dans le secteur du fret, l’ouverture des données de transports ou encore le soutien à la filière automobile dans son ensemble.

Du côté de la Cour des comptes, on avait posé un postulat : l’État n’est pas voué à se substituer aux acteurs privés pour financer une filière industrielle spécifique, mais il peut faire en sorte de supprimer certains obstacles.

Qualité allemande ?

L’une des principales recommandations formulées par le Premier président Didier Migaud était de désigner un chef de file des transports intelligents, responsable de la coordination des actions de l’État.

Pour la Cour des comptes, cette démarche est indispensable, l’organisation actuelle des services de l’État ne « [permettant] pas de répondre rapidement aux enjeux, ni de mettre en œuvre une politique publique harmonisée ».

Plusieurs ministères conduiraient en l’occurrence « des politiques sectorisées souvent contradictoires ou mal coordonnées ». En outre, l’État n’est pas seul : il existe « quatre cents autorités organisatrices de transport sur le territoire, dont chacune développe son propre projet, sans compter les initiatives des acteurs privés ».

Concernant la stratégie de développement des STI (systèmes de transport intelligents), la Cour des comptes revient notamment sur l’abandon du projet de calculateur national multimodal. Lequel consistait, sur le modèle de ce que font les Länder allemands avec la Deutsche Bahn, en l’unification des informations incluant différents modes de transport.

Des soucis d’interopérabilité entre de nombreux systèmes préexistants ont compromis le projet, prévu dans la stratégie « Mobilité 2.0 » annoncée début 2014 par le ministère de l’Écologie. Les « relations difficiles entre les 400 autorités organisatrices de transport et la SNCF » n’auraient pas arrangé les choses.

Liberté, égalité, ouvrez les données ?

Le Cour de comptes évoque aussi la nécessité de favoriser l’égalité d’accès aux transports, à l’heure où les évolutions (partage de données sur la circulation, covoiturage, autopartage…) « se font principalement au profit des usagers des villes […] alors que 60 % de la population réside dans des territoires périurbains ou à faible densité ».

Concernant l’ouverture des données, il est fait état d’un retard de la France, notamment sur les informations temps réel. La Cour de comptes craint par ailleurs que le dispositions dérogatoires inscrites dans l’article 4 de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques en limitent la portée.

Sur ce point, le gouvernement évoque un cadre législatif « en pleine évolution ».

Assurant que le régime d’ouverture spécifique qu’a institué la loi pour la croissance sera parachevé par l’adoption du projet de loi numérique, Matignon s’engage, comme le recommande la Cour des comptes, à énoncer des conditions claires et précises pour l’homologation et le respect des mesures dérogatoires en matière d’ouverture de données.

L’Agence française pour l’information multimodale et la billettique supervisera ce processus. Elle élaborera une grille d’analyse des protocoles qui sera rendue publique.

Faire évoluer les textes

Autre enjeu du débat : le développement des véhicules autonomes.

Que ce soit pour le transport de personnes ou de marchandises, la Cour des comptes y voit un levier de « productivité économique ou de temps retrouvé », « des perspectives pour des populations vieillissantes » et l’occasion de « désenclaver certains territoires ».

L’autorité administrative estime que les obstacles sont désormais d’ordre réglementaire : il faudrait notamment faire évoluer la Convention de Vienne, qui impose un conducteur pour tout véhicule.

Sur le plan national, la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique prévoit que le cadre nécessaire aux projets de déploiement expérimental de véhicules partiellement ou totalement autonomes soit fixé par ordonnance.

En la matière, la Cour des comptes suggère une approche similaire à celle du Royaume-Uni : que le gouvernement publie une planification des évolutions réglementaires et normatives nécessaires.

Jouer l’ouverture

Reconnaissant le soutien apporté par l’État à la filière automobile, tout particulièrement dans le cadre du programme Nouvelle France Industrielle, elle déplore néanmoins une « absence de stratégie globale et de coordination entre les services de l’État », avec notamment une veille internationale inadéquate pour orienter les actions à mener.

Que répond le gouvernement ? Que son souhait est de conserver des perspectives de développement « les plus ouvertes possibles [sic], comme en témoigne la liste des cas d’usage prévue par la feuille de route […] de la Nouvelle France Industrielle ».

Concernant la prise en compte, d’une part, des services plus spécifiquement dédiés à la mobilité en zone peu dense et d’autre part, au fret et à la logistique, « rejoignent les préoccupations du gouvernement ».

La difficulté est plutôt de « réunir les acteurs pertinents », car ils sont « moins structurés que ceux du domaine d’utilisation du véhicule particulier automatisé et connecté sur voie rapide ». Cette problématique sera au cœur du concept de « Mobilité 3.0 ».

L’été des dérogations

Sur le développement d’essais à grande échelle pour les voitures autonomes, le gouvernement souligne qu’il délivre aux constructeurs, depuis le printemps 2015, des autorisations d’un an sur les réseaux extensifs au titre des immatriculations de type « W garage ».

Quant à l’ordonnance qui doit être prise en application de la loi relative à la transition énergétique, elle sera publiée « avant la mi-août 2016 » et instituera un type de dérogation plus spécifique.

Et Matignon de rappeler l’engagement de la France dans plusieurs instances internationales : WP1 et WP29 au niveau des Nations unies ; le groupe de travail « véhicule autonome et connecté » au niveau du G7 ; la plate-forme C-ITS au niveau européen…

Crédit photo : Felix Catana – Shutterstock.com

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