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Xavier Niel : entre coups de cœur pour la France et coups de gueule contre ses ‘élites’

A la faveur d’une interview-déjeuner organisé chez Senderens, restaurant huppé bénéficiant de 2 étoiles Michelin (à La Madeleine, tout près du siège d’Illiad), un journaliste du Financial Times a obtenu un moment de vérité de Xavier Niel, le si atypique patron d’Illiad, Free et Free Mobile, actionnaire du Monde et créateur de la future école gratuite « 42 ».

Xavier Niel en janvier 2012 chez JJ Bourdin (RMC Info/BFM)

D’abord étonné par l’allure et l’habillement décontracté du « milliardaire », et par le manque d’empressement du personnel à son endroit bien qu’il fréquente les lieux depuis une vingtaine d’années, le journaliste va tout au long du repas aller d’étonnement en étonnement. Comme celui de constater que Xavier Niel ne boit jamais d’alcool (il a donc au moins un point commun avec Nicolas Sarkozy, qui l’avait présenté, on s’en souvient, comme « l’homme des peep-shows » et avait soutenu contre lui le projet de Claude Perdriel pour la reprise du monde, avec le succès que l’on sait…).

Long is the road…

Dans l’article qui rappelle en résumé tout le parcours de Xavier Niel, du Minitel Rose à Worldnet avant Free et sa Freebox, puis Freebox Mobile et sa bataille homérique contre les opérateurs en place et notamment Bouygues Telecom, et enfin sa reprise avec Pigasse et Bergé du Monde, le journaliste le décrit comme un « self made man » qui n’a pas fait beaucoup d’études et a démarré sa carrière professionnelle par un service de « chat sexuel » sur Minitel… Pas très élogieux, mais la suite va démentir cette entrée en matière…

Nostalgique quand tu nous tiens : Xavier Niel revient d’abord sur sa passion pour l’informatique et les nouvelles technologies née, comme beaucoup de français, par l’arrivée chez lui, alors qu’il avait 14 ans, d’un ZX 81 de Sinclair !

Présenté comme un « développeur informatique surdoué » ayant eu la chance de grandir dans un pays qui disposait très tôt d’un pré-Internet (le Minitel), le journaliste évoque quelqu’un qui est « désormais aux manettes d’une fortune valorisée à 6 milliards d’euros ».

Comparée aux grandes gloires du high-tech mondial, Xavier Niel parle de ce qu’il partage avec Bill Gates ou Mark Zuckerberg : « Ils ont également fait leur propre produit. Ils n’ont pas embauché quelqu’un pour le faire, ils ne sont pas seulement des hommes de marketing. » Il ajoute: « Je pense que je suis beaucoup moins brillant qu’eux, je suis juste un entrepreneur français. Et si une fois, j’ai dit ‘Steve Jobs est le Xavier Niel américain’, c’était de l’humour. »

La France : enfer ou paradis ?

« La France ne m’a pas freiné, mais elle ne m’a pas aidé non plus » explique-t-il. Il s’avère cependant très critique sur la façon dont les gouvernements successifs ont dirigé son pays depuis trente ans: « La France n’est pas le pays le mieux dirigé » s’exclame-t-il, et  il ajoute : « La France fait des gaffes énormes, comme cette taxe à 75% qui ne touche personne, mais fait parler tout le monde !» A preuve : lui-même, en dépit de sa richesse, ne sera pas concerné, « car il ne reçoit pas un salaire assez important… » !

Confronté à des français râleurs par essence, plus que par raison, il explique que la France est « un pays agréable, avec une énorme protection sociale, un système fiscal qui n’est pas du tout horrible. C’est un endroit fantastique pour vivre. Ce n’est certes pas la mieux gérée pays du monde, mais je l’aime ».

En revanche, quand on l’interroge sur les élites françaises, Xavier Niel n’y va pas par quatre chemins. Il parle de copinage et explique: « La plupart des hommes d’affaires français sont des héritiers, qui fréquentent les mêmes cercles, ou ont obtenu leurs postes directement ou indirectement grâce au pouvoir politique. »

Évoquant de plus l’égoïsme de leur mode de rémunération, il invite à jeter un coup d’œil au CAC40, indiquant qu’au cours des trente dernières années, une seule entreprise – Gemalto – y est entré, ce qui est vraiment très peu, « aucun pays dans le monde n’a connu cela… »

Xavier Niel, qui selon diverses sources, voudrait investir dans Dailymotion (après l’imbroglio politico-médiatico-économique de Yahoo!), est revenu dans la foulée sur l’épisode de janvier dernier qui a vu Free modifier ses paramètres par défaut afin de bloquer les publicités en ligne avec dans sa cible YouTube (« ils refusent de payer pour le trafic en ligne qu’il génère »).  A la question du journaliste du FT qui évoque la décision de Fleur Pellerin qui a demandé de cesser ses agissements, il répond par une menace: «Vous pensez que nous allions nous endormir quand le ministre nous a dit d’arrêter? […] Nous allons continuer, couper les annonces de temps en temps, et un jour nous allons couper pour de bon. »

Pas de quoi pour autant se détourner de la France et de son engagement auprès des jeunes pousses, avec le fonds d’investissement qu’il a créé avec Jérémie Berrebi, assurant qu’il continuerait de soutenir «financièrement deux startups chaque semaine ». «C’est plus rentable que de jouer à la loterie, s’exclame-t-il, et c’est beaucoup plus amusant. » Il n’oublie pas d’évoquer aussi son école innovante et gratuite « 42 » pour les développeurs « 50 000 personnes ont candidaté pour 1 000 places disponibles ».

L’argent, c’est quoi pour lui ? Il répond au journaliste qu’il en faut, mais que ce n’est pas son moteur. « Je ne suis pas né avec beaucoup d’argent et le jour où je mourrai, l’argent ne me sera pas très utile. » Expliquant qu’il laissera suffisamment à ses enfants mais qu’il tient à redistribuer le reste, il dit ne pas penser au passage «que Steve Jobs avait bien envie de partager sa fortune ».

Sa plus grande fierté l’an passé ? « Nous avons redonné 2 Md € de pouvoir d’achat aux français et à chacun d’entre eux j’ai donné 40 € par mon travail ».

Retrouvez l’article original ICI

Pourquoi ne pas aller au-delà de l’hexagone ?
A la question du journaliste du Financial Times qui lui demande pourquoi il ne se développerait pas à l’international, il répond que les télécoms constituent une activité nationale, qu’il n’y a pas de marché européen montrant par exemple que Telecom Italia n’est pas présent en France. Il affirme : « Regardez nos difficultés à obtenir une licence de téléphonie mobile en France. Si nous n’avions pas été français, cela aurait été impossible. »

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