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Xserve face aux solutions Windows

Un flot de réactions a envahi les forums depuis qu’Apple a levé le voile sur Xserve (voir édition du 15 mai 2002), son serveur en rack tournant sous Mac OS X Serveur, une version d’Unix FreeBSD mâtinée du coup de patte des ingénieurs de Cupertino. Les premières réactions ont porté essentiellement sur le matériel, les avocats du tout-PC sous Windows tâchant de trouver l’argumentation la plus crédible pour montrer que les nouveaux serveurs n’avaient rien à faire sur un marché où ils n’étaient pas attendus. Le forum d’Ars Technica donne une bonne illustration des débats qui passionnent les spécialistes actuellement. Autant les aficionados du Mac peuvent être jugés particulièrement obtus quand on vient leur chercher des poux dans la tête en ce qui concerne la vitesse des processeurs utilisés par Apple ou le prétendu « enfermement » de la plate-forme, autant les groupies du tandem Wintel peuvent se sentir vexés quand une bonne idée a échappé à l’ogre de Redmond ou à l’étrangleur du coût d’acquisition Dell ! De telles réactions soulignent deux choses : la première, c’est le retard de perception vis-à-vis de Mac OS et d’Apple que peuvent avoir les spécialistes du domaine des serveurs (essentiellement sous Wintel, bien que certaines réactions soient bizarrement issues d’utilisateurs de Linux) quand il leur est proposé de sortir des sentiers battus. En second lieu, si de telles réactions ont émergé, c’est qu’Apple a très certainement touché une corde sensible. Et de fait, certaines des réactions les plus pondérées viennent d’administrateurs dotés d’une expérience non négligeable sur tous types de plates-formes. Et si ceux-ci attendent les benchmarks qui leur permettront de juger sur pièces des performances des nouvelles machines – dont le PDG d’Apple a indiqué que les chiffres préliminaires semblaient bon, sans autre précision – ils se disent particulièrement intéressés, surtout par l’incroyable réduction de coût que semble offrir le nouveau serveur.

L’offre d’Apple n’est pas peu attractive ! La bande passante disponible sur les nouveaux racks fait de l’Xserve le matériel idéal pour les marchés auxquels s’adresse habituellement la firme : fermes de serveurs pour les sociétés du secteur de la recherche scientifique, stations graphiques pour les arts graphiques, armoires de calculs pour les fanatiques de la vidéo numérique, serveurs à administration enfantine pour le monde de l’éducation, solutions à haute disponibilité pour les universités… Mais surtout, la proposition d’Apple s’avère particulièrement agressive. Les plus expérimentés des participants des forums ont beau retourner le problème dans tous les sens, pour parvenir au niveau de l’offre d’Apple, il faut singulièrement se casser les méninges. Et il n’y a bien qu’avec des solutions tournant sous une des versions de Linux qu’on peut s’en sortir. La raison ? Le coût du matériel n’est pas très élevé : le coût de stockage est un des plus bas du marché (4,4 euros le Go contre 14 à 17 euros pour la concurrence) ! Apple n’utilisant pas SCSI dans son serveur et justifiant ce choix. Bonjour les économies d’échelle à l’acquisition ! Ajoutez à cela des coûts de maintenance qui ont toujours été présentés comme plus bas sur les machines de Cupertino (la firme devra désormais le prouver sur ses nouveaux serveurs). Mais surtout, ce sont les coûts de licence qui font toute la différence : Mac OS X Server, l’OS d’Apple, est fourni dans la boîte du Xserve avec licence illimitée ! Les administrateurs de serveurs s’entendent répéter ce dernier point à l’envi sur les forums les plus animés. En positionnant ses nouvelles machines de la sorte, Apple entre de plain-pied dans le champ traditionnel des serveurs sous Linux, Unix ou Windows NT. La grande différence proposée par la firme concerne la facilité de déploiement, d’administration et de développements spécifiques. L’exemple de la société Pixar (voir édition du 14 mai 2002), donné la semaine dernière à l’occasion de la WWDC, est révélateur : la firme devrait migrer de ses machines sous Linux, Unix et Windows vers Mac OS X. La raison : la possibilité de chaîner les flux de travail entre fonctions et applications, par le biais du développement très rapide autorisé par les outils de développement d’Apple (la programmation s’apparente à un jeu de Légo, nécessitant très peu d’hommes/mois).

Augmentations prévues chez Microsoft

L’arrivée de la solution d’Apple, qui sera renforcée d’ici la fin de l’été par la commercialisation de la version 10.2 de Mac OS X, tombe à point nommé : les entreprises, petites ou grandes, sont actuellement à la recherche de solutions alternatives à l’offre logicielle de Microsoft. La raison ? L’éditeur doit engager sa nouvelle politique tarifaire au 1er août 2002. Celle-ci devrait voir une augmentation de 33 à 77 % des coûts de licences pour les entreprises voulant rester à jour dans leurs versions d’applications (changement de logiciels tous les trois ans), selon une étude du Gartner Group. Pour la plupart des entreprises tournant sous Windows et utilisant la suite Office, cette augmentation représente une ponction douloureuse. Résultat, environ 17 % des sociétés sont prêtes à changer de fournisseur d’applications, à condition de trouver une alternative crédible. Jusqu’à aujourd’hui, celle-ci n’existait pas réellement : la seconde partie du marché, tenue par des systèmes Unix, n’est pas abordable pour des entreprises qui ne peuvent pas se permettre d’embaucher un spécialiste Unix. Avec Mac OS X, Mac OS X Serveur et les nouveaux racks, l’attention d’Apple devra se porter sur la démonstration de la possible transition de réseaux uniquement PC vers des réseaux hétérogènes comprenant des Mac. Tout l’effort d’Apple devrait donc consister désormais à prouver aux entreprises que son offre est viable. La firme commence à s’y employer immédiatement avec la mise en place, en France, des « Rencontres professionnelles Apple » qui se tiendront du 23 mai au 27 juin prochains. La Pomme y montrera sa plate-forme aux entreprises et les possibilités de compatibilité et d’intégration entre Mac et PC. Bien sûr, les marchés traditionnels de la firme ne sont pas oubliés : la vidéo, la chaîne graphique et l’éducation feront aussi l’objet de conférences dédiées durant ces rencontres. L’effort d’Apple, exercé exactement au moment où les entreprises en ressentent un réel besoin, se justifie également du fait du support de plus en plus important de sa plate-forme. La prochaine MacWorld de New York devrait voir notamment le retour de sociétés à cet événement exclusivement Mac. La reconquête de parts de marché annoncée par Steve Jobs est donc en marche, et bien en marche.

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